« Dites la vérité, y compris les côtés les moins glamour », assurent les réalisateurs
Étonnant dans le rôle du chanteur qui aurait eu 100 ans cette année, Tahar Rahim incarne l’inoubliable interprète de « La bohème ». Très attendu, ce biopic a pour objectif de raconter l’histoire vraie de l’icône de la chanson française. Comme le confient les deux réalisateurs dans notre entretien, leurs proches « soutenu et encouragé à dire la vérité, y compris les côtés les plus sombres« .
Un chanteur qui signe un biopic sur l’un de ses pairs… Avez-vous fait un parallèle entre votre vie et celle de Charles Aznavour, qui, absorbé par sa vie professionnelle, ne prend pas le temps de vivre la suite ?
Grand Corps Malade : Si j’ai écrit la chanson On a pris le temps, c’est justement parce que, comme lui, je ne prends pas assez de temps pour moi. C’était le sujet. Mais même si je suis chanteur, il m’est impossible de me comparer à Charles Aznavour. Personne n’ose le faire. Cependant, il est vrai que mon expérience m’a servi dans ce projet. Je sais ce que ça fait de monter sur scène, d’être sous le feu des projecteurs, d’écrire une chanson…
Bien évidemment, ces expériences m’ont permis de retranscrire certaines émotions et m’ont donné un petit coup d’avance pour avancer dans la bonne direction.
Vous avez côtoyé Charles Aznavour et avez même fait un duo avec lui. Est-ce que cela a aussi influencé ?
GCM : En effet. J’ai eu la chance de passer beaucoup de temps avec lui, notamment des moments conviviaux, des repas… Sur Tu sont soi j’apprends, il m’a demandé d’écrire son rôle en alexandrin pour qu’il puisse le mettre en musique. J’ai donc eu l’occasion de discuter d’écriture avec lui, ce qui m’a beaucoup inspiré. Connaissant l’homme d’Idir, nous nous sommes lancés en toute confiance dans ce projet. Mais faire ce film n’a pas changé notre lien avec lui. Même après trois ans de travail, on ne se lasse toujours pas d’écouter Aznavour. Son aura reste intacte.
Pensez-vous que les fans d’Aznavour découvriront de nouvelles choses à travers ce film ?
Mehdi Idir : Sans aucun doute. Nous avons eu accès à des aspects très privés de sa vie, notamment à travers sa famille et ses collaborateurs, ainsi qu’à ses archives personnelles. Il adorait filmer ses tournées et même son quotidien. Cela permet de découvrir un Aznavour plus intimiste.
GCM : Nous avons eu une totale liberté dans la création de ce film. Nos proches nous ont soutenus et encouragés à dire la vérité, y compris sur les côtés les moins roses. Comme tout homme, Aznavour n’était pas parfait et personne ne voulait que le film donne une image angélique. On montre donc ses côtés sombres, son égoïsme parfois, liés à sa détermination à réussir.
Vous évoquez des sujets sensibles comme la mort de son fils. Comment avez-vous abordé ce passage ?
GCM : C’était compliqué, car même la famille préfère ne pas trop en parler… Charles lui-même n’aimait pas aborder certains aspects. Il existe une part de mystère autour des causes de la mort de son fils, et nous l’avons respecté. On ne sait pas avec certitude s’il s’agit d’un suicide, d’une overdose ou d’un accident médicamenteux. C’est un sujet douloureux et nous avons choisi de laisser subsister cette zone grise.
Quand le succès lui vient, on voit un Aznavour « bling-bling »…
GCM : Il a eu une période où il a pleinement assumé sa réussite. Il venait de loin, il avait lutté pendant des années et quand il a commencé à avoir du succès, il l’a montré. On voit dans des images d’archives des manteaux improbables, des voitures luxueuses… Il s’apaise ensuite avec le temps et sa rencontre avec sa dernière épouse, Ulla Thorsell.
Étonnamment, l’Arménie est finalement peu présente dans le film. Pourquoi ce choix ?
MI : Aznavour ne s’est rapproché de l’Arménie que tard dans sa vie, après le tremblement de terre de 1988. Il avait déjà visité le pays pour la première fois, mais l’accueil n’a pas été à la hauteur de ses attentes. attentes. Il a véritablement commencé à s’y intéresser à la fin des années 80. Nous avons donc choisi de nous concentrer sur les périodes antérieures de sa vie, qui étaient alors plus significatives pour lui.