En Abkhazie, des manifestants envahissent le Parlement
La Russie veut-elle aller trop vite, trop loin en Abkhazie ? Cette région séparatiste pro-russe de Géorgie est secouée depuis plusieurs jours par des manifestations pour empêcher la ratification d’un accord permettant aux entreprises russes d’investir sur ce territoire, situé entre la mer Noire et les montagnes du Caucase.
Vendredi 15 novembre, des centaines de manifestants ont pris d’assaut le Parlement et un bâtiment l’administration présidentielle, à Soukhoumi, la « capitale ». Les manifestants réclamaient la démission du président de cet Etat autoproclamé, Aslan Bjania. La police a répondu en tirant des gaz lacrymogènes, une première. Au moins treize personnes ont été blessées.
Samedi, Aslan Bjania s’est dit prêt à démissionner si les manifestants acceptaient de quitter les lieux. « Ceux qui ont tenté un coup d’État doivent libérer le complexe immobilier, après quoi je suis prêt à organiser des élections, prêt à démissionner »a-t-il déclaré. Les dirigeants de l’opposition ont rejeté l’appel, affirmant qu’ils n’accepteraient que sa démission sans condition et appelant à de nouvelles manifestations. Dans un communiqué publié samedi, le Conseil de coordination de l’opposition estime que« Aslan Bjania recourt à des tentatives désespérées pour préserver son gouvernement » mais ça « son règne est terminé ». Le dirigeant est accusé de« enrichir sa famille et un cercle restreint de proches ».
Plusieurs chaînes Telegram ont rapporté qu’Aslan Bjania avait accepté de démissionner, mais plus tard dans la journée, il s’est adressé à ses partisans depuis son village natal de Tamysh, à environ 40 kilomètres de Soukhoumi, où il aurait été escorté avec l’aide d’une unité militaire russe. « Je vous demande de ne pas céder aux provocationsa-t-il déclaré. Je suis ici, en Abkhazie, et nous continuerons à travailler. »
L’accord, signé fin octobre, permettrait aux Russes d’acheter des appartements en Abkhazie, dans les nombreuses villes balnéaires de la côte de la mer Noire. Or, la vente de biens immobiliers résidentiels à des étrangers est interdite depuis 1995 dans ce territoire séparatiste. L’accord, signé par le ministre russe de l’Économie, Maxim Rechetnikov, et son homologue abkhaze, Kristina Ozgan, ne pourra entrer en vigueur que s’il est ratifié par le Parlement.
Une région pauvre, dépendante financièrement de Moscou
Selon Jelger Groeneveld, spécialiste de la politique étrangère du Caucase du Sud, les tensions révèlent la volonté de Moscou de contrôler totalement ce petit territoire peuplé de 240 000 habitants sur quelque 8 500 kilomètres carrés. « La Russie tente d’imposer l’intégration de l’Abkhazie, mais elle ne veut pas être absorbée ou reprise par Moscou, écrit-il sur le réseau social Bluesky. La société abkhaze veut suivre la voie de l’indépendance et considère Moscou uniquement comme un partenaire nécessaire pour (là) garantie vis-à-vis de la Géorgie. Elle ne veut pas devenir une colonie de la Russie. »
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