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en Israël, les liens étroits entre universités, industrie militaire et armée

Universités israéliennes sont impliqués dans le développement de systèmes d’armes et de doctrines militaires déployés lors des récents crimes de guerre commis par Israël au Liban et à Gaza » : c’est la critique formulée par le mouvement BDS – boycott, désinvestissement, sanctions –, qui prône notamment le boycott académique des établissements d’enseignement supérieur israéliens. En Israël, les liens entre les universités et le complexe militaro-industriel sont particulièrement étroits. De la coopération avec l’industrie de défense à la formation des soldats en passant par la réflexion sur la doctrine militaire, une partie du monde universitaire israélien est intimement liée à l’armée et à l’industrie de défense. Si ces relations sont décriées par les partisans de la cause palestinienne, en Israël, elles sont largement considérées comme nécessaires à la sécurité du pays.

La recherche universitaire au service de l’armement

Elbit Systems, Rafael, Israel Aerospace Industries… Ces noms méconnus du grand public sont au cœur de la guerre menée par Israël dans la bande de Gaza. Ces trois sociétés, dont deux publiques, fournissent du matériel militaire à l’armée de l’État hébreu. Elbit Systems, une société privée, y vend notamment des drones de reconnaissance et des obus d’artillerie. Sur son site Internet, le constructeur précise que certains de ses produits ont été « testés sur le champ de bataille ». L’entreprise a signé le 21 mai un contrat d’une valeur de 760 millions de dollars avec le ministère de la Défense pour la fourniture de munitions.

Pour recruter des talents et développer ses technologies, Elbit Systems s’implante au cœur du système universitaire israélien. Selon le site spécialisé dans les questions économiques IsraelValley, l’université de Tel Aviv et Elbit Systems gèrent conjointement depuis sept ans le programme InnoBit, une formation d’ingénieur permettant à l’entreprise d’identifier les profils à recruter.

Au-delà de la simple coopération en matière de recherche, les universités israéliennes sont le berceau de l’industrie militaire.  » Israel Aerospace Industries est né à l’Institut des sciences Weizmann, une université de la ville de Rehovot, et Rafael est né au Technion de l’Université de Haïfa. « , déclare Maya Wind, chercheuse israélienne à l’Université de la Colombie-Britannique à Vancouver, au Canada, et auteur du livre  » Tours d’ivoire et d’acier – Comment les universités israéliennes nient la liberté des Palestiniens « .

Le Technion de l’Université de Haïfa est un prestigieux institut de recherche qui forme chaque année de nombreux ingénieurs. Depuis 2002, il abrite un Institut de Technologie, dont les recherches mettent en valeur « se concentrer sur les questions et les problèmes auxquels sont confrontés les secteurs de la sécurité et de la défense israéliens. » En 2017, l’institution est devenue un centre de recherche avancée pour la défense. Sur son site Internet, elle met notamment en avant un projet visant à réduire le bruit produit par les drones.

Formation militaro-universitaire

Au-delà des liens avec les industriels de l’armement, les universités israéliennes sont aussi des lieux de formation des élites militaires du pays.  » Les principales universités israéliennes proposent des programmes académiques pour les soldats », souligne Maya Wind. L’Université hébraïque de Jérusalem, par exemple, propose deux cours de formation militaire. Le programme Havatzalot consiste en un double diplôme » élite au sein des Forces de défense israéliennes visant à former des officiers du renseignement hautement qualifiés « . La formation est assurée conjointement par l’armée et l’Université hébraïque.

Au-delà de cette formation, les universités israéliennes sont aussi un lieu de réflexion sur les stratégies militaires à adopter. L’Institut d’études sur la sécurité nationale, affilié à l’université de Tel Aviv, a publié en 2008 un texte signé par Gabi Siboni, un officier supérieur de l’armée, défendant la « doctrine Dahiya », du nom d’un quartier chiite de la banlieue sud de Beyrouth, fief du Hezbollah, détruit par les bombardements de l’armée israélienne en 2006. En cas de déclenchement des hostilités, les FDI (l’armée israélienne, Note de l’éditeur) doit agir immédiatement, de manière décisive et avec une force disproportionnée aux actions de l’ennemi et à la menace qu’il représente, affirme son auteur. Une telle réponse vise à infliger des dégâts et des sanctions d’une telle ampleur qu’elle nécessitera des processus de reconstruction longs et coûteux.. »

Un mouvement de boycott international

Ces liens entre les universités israéliennes et le complexe militaro-industriel sont pointés du doigt par des militants pro-palestiniens appelant au boycott universitaire de l’État juif. La Conférence des recteurs des universités espagnoles s’est ainsi engagée le 17 mai à « revoir et, le cas échéant, suspendre les accords de collaboration avec des universités et des centres de recherche israéliens qui n’ont pas exprimé un engagement ferme en faveur de la paix et du respect du droit international humanitaire « . Dans Le mondeTamir Shaefer, recteur de l’Université hébraïque de Jérusalem, assure de son côté que « les universités sont indépendantes du gouvernement. Nous sommes des îlots de bon sens, des bastions des valeurs démocratiques « .

William Dupuy

Independent political analyst working in this field for 14 years, I analyze political events from a different angle.
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