En choisissant de communiquer sur TikTok, Donald Trump n'a pas tort
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En choisissant de communiquer sur TikTok, Donald Trump n’a pas tort

En choisissant de communiquer sur TikTok, Donald Trump n’a pas tort

Une excursion dans une soirée MMA, une courte vidéo avec l’influenceur Logan Paul. « Je vais sauver TikTok ! », s’exclame même Donald Trump. Lentement, début juin, l’ancien président américain en lice pour un nouveau mandat s’est lancé sur le réseau social. Malgré une activité assez faible, son compte est suivi par 8,6 millions de personnes, et sa première vidéo affiche 157,2 millions de vues. Le Donald, le nouveau TikToker à suivre.

Le candidat républicain semble même préférer ce réseau social chinois à Meta, le géant américain. « Si vous n’avez pas TikTok, vous avez Facebook et Instagram, et donc, vous savez, vous avez (Mark) Zuckerberg », s’est-il défendu dans une interview à Bloomberg. Un tacle en deux parties sur le créateur de Facebook, qui aurait fait passer Donald Trump « de numéro 1 à rien » en le bannissant de ses plateformes en 2021, après la prise d’assaut du Capitole.

Un pôle géopolitique

En 2020, Donald Trump a pourtant tenté d’interdire TikTok, invoquant des raisons de sécurité nationale. Ce revirement peut s’expliquer de deux manières, estime Alexandre Eyries, enseignant-chercheur HDR en sciences de l’information et de la communication à l’Université catholique de l’Ouest. « A l’époque de son slogan ‘America First’, un réseau social chinois n’était pas possible, explique l’expert. Aujourd’hui, Xi Jinping est l’un de ses principaux alliés politiques, donc ce n’est plus un problème. »

« Sur le plan géopolitique, sa politique est prise en tenaille », explique Olivier Alexandre, docteur en sociologie, chargé de recherche au CNRS et membre du Centre Internet et Société. « Il prône l’isolement des Etats-Unis, mais en même temps, le pays est en position de guerre commerciale avec la Chine, où la tech est un enjeu central. Il a rassuré les investisseurs en affirmant qu’il fallait traiter l’IA avant la Chine, où l’administration Biden voulait réguler ou taxer. »

Atteindre un nouveau public

De plus, ce nouveau réseau social lui permet de conquérir de nouveaux électeurs. Il faut dire que le terrain est plutôt fertile. L’application affiche plus de 120 millions d’utilisateurs aux États-Unis. Et, dans leur pays, les publications liées à Donald Trump n’ont pas attendu l’arrivée officielle du candidat pour faire un carton. Le hashtag #trump, par exemple, totalise 7,3 millions de publications (contre 2,1 millions pour #biden).

« Cela permet de toucher un public déçu des réseaux sociaux traditionnels, qui a quitté Facebook ou Twitter », explique Alexandre Eyries. Parmi eux, des jeunes Américains qui ne votent pas, mais qui pourraient s’intéresser à la politique. L’expert poursuit : « Je ne suis pas sûr que cela atteigne directement les électeurs, mais, par un effet de transmission, les internautes peuvent devenir des relais de communication et le message peut se propager. À leur famille, par exemple. »

« Déjà un TikToker potentiel »

Les codes qui fonctionnent sur la plateforme sont déjà bien connus du candidat républicain. « La vidéo courte et percutante, le buzz, se faire remarquer, tout ça, c’est déjà l’ADN de la communication de Trump », poursuit Alexandre Eyries. Il a déjà compris que, dans la communication politique, le contenu vient en second, après la visibilité à moindre coût. Il est déjà un TikToker en puissance.

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Les algorithmes des réseaux sociaux facilitent aussi la diffusion de discours radicaux. Comme YouTube et Twitter, TikTok privilégie les bulles de filtres, avec des flux personnalisés en fonction de ce que ses utilisateurs aiment déjà. Autre avantage : « choisir de ne toucher que ses abonnés », explique Alexandre Eyries. Avec des millions de vidéos par jour, le flux est tel qu’« une vidéo ouvertement alt-right, avec des propos très durs, ne va pas forcément attirer l’attention ». Un bon moyen de radicaliser une partie des spectateurs sans trop attirer l’attention ou la polémique.

Le phénomène est comparable à la dynamique d’autres personnalités d’extrême droite, comme Jordan Bardella, sur les réseaux sociaux. « Il y a une logique partagée de représentation et de culte de l’homme présidentiel », explique Alexandre Eyries. Attention toutefois, tout n’est pas transposable, en raison des « particularités de la vie politique américaine, comme le système des grands électeurs », prévient l’enseignant-chercheur. « Il ne faut pas oublier que sur les réseaux sociaux, les contenus les plus regardés sont ceux diffusés par des médias, comme Fox News, tempère aussi Olivier Alexandre. Et c’est là qu’il puise ses racines. Les gens qui votent, aux Etats-Unis, ne sont pas des jeunes. » S’il veut les motiver en s’appuyant sur la plateforme chinoise, Donald Trump devra aussi se montrer plus cohérent : sa dernière vidéo date du 23 juin.

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