En Géorgie, des élections cruciales ressemblent à un référendum entre l’UE et la Russie
VANO CHLAMOV / AFP
Des manifestants pro-UE se rassemblent à Tbilissi, la capitale géorgienne, le 20 octobre, une semaine avant les élections législatives.
GÉORGIE – Un fossé plus grand et l’avenir du pays en jeu. Les Géorgiens sont appelés aux urnes ce samedi 26 octobre pour des élections législatives cruciales. Ces derniers mois, le gouvernement s’est enfermé dans une dérive autoritaire pro-russe, au point d’être accusé par Bruxelles de restreindre les droits des minorités et de réprimer les manifestants.
En conséquence, le vote de ce samedi se résume à « un quasi-référendum » entre l’Union européenne « ou le retour à un passé russe incertain »le président a récemment résumé à l’AFP Salomé Zourabichvili, pro-européenne et opposée à la politique de son gouvernement. Les élections législatives voient s’affronter le Rêve géorgien, le parti du milliardaire Bidzina Ivanishvili au pouvoir depuis 2012, et les formations d’opposition pro-européennes. Ceux-ci, traditionnellement divisés, ont réussi à forger un front inédit pour les élections législatives.
Selon de récents sondages, cette alliance serait en mesure de battre le rêve géorgien, alors que 79% des 4 millions d’habitants du pays souhaitent rejoindre l’UE, un objectif également inscrit dans la Constitution géorgienne, selon l’Institut national démocratique. Une aspiration particulièrement forte chez les jeunes générations. Le 20 octobre, des dizaines de milliers de manifestants pro-européens se sont rassemblés à Tbilissi.
Empêcher « l’ukrainisation » du pays
En réponse à la manifestation de l’opposition du 20 octobre, le Rêve géorgien a transporté des dizaines de milliers de partisans, souvent des fonctionnaires, de tout le pays à un rassemblement dans le centre de Tbilissi le mercredi 23 octobre.
» Je pense que le rêve géorgien nous donne des garanties de paix », estime un professeur interrogé par RFI au sein du cortège. Un argument sécuritaire que le parti au pouvoir, se présentant comme le seul capable d’empêcher un prétendu « Ukrainisation » de Géorgie, n’a cessé de se développer au cours de sa campagne, et alors que le pays reste marqué par l’invasion russe de 2008.
Bidzina Ivanishvili, l’homme fort du pays qui a fait fortune en Russie, n’a cessé de critiquer l’Occident pendant la campagne. Il l’a également décrit comme « fête de la guerre mondiale », qui traiterait la Géorgie comme « chair à canon ». Dans une interview publiée cette semaine, il a même assuré que « orgies » se trouvait « dans les rues » Pays occidentaux. Une diabolisation qui n’est pas sans rappeler celle du président russe Vladimir Poutine.
Cette élection intéresse beaucoup Moscou, qui a dénoncé la veille du vote par la voix de son porte-parole, Dmitri Peskov, les tentatives de« ingérence » Occidental. « Ils essaient de tordre le bras à Tbilissi, de dicter leurs conditions »a-t-il accusé, assurant que le Kremlin, de son côté, ne cherchait pas à s’immiscer dans le « entreprise » de Géorgie.
Une dérive autocratique
Après avoir refusé de s’associer aux sanctions économiques contre Moscou suite à l’invasion de l’Ukraine, le gouvernement géorgien semble avoir tout fait pour se rapprocher de son voisin russe. Au printemps dernier, l’adoption de la loi sur «influence étrangère» a déclenché d’énormes protestations dans la capitale. Elle a été comparée par ses opposants à une loi russe sur « agents étrangers »utilisé par le Kremlin depuis 2012 pour faire taire les dissidents. Dans la foulée, Bruxelles a gelé le processus d’adhésion du pays à l’UE.
Dernière cause de tensions entre Bruxelles et Tbilissi : la promulgation début octobre d’une loi restreignant sévèrement les droits des personnes LGBT+ par le Parlement, contournant le refus du chef de l’Etat, qui dénonçait un texte « anti-européen ».
Cette législation interdit non seulement « propagande des relations homosexuelles et de l’inceste » dans les écoles et les émissions de télévision, mais rend également illégales la conversion sexuelle et l’adoption par les personnes homosexuelles et transgenres. Là encore, ses détracteurs soulignent les similitudes avec l’arsenal juridique russe contre « Propagande LGBT ». Une voie liberticide que la Géorgie s’apprête à choisir de continuer ou non à emprunter ce samedi.
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