L’enfer des barreaux est loin derrière. La froideur de l’acier, le bruit des clés et les cris incessants ont laissé place à la chaleur des champs, aux signes de vie des animaux et à la vie en communauté. Initiative inédite en France, la ferme Emmaüs Baudonne, près de Bayonne, permet aux détenus de se réinsérer dans la société. Chaque détenu sélectionné y passe entre six mois et deux ans, jusqu’à la fin de sa peine. Ils doivent travailler vingt-six heures par semaine (payés au SMIC), en soutenant les habitants du coin. Évelyne, condamnée à douze ans de prison – mais qui n’en a purgé que six pour « bonne conduite » – s’est ainsi reconvertie dans le maraîchage. « Je vais faire ce qu’il faut pour avancer », annonce l’ex-détenue, consciente de l’opportunité qui lui est offerte. Annie, qui a six ans de peine à purger, s’occupe de préparer les repas des occupants de la ferme. Contrairement au système de justice punitive en vigueur, la ferme offre l’espoir d’une nouvelle voie. « C’est ça l’anti-prison », résume fièrement Gabi Mouesca, ancienne détenue basque et fondatrice du lieu. « Même si j’en suis la directrice, je suis l’une d’entre elles. J’ai passé dix-sept ans derrière les barreaux. » Tous ceux qui passent devant la ferme savent que la prison achève aussi les sans-voix en quête de reconnaissance, les pauvres en quête de stabilité, les victimes en quête de justice. Les femmes, en particulier, en sont les premières victimes. Annie peut le confirmer, elle qui « aurait pu mourir sous les coups » du père de ses enfants. « Il m’a mis dans une camisole de force toute ma vie. J’avais peur de lui. » C’est pourtant elle qui finit en prison, pour « vol avec escroquerie ». De quoi rappeler l’existence d’un « féminisme anti-prison », porté par exemple par les travaux de la professeure de droit pénal Gwenola Ricordeau, qui peine à se faire entendre.
INFRAROUGE : PRISONNIERS EN PLEIN AIR DOCUMENTAIRE / FRANCE 2 / MERCREDI 18 SEPTEMBRE / 22H55
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