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en Finlande, le spectre de l’agression russe au cœur des élections européennes

La Finlande partage 1 380 km de frontière avec la Russie et vit aujourd’hui sous la menace de son grand voisin.

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A la frontière entre la Finlande et la Russie, mai 2024 (VALENTIN DUNATE / FRANCEINFO / RADIO FRANCE)

Le lien entre la Finlande et la Russie est complètement rompu depuis près de six mois. Le poste frontière de Vaalima, situé dans le sud de la Finlande, entre Helsinki et Saint-Pétersbourg, voit passer environ deux millions de personnes par an ; c’est maintenant un calme plat. « Ce poste frontière est fermé depuis le 15 décembre en raison de l’immigration irrégulière mise en œuvre par la Fédération de Russie », explique le lieutenant Jesse Pirttinen, chef adjoint de la police des frontières.

Les Finlandais accusent les Russes d’avoir envoyé des centaines de migrants et de mener « une guerre hybride ». « Ici, nous avons du personnel de Frontex, notamment des gendarmes françaispoursuit le lieutenant Pirttinen, donc il ne s’agit pas seulement de la Finlande… C’est une question européenne. »

Vladimir Poutine a récemment déployé des hommes et ce qu’il appelle des « systèmes de destruction » à la frontière, ce qui ne rassure pas les Finlandais qui habitent juste à côté, comme Seppo et Marrit, des retraités qui possèdent une très jolie maison en lisière de forêt. « Je n’ai pas peur pour le moment, mais je ne veux certainement pas qu’il y ait la guerre, je ne veux pas que la Russie attaque ici.» dit Marrit. Mais je suis calme. Après, je ne vous cacherai pas que chaque soir, je vérifie quand même que les portes sont fermées, et qu’il n’y a personne. ! » Son mari ajoute que si la Finlande n’avait pas rejoint l’OTAN, il y aurait déjà eu une attaque.

Avant l’invasion russe de l’Ukraine, les Finlandais étaient largement opposés à l’adhésion à l’OTAN ; maintenant ils se préparent. Les ventes d’armes sont en nette augmentation et le pays envisage d’ouvrir pas moins de 300 nouveaux champs de tir dans l’intérêt de la défense nationale, car ces lieux sont déjà surpeuplés. Antti Kettenen, président de l’association des réservistes de Vantaa, près de Helskinki, confirme : « Dans mon club, nous avons eu 912 nouveaux adhérents au printemps 2022, notre fréquentation a doublé en quatre mois, à cause de ce qui s’est passé en Ukraine. » Pour lui, savoir manier une arme, c’est comme apprendre à nager : « Si tu es éjecté d’un bateau, tu dois rejoindre le rivage. Si tu ne sais pas nager, dis-moi comment tu fais ? Donc, si vous pouvez vous procurer un fusil de chasse, c’est mieux que rien, mieux que des pierres et des bâtons. Les Finlandais sont encouragés à continuer à utiliser les armes, même après le service militaire (obligatoire pour les hommes) :

« En Finlande, tous les gars que vous avez rencontrés aujourd’hui sont dans l’armée. Même quand tu vas à l’épicerie, le gars qui t’a servi des cigarettes sait tirer au bazooka !

Antti Kettenen

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Dans ce stand de tir, il y a de nombreux réservistes mais aussi des femmes et des jeunes, comme Nouti : à 18 ans, il débutera son service militaire cet été, et il est prêt, comme toute sa famille. « Nous avons un stock d’eau et de nourriture pour 72 heures à la maison, il a dit, et je me suis aussi préparé mentalement au fait que je pourrais potentiellement entrer en guerre dans les dix prochaines années. »

Le sous-sol d’Helsinki regorge d’abris : il y a plus de places dans ces espaces souterrains que d’habitants dans la capitale. Dans chacun de ces abris, une première porte protège des explosions, une seconde des produits chimiques. En cas d’attentat, ce lieu, où se trouvent un terrain de sport, un bar, un parking, peut être transformé en 72 heures pour accueillir 6 000 personnes, explique Tuula Luoma, de la protection civile. 2 000 lits de camp sont déjà prêts : « Il vaut mieux les acheter maintenantdit Tuula Luoma, cela coûte moins cher et en cas d’urgence, il n’y a pas de problème de disponibilité. »

Tuula Luoma, de la défense civile finlandaise, dans un abri souterrain à Helsinki.  Mai 2024 (VALENTIN DUNATE / FRANCEINFO / RADIO FRANCE)

Il y a de l’eau, de l’air qui peut être filtré… Les Finlandais ont vraiment pensé à tout, et ils mettent les moyens : la sécurité et la défense sont les seuls postes budgétaires qui n’ont pas été revus à la baisse.

Gérard Truchon

An experienced journalist in internal and global political affairs, she tackles political issues from all sides
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