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En Alsace, le grand hamster se bat pour sa survie

Au milieu d’un champ de blé, un gros hamster s’échappe d’une petite cage pour s’enfouir dans un terrier creusé à l’avance pour lui. Sa mission : survivre et se reproduire pour perpétuer l’espèce, qui n’existe qu’en Alsace.

Sous le soleil du matin, une soixantaine de rongeurs aussi appelés « Cricetus cricetus » sont relâchés un à un dans une parcelle protégée de Griesheim-près-Molsheim, village situé à 25 km à l’ouest de Strasbourg.

Pesant entre 250 et 500 g et âgés d’un à deux ans, ces petits mammifères au ventre noir et au dos rouge sont issus d’un élevage géré par l’association Sauvegarde Faune sauvage, qui lutte pour le maintien de l’espèce.

Systématiquement éliminé par les agriculteurs qui le considéraient comme nuisible, le grand hamster a vu sa population décliner jusqu’à être reconnu comme espèce protégée en 1993.

Des opérations de réintroduction ont été mises en place, en partenariat avec des agriculteurs, comme Michael Eber, qui dirige la chèvrerie Eber à Griesheim-près-Molsheim.

Sur une parcelle de ses champs, protégée des renards et autres prédateurs par une clôture, le blé ne sera coupé qu’à la mi-octobre, lorsque le hamster entrera en hibernation. Autour des terriers, le blé dense le protège des oiseaux de proie et lui permet de s’approvisionner pour l’hiver. A proximité pousse également la luzerne, qui est également appréciée des rongeurs.

En Alsace, le grand hamster se bat pour sa survie

Pour M. Eber, c’est  » bon sens «  pour assurer la survie du grand hamster, un « espèce parapluie » – sa protection entraîne celle de plusieurs autres espèces.

Environ 250 agriculteurs sont réunis au sein d’une association, l’Afsal (Agriculteurs et Faune Sauvage d’Alsace) totalisant environ 4 000 hectares de cultures favorables au hamster européen.

En contrepartie, ces agriculteurs reçoivent une aide financière de l’État. Problème: « Les paiements sont très tardifs et nombreux sont ceux qui sont découragés par cela »regrette Michael Eber.

Nouvelles plaintes contre l’État

« Les agriculteurs attendent l’argent sur leurs comptes. Aujourd’hui, la plupart sont extrêmement déçus et se posent des questions. »témoigne le président de l’Afsal, Laurent Fischer, qui souligne que « pour certains, cela représente plus de 10 000 euros » retard de paiement.

En Alsace, le grand hamster se bat pour sa survie

Sollicité par l’AFP, le ministère de l’Agriculture assure que les agriculteurs recevront des aides financières au plus tard fin juin.

« C’est grâce au monde agricole que nous pouvons sauver le hamster européen, il faut les aider ! »soutient Jean-Paul Burget, président de Sauvegarde Faune sauvage, engagé depuis une quarantaine d’années en faveur de cet animal emblématique de l’Alsace.

« En 1979, quand j’ai fait les premiers comptages, il y en avait 4 000 dans le Haut-Rhin et des milliers dans le Bas-Rhin mais la monoculture du maïs a tout gâché », peste le militant. Son association relâche chaque année environ 400 grands hamsters dans la nature mais bon nombre sont victimes de prédateurs.

En 2022, l’Office français de la biodiversité avait recensé 960 terriers, soit presque deux fois plus que l’année précédente (488 terriers en 2021). En 2023, ce chiffre est toutefois tombé à 802 terriers sur 3 230 hectares de cultures favorables en Alsace.

On estime qu’il y a un gros hamster par terrier, l’animal étant solitaire.

Or « pour maintenir une population sauvage, il faut 1 500 individus »souligne Jean-Paul Burget, appelant l’État à « donner plus de ressources ».

Lui, qui avait fait condamner la France par la Cour de justice européenne en 2011 pour son manque d’efforts pour protéger l’animal, a de nouveau porté plainte en mai contre Paris auprès du Conseil de l’Europe.

Il dénonce la non-mise en œuvre de certaines recommandations formulées dans la Convention de Berne relatives à la conservation de la vie sauvage et de l’environnement naturel d’Europe.

Une autre plainte a été déposée auprès de la Commission européenne pour non-respect de la décision de 2011 condamnant la France pour manquement à ses obligations de protection.

« Si le grand hamster revient, le lièvre, la perdrix, la caille, le vanneau reviendront car ils ont le même habitat… On peut recréer la nature, c’est une question de volonté politique ».

William Dupuy

Independent political analyst working in this field for 14 years, I analyze political events from a different angle.
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