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En Afrique du Sud, un gouvernement de coalition historique à la tête du pays

Qu’implique la formation d’un gouvernement d’union nationale pour l’ANC ?

C’est la première fois que le parti historique de Nelson Mandela est contraint de négocier de cette manière avec d’autres forces politiques. Après avoir régné pendant 30 ans avec une confortable majorité absolue, il va devoir accepter le partage du pouvoir et faire des concessions. Sa collaboration avec l’Alliance démocratique (DA) lui permet de disposer d’une majorité confortable à l’Assemblée (246 sièges sur 400). Mais les deux partis divergent sur de nombreux sujets, notamment économiques.

Le DA est un parti libéral, qualifié de « parti blanc » par ses détracteurs, opposé aux mécanismes de discrimination positive instaurés par l’ANC, plus proche des syndicats. Ce rapprochement déplaît beaucoup au puissant syndicat Cosatu, qui a rejeté la semaine dernière la possibilité d’une telle alliance. Pour mieux faire accepter cette coalition par ses membres réticents, la direction de l’ANC a impliqué d’autres partis, à commencer par le Zulu Inkatha Freedom Party (IFP), au sein d’un gouvernement « d’unité nationale ». . Une expression qui fait directement référence au gouvernement post-apartheid de Mandela en 1994, dans lequel plusieurs partis étaient conviés.

Qu’en est-il de l’opposition suite à la formation de cette coalition ?

Pour le DA aussi, cette alliance présente des risques : le parti dénonce depuis des années la gestion de l’ANC, et notamment la corruption au sein du gouvernement. S’il se révèle incapable de l’arrêter, il risque de perdre sa crédibilité. Mais c’est aussi une opportunité unique : alors qu’il stagne depuis plusieurs élections à 20-25% des voix, il a enfin accès au gouvernement, et devrait obtenir des ministères clés.

Le chef John Steenhuisen a parlé d’un « devoir patriotique », ce qui permet notamment d’éviter une coalition de l’ANC avec l’extrême gauche. Celui-ci va désormais occuper les bancs de l’opposition. Le parti Economic Freedom Fighters (EFF) rejette toute association avec le DA, qu’il accuse de protéger les intérêts de la minorité blanche. Habitué des coups d’éclat au Parlement, son leader Julius Malema a affirmé assumer ce nouveau rôle à la tête d’une opposition « robuste et engagé. »

Quel rôle pour le parti de l’ancien président Jacob Zuma ?

La place de Mkhonto we Sizwe (MK), parti créé il y a à peine six mois et déjà troisième force politique du pays, reste à définir. Au cours des sept derniers jours, il semble avoir raté plusieurs occasions de nouer des alliances, notamment avec l’IFP. Forts de leur identité zouloue, ces deux partis auraient pu trouver un point d’entente pour gouverner la région du KwaZulu-Natal, où le MK a obtenu plus de 45% des voix.

Malgré cette nette première place, le parti a finalement été évincé vendredi par la coalition nationale ANC – DA – IFP, répliquée au niveau régional, cette fois-ci au profit de l’IFP. Occupé à contester les résultats des élections, le MK a dénoncé des fraudes dont il n’a pas été en mesure d’apporter la preuve. Vendredi, ses 58 députés ont boycotté la session parlementaire inaugurale. L’ANC a déclaré qu’elle ne fermait pas la porte au parti de Jacob Zuma, mais qu’il était très peu probable qu’il rejoigne le gouvernement d’union nationale.

William Dupuy

Independent political analyst working in this field for 14 years, I analyze political events from a different angle.
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