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Emmanuel Macron fait pâlir son camp

Emmanuel Macron fait pâlir son camp

La trêve olympique terminée, le patron reprend les choses en main. Après avoir donné près de sept semaines aux partis pour avancer sur la construction d’une majorité plus large, Emmanuel Macron va enfin accélérer. Cela tombe bien, car l’interminable feuilleton du choix du prochain occupant de Matignon commençait à exaspérer même son propre camp.

« En fait, le meilleur candidat au poste de Premier ministre, c’est Emmanuel Macron lui-même »« Un poids lourd de l’ancienne majorité s’est plaint au JDD en fin de semaine. Mais c’était avant que le chef de l’Etat n’invite les chefs de partis et les groupes parlementaires, le 23 août, à l’Élysée, pour une « une série d’échanges » Des conditions préalables à la formation d’un nouveau gouvernement. Au Nouveau Front populaire (NFP), on fait mine de croire que Lucie Castets tient la corde ; Emmanuel Macron n’a-t-il pas fait savoir qu’il était prêt à la recevoir ? Et ce, alors qu’il avait enterré cette hypothèse le 23 juillet sur France 2.

Les partisans sincères du haut fonctionnaire veulent y voir un geste du chef de l’Etat. D’autres interprètent cette invitation comme une marque de courtoisie qui n’engage à rien : « Soyons sérieux, c’est d’une personnalité rompue à l’exercice du pouvoir et aux rapports de force dont le pays a besoin, pas d’un technocrate, très sympathique d’ailleurs, qui ne s’est jamais présenté aux élections »chuchote un parlementaire socialiste. Un autre fait remarquer que la coalition de gauche est le seul parti à présenter un projet politique autour d’une personnalité. Au Château, on précise que Lucie Castets n’est pas invitée, mais tolérée : « C’est une façon de faire le ménage. Le président la recevra et constatera qu’elle n’est pas en mesure de former une majorité. »

En réalité, ces consultations seront surtout l’occasion de tester les profils évoqués ces dernières semaines auprès des différents partis politiques, de mesurer leur capacité à former une majorité et à surmonter d’éventuels blocages.

D’abord celle du président de la région Hauts-de-France, Xavier Bertrand, dont les proches mènent une intense campagne médiatique. Sur le papier, l’ancien ministre de Nicolas Sarkozy coche de nombreuses cases : farouche opposant au RN, capable de dialoguer avec les forces dites « raisonnables » de gauche et de droite, et doté d’une solide expérience politique nationale.

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Oui, mais voilà, l’ancien maire de Saint-Quentin a eu des mots durs envers le président de la République ces dernières années. Leur relation est pour le moins compliquée. Xavier Bertrand anticipe lui aussi une possible « non-nomination » et confie en privé qu’il est sans doute allé trop loin dans ses critiques pour qu’Emmanuel Macron accepte de laisser tomber. Un conseiller de l’Elysée qui a épluché le profil de l’ancien ministre a d’ailleurs repéré une ligne problématique sur son CV : « Il a pris une position ferme contre le mariage pour tous… Ce sparadrap a failli tuer Catherine Vautrin. »

Autre profil que le chef de l’État veut tester : celui de Bernard Cazeneuve. L’ancien Premier ministre de François Hollande a l’avantage de ne pas être irritant pour la droite, mais a le handicap d’appartenir au vieux monde, « celui des gouvernements soutenus par une nette majorité à l’Assemblée »souligne un stratège de l’exécutif. Serait-il capable de manœuvrer un Parlement aussi compliqué ? Le même n’y croit guère : « Il a quitté le gouvernement il y a sept ans, une éternité en politique, surtout après le passage à l’ère Macron. » L’entourage de Bernard Cazeneuve désamorce la situation : le dernier contact avec le chef de l’Etat remonte à un dîner en mars.

Contrairement à Xavier Bertrand, l’ancien maire de Cherbourg ne laisse rien échapper de ses intentions pour Matignon, ne parle pas, ne fait pas de confidences. Le veut-il ? Si oui, il fait tout pour démontrer le contraire. Le 21 juillet, lors d’une réunion vidéo de son mouvement, la Convention, il a très clairement affirmé son intention de peser dans le débat public à la rentrée et de reprendre sa tournée des villes françaises. Comme si la seule échéance qu’il envisageait était l’élection présidentielle de 2027, en sautant l’étape de Matignon.

En quête du mouton à cinq pattes, Emmanuel Macron étudie, selon nos informations, des profils extérieurs à la politique. Bertrand, Cazeneuve ou encore un Franck Louvrier seraient vus comme des concurrents crédibles dans la course à l’Élysée à leur arrivée à Matignon. D’où l’intérêt de recruter un profil issu de la société civile ou un grand patron, respecté, à la fois défenseur du dialogue social et Macron-compatible. Un homme répond à ces critères : Jean-Dominique Senard, président du conseil d’administration de Renault et ancien patron de Michelin. En janvier, Emmanuel Macron avait déjà failli le nommer à Bercy pour se débarrasser de Bruno Le Maire. Son nom résonne à nouveau dans les couloirs du pouvoir ces dernières semaines. Fils de diplomate et diplômé d’HEC, l’homme a de nombreuses qualités… Un conseiller du président confirme qu’il s’agit d’une hypothèse crédible. Une option qui reviendrait à sanctionner une classe politique qui, du point de vue du chef de l’État, ne s’était pas montrée à la hauteur.

Quoi qu’il arrive, le nom du futur Premier ministre sera dévoilé dans un communiqué à l’issue de cette consultation. L’Élysée n’exclut pas une déclaration médiatique d’Emmanuel Macron pour expliquer son choix, le calendrier et le cadre général. Déjà compliquée en période de majorité relative, la formation du gouvernement prendra « plusieurs semaines », indique le Palais.

« En vérité, personne ne sait ce que va faire Emmanuel Macron. Le sait-il lui-même ? »

Mais c’est le scénario des jours qui suivent la nomination du nouveau Premier ministre qui suscite l’incrédulité tant il se chuchote de ministère en ministère. Soucieux de ne pas laisser le pays sans gouvernement dans cette période de latence entre la nomination du nouveau Premier ministre et la constitution de son équipe, Emmanuel Macron envisage – à ce moment-là – de convoquer un conseil des ministres le 26 août, réunissant les ministres démissionnaires autour du nouveau chef du gouvernement. Une situation inédite, voire carrément bizarre, qui fait bondir Bruno Le Maire. Le locataire de Bercy serait « au bord de la crise de nerfs », témoigne l’un de ses amis. « J’ai accepté d’être ministre dans un gouvernement nommé autour de Gabriel Attal, je n’ai pas l’intention d’être pris en otage au sein d’une équipe démissionnaire à laquelle on impose un nouveau Premier ministre ! » il tonne en privé. « Un groupe de ministres va perdre la tête ! » prédit une source de haut rang.

Voilà comment est Emmanuel Macron : déroutant, imprévisible, exaspérant. « À la véritéconfie un ancien ami du président qui le connaissait depuis longtemps, Personne ne sait ce que va faire Emmanuel Macron. Le sait-il lui-même ? La première certitude est que son choix sera guidé par son confort personnel. Sa tranquillité d’esprit pèse à 90 % dans sa prise de décision. Deuxième certitude : avec lui, c’est toujours le scénario le plus « what the fuck » qui finit par se produire.

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