Le député, qui a rompu avec La France Insoumise au moment des législatives, critique « une gauche qui a baissé les bras » et choisi d' »abandonner » une partie de la population. Il critique vivement la stratégie mise en oeuvre par Jean-Luc Mélenchon.
Publié
Mis à jour
Temps de lecture : 3 min
François Ruffin dresse un réquisitoire contre la stratégie de Jean-Luc Mélenchon. Le député de la Somme a rompu avec le chef des Insoumis lors des deux tours des législatives. Et il va bien plus loin dans un nouveau livre, Itinéraire. Ma France dans son intégralité, pas à moitiéet dans une interview avec Nouvelles observations, Mercredi 11 septembre. L’accusation est lourde, et grave. François Ruffin fustige la dérive communautariste de Jean-Luc Mélenchon. Il lui reproche de se focaliser exclusivement sur le vote des minorités et des banlieues, et de tirer un trait sur celui des classes populaires de la France rurale et périurbaine qu’il abandonne au Rassemblement national. Bref, le chef des Insoumis « racialiser » politique, une évolution encore plus spectaculaire depuis les massacres du 7 octobre en Israël. Et elle agit ainsi comme un miroir à l’extrême droite, qui se focalise sur l’autre France.
Pour Jean-Luc Mélenchon, tenter de reconquérir le vote populaire dans les campagnes et les petites et moyennes villes est une perte de temps. Selon François Ruffin, il « essentialiser » des territoires entiers, les Hauts-de-France ou le Sud, qu’il considère comme perdus à jamais pour la gauche. « Il a fallu un demi-siècle pour dénazifier l’Allemagne… »Jean-Luc Mélenchon lui aurait murmuré des choses. L’élu de la Somme prête même aux Insoumis des propos méprisants à l’égard des électeurs d’Hénin-Beaumont, le fief de Marine Le Pen dans le Pas-de-Calais, où Mélenchon avait été battu en 2012. « Des gens qui transpiraient de l’alcool depuis le matin », « « ça sentait mauvais », « presque tous obèses »… Du coup, François Ruffin avoue sa honte d’avoir mené une campagne à connotation raciale dans sa circonscription, c’est-à-dire d’avoir distribué des tracts avec la photo de Jean-Luc Mélenchon aux électeurs noirs et arabes des cités d’Amiens-Nord, dont il est le porte-parole. « clé principale »mais pas pour les électeurs blancs parce qu’il les rebute.
Il ne s’agit pas d’un simple règlement de comptes. François Ruffin ose briser le tabou qui pèse sur la gauche. Une dérive communautariste née en marge du PS. Elle a été théorisée en 2011 par la fondation Terra Nova dans une note restée célèbre. Elle incitait la gauche à remplacer les ouvriers, séduits par le vote Le Pen, par une nouvelle majorité composée de minorités, de diplômés, de femmes et d’urbains. Treize ans plus tard, les Insoumis se contentent de courtiser le vote des « bobos » diplômés des métropoles et celui de ceux qu’ils appellent les « racisés » des banlieues. Un calcul qui condamne sans doute la gauche à rester encore longtemps dans l’opposition. Et risque de laisser le champ libre à Marine Le Pen.