Le produit intérieur brut de la Russie a augmenté de 4% sur un an au deuxième trimestre, a annoncé vendredi l’agence nationale des statistiques Rosstat, dans un contexte d’accélération de l’inflation provoquée par une augmentation des commandes militaires.
Ce chiffre est en baisse par rapport au premier trimestre (+5,4%), mais il marque néanmoins une croissance significative, dont se vante la Russie, considérant qu’elle a déjoué les sanctions occidentales adoptées en représailles à l’assaut contre l’Ukraine en 2022.
Une économie boostée par la Défense
Depuis plus de deux ans, l’effort de guerre est devenu le principal moteur de l’économie russe. Pour 2024, le budget de défense et de sécurité dans son ensemble s’élève à environ 8,7 % du PIB, selon le président Vladimir Poutine.
Signe de la réorganisation de l’économie autour des besoins militaires, plus d’un demi-million de Russes, selon les chiffres officiels, ont rejoint l’industrie de défense depuis 2022 pour répondre à la demande.
Et en mai, Vladimir Poutine a nommé un économiste sans expérience militaire, Andreï Belousov, à la tête de l’important ministère de la Défense, dont la mission est d’optimiser les dépenses colossales de l’armée, où la corruption reste un problème endémique.
Inflation record
Portée d’un côté par la forte hausse des commandes militaires pour soutenir l’assaut en Ukraine, et de l’autre par les importantes primes versées aux soldats et à leurs familles, cette croissance alimente depuis plusieurs mois une spirale inflationniste qui inquiète les autorités.
En juillet, la hausse des prix a atteint 9,13%, selon Rosstat, réduisant encore le pouvoir d’achat des Russes, déjà impacté par les sanctions. Il s’agit du niveau le plus élevé depuis février 2023 et loin de l’objectif de 4%.
» Cibler l’inflation est une priorité « La situation économique est tendue, les prix sont élevés, les prix sont bas », a martelé fin juillet devant la presse le porte-parole de la présidence russe, Dmitri Peskov, sans toutefois que le gouvernement parvienne à enrayer le phénomène à ce stade. C’est dans cette optique que la Banque centrale russe (RCB) a relevé son taux directeur de 16% à 18% fin juillet et revu à la hausse sa prévision d’inflation en fin d’année, désormais attendue entre 6,5 et 7%.
Les dirigeants russes inquiets
Cette décision a été accueillie froidement par les chefs d’entreprise, qui estiment qu’elle pourrait ralentir la croissance. Autre épine dans le pied des dirigeants russes : les difficultés croissantes des entreprises à effectuer des paiements à l’étranger, en raison des sanctions occidentales. Car après avoir mis en place plusieurs paquets de restrictions dont l’efficacité semble s’épuiser au fil du temps, l’Occident, Etats-Unis en tête, tente de faire pression sur les pays accusés d’aider la Russie à contourner les sanctions, comme la Turquie, les Emirats arabes unis, ou la Chine, allié diplomatique de Moscou avec qui les échanges commerciaux explosent depuis 2022.
» Les risques de sanctions secondaires ont vraiment augmenté « pour les entreprises étrangères qui commercent avec la Russie », a récemment averti la présidente de la BCR, Elvira Nabiullina, selon qui ces blocages peuvent provoquer une augmentation du prix des marchandises importées, faisant encore grimper l’inflation.
Dans le même temps, les pénuries de main-d’œuvre dans de nombreux secteurs, provoquées par le départ des hommes au front et l’exil à l’étranger de centaines de milliers d’autres, notamment pour fuir la mobilisation annoncée pour l’automne 2022, continuent de peser sur la performance des entreprises.
La croissance européenne toujours proche de 0
De leur côté, les Européens font face à une activité sensiblement ralentie par la hausse des taux de la Banque centrale européenne, qui se situent dans une fourchette comprise entre 3,75% et 4,5% depuis la baisse lors de la réunion de juin.
La croissance économique de la zone euro a toutefois été légèrement supérieure aux attentes au deuxième trimestre, avec un PIB en hausse de 0,3% par rapport aux trois mois précédents, confirmant son rebond depuis janvier, a annoncé Eurostat fin juillet. D’autant que les analystes interrogés par Bloomberg et Factset s’attendaient en moyenne à un léger ralentissement de la croissance à 0,2% entre avril et juin. Au premier trimestre, la zone euro avait déjà affiché une croissance du PIB de 0,3%, s’affranchissant de la stagnation enregistrée au deuxième semestre de l’année dernière (0%). Pour l’ensemble de l’Union européenne, la croissance a également maintenu son rythme de 0,3% au deuxième trimestre, atteint en début d’année.
Quant à la France, Le PIB a atteint 0,3%une hausse plus forte que celle anticipée par l’INSEE. L’activité économique a été soutenue par le commerce extérieur et un rebond de l’investissement des entreprises.Cette première estimation de la croissance est également supérieure à la prévision de l’Insee d’une hausse de 0,1% par rapport au premier trimestre. La Banque de France s’était montrée plus optimiste, avec une anticipation de 0,3% en ligne avec le niveau réel de croissance.
(Avec AFP)