En Birmanie, les guérillas ethniques infligent un nouveau revers à la junte militaire
La prise de la ville de Lashio, le 3 août, dans le nord-est de l’État Shan en Birmanie, par l’un des groupes armés ethniques en guerre contre la junte birmane, a marqué une nouvelle étape dans l’affaiblissement du régime birman. La guerre contre la résistance armée issue de l’opposition au coup d’État de 2021 se double désormais d’un conflit ouvert avec les redoutables guérillas issues des minorités peuplant le vaste territoire frontalier de la Chine.
Sept mois après la reconquête surprise de son territoire à la frontière chinoise, l’Armée de l’alliance nationale démocratique du Myanmar (MNDAA), guérilla historique de l’ethnie Kokang, a ainsi poussé l’offensive 180 kilomètres à l’intérieur des terres jusqu’à Lashio, 170.000 habitants, reliée par une voie ferrée à Mandalay, deuxième ville de Birmanie et principal pôle commercial sur l’artère commerciale avec la Chine.
La ville abrite l’un des quatorze commandements militaires régionaux de Birmanie. Il a été le premier à tomber aux mains de la résistance. Les combats ont été sanglants : une vidéo prise par les Kokang montre leurs troupes entrer dans le quartier général de l’armée, où des cadavres jonchent les allées. L’hôpital militaire aurait également été attaqué : le média indépendant DVB a fait état de vingt morts civils et de neuf membres du personnel médical, qui n’ont pu être évacués. Trois généraux, dont le général de division qui commandait la base, ont été capturés, ainsi que peut-être 4 000 soldats et leurs familles, tandis que de grandes quantités d’armes ont été saisies.
La junte birmane a organisé des manifestations dans la capitale Naypyidaw et à Rangoon, mardi 6 août, où ses partisans ont brandi des pancartes montrant des images de victimes présumées de l’hôpital militaire de Lashio. Sur les chaînes Telegram pro-régime, des voix ont dénoncé « trafiquants de drogue » et certains « extrémistes » soutenus par la Chine – les Kokang sont des Chinois qui vivent en Birmanie depuis des siècles et dont la langue officielle est le mandarin.
Des capacités sous-estimées
Le chef de la junte et architecte du putsch de février 2021, le général Min Aung Hlaing, a condamné le même jour, dans un long discours, la reprise des combats par les Kokang et leurs proches alliés, les armées ethniques Ta’ang et Arakanaise (le trio se fait appeler le « Alliance des Trois Fraternités »« l’alliance des trois fraternités »), et la « experts en technologie étrangère » qui leur donnerait un coup de main.
Il a appelé à se rallier derrière la Tatmadaw, les forces armées birmanes, seules capables de résister à la « insurgés internes » et à « envahisseurs extérieurs »Pas sûr qu’il convainque, même au sein de son camp où, comme après la chute en janvier de Laukkai, la capitale de l’enclave de Kokang, la grogne contre lui a recommencé à se faire entendre : le moine ultranationaliste Wirathu, pourtant pro-régime, l’a accusé, le 8 août, d’envoyer des soldats à la mort sans stratégie. Militairement, la conscription forcée, lancée en février, peine visiblement à remonter le moral des troupes.
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