L’ancien Premier ministre multiplie les signes d’indépendance vis-à-vis du chef de l’Etat, en faisant pression sur lui sur le dossier calédonien et en critiquant sa proposition de débat avec Marine Le Pen.
La campagne électorale pour les élections européennes n’atténue pas la soif de liberté d’Édouard Philippe. D’une réunion publique à Bayonne la semaine dernière, à une LCI fixée dimanche soir, l’ancien premier ministre multiplie les signes d’indépendance vis-à-vis d’Emmanuel Macron. Ce n’est pas la première fois que le président d’Horizons tente un tel exercice. Mais à l’heure où la majorité commence à serrer les rangs pour affronter la Bérézina attendue lors des élections du 9 juin, son positionnement est d’autant plus remarqué. Surtout lorsqu’on évoque la stratégie à adopter face au Rassemblement national, favori du scrutin. Quand les dirigeants de la majorité s’inquiètent en coulisses de l’implication contre-productive d’Emmanuel Macron, Édouard Philippe s’exprime publiquement : « Que le Premier ministre, qui est le leader de la majorité, discute avec le chef d’un parti politique, cela ne me paraît pas scandaleux et tout à fait normal. Que le chef de l’Etat explique qu’il compte débattre” avec Marine Le Pen, « Une personnalité qui n’est pas chef de parti est plus surprenante. Je ne sais pas si c’est nécessaire. » « Spontanément »Édouard Philippe n’est pas « Je ne suis pas sûr que ce soit une bonne idée » que l’Élysée propose au double finaliste de l’élection présidentielle un tel débat « mais c’est l’idée du président, pourquoi pas ».
Plus tôt, c’est en évoquant la gestion de crise en Nouvelle-Calédonie que l’ancien premier ministre semblait douter d’Emmanuel Macron. « J’espère que les annonces du président seront à la hauteur de la situation », a-t-il lancé devant des militants, peu habitués à ce que les dirigeants de la majorité osent remettre publiquement en question l’efficacité du chef de l’Etat. La distance prise par l’ancien chef du gouvernement dans ses propos n’est évidemment pas passée inaperçue à l’Élysée, même si l’on n’est guère surpris par la relation douce-amère qui prévaut entre Emmanuel Macron et le maire du Havre. Dimanche, Édouard Philippe n’a pas été spécifiquement interrogé sur la proposition d’organiser un référendum national avancée par le chef de l’Etat pour répondre au blocage institutionnel et politique à Nouméa, mais « le rapport de force ne permettra jamais un retour à l’ordre public », insiste-t-il cependant. Lorsqu’il était à Matignon, Édouard Philippe s’est beaucoup investi sur ce dossier au point que son nom est évoqué ces derniers jours pour mener une mission de concertation sur place. L’Élysée n’a jamais donné suite, préférant s’appuyer sur un trio de hauts fonctionnaires. « Le désordre s’est installé sur l’île »persiste à remarquer Édouard Philippe de son côté, malgré le déplacement présidentiel éclair dans le Pacifique.
Le maire du Havre, qui aime répéter qu’il est « loyal et gratuit » s’agissant d’Emmanuel Macron, il prépare en effet surtout l’ère post-européenne. « Je discute avec des élus LR, beaucoup d’élus LR qui sont extrêmement ouverts à la discussion », constate-t-il, alors que ses proches parient que des députés de droite rejoindront le groupe Horizons à l’Assemblée nationale dans les prochaines semaines. Au risque de modifier les équilibres internes de la majorité et de signaler le début de la course vers 2027. « Je suis quelqu’un qui aime son pays et qui sait qu’il y aura une élection présidentielle en 2027. Je pense que la campagne n’a pas commencé mais le pire face aux choses difficiles est de ne pas se préparer., souligne désormais Édouard Philippe. Comme pour signifier qu’il ne ratera pas le train lorsqu’il s’agira de tourner la page du macronisme.