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Emmanuel Tjibaou, député kanak : « Nous ne renoncerons jamais à ce qui nous a été pris par la force »

La décision musclée du gouvernement français d’imposer un dégel du corps électoral en Kanaky-Nouvelle-Calédonie et de faire venir près de 25 000 nouveaux électeurs, principalement de métropole, a déclenché un embrasement social et politique dans l’archipel à partir du 13 mai, faisant une dizaine de morts.

Le fils de Jean-Marie Tjibaou, figure de la lutte kanak pour l’autodétermination, revient sur cette situation que l’île n’avait plus connue depuis les années 1980 et la signature des accords de Nouméa. Pour Emmanuel Tjibaou, le président français a assumé la sortie du processus de décolonisation et une stratégie répressive. Depuis 1986, « le rocher » a été réinscrit sur la liste des territoires à décoloniser par l’ONU, qui a critiqué fin août la politique coloniale d’Emmanuel Macron.

Le 7 juillet dernier, vous étiez le premier indépendantiste depuis les années 1980 à être élu député. Qu’en avez-vous pensé ?

J’ai pensé au député Pidjot (Rock Pidjot, 1907-1990, premier homme politique kanak élu au Parlement – ​​NDLR), et à mon père aussi. J’ai pensé que quarante ans après les événements de 1984, les gens se lèvent encore pour bloquer les mêmes choses : le fait de décider sans nous.

En 1984, c’était le boycott du statut Lemoine, après les discussions de Nainville-les-Roches où nous avions accepté le droit à l’autodétermination en ouvrant ce droit aux « victimes de l’histoire ». J’y ai pensé : le temps passe et on répète toujours la même chose, c’est assez tragique. Mais cela montre aussi la détermination de notre peuple à faire valoir sa dignité.

Nous voici aujourd’hui quarante ans après les « événements » qui avaient pour cause le même enjeu électoral. Vingt-six ans après les accords de Nouméa et trente-six ans après ceux de Matignon, le KNC semble être revenu à la question centrale, celle d’une décolonisation inachevée. Quel chemin souhaitez-vous tracer pour le peuple calédonien ?

Pour nous, la perspective reste de toujours conjuguer le « nous », puisque nous ne sommes jamais sortis de ce problème, malgré Nainville, malgré les accords de Matignon-Oudinot où nous avons obtenu la paix civile et le rééquilibrage. Puis 1998 avec l’accord de décolonisation de Nouméa, qui est toujours celui auquel nous participons : il est écrit que « les partenaires examinent la situation créée » suite aux référendums.

Considérez-vous que cela est toujours juridiquement valable ?

New Grb1

Gérard Truchon

An experienced journalist in internal and global political affairs, she tackles political issues from all sides
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