DIÊN BIÊN PHU : Journal de marche du 6 avril 1954
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DIÊN BIÊN PHU : Journal de marche du 6 avril 1954

Situation inchangée. Aucune évacuation sanitaire n’a eu lieu.

Largages de renforts en cours.

Bilan de l’attaque d’HUGUETTE 6 :

  • Défaites amicales : 23 tués dont un officier, 112 blessés dont 3 officiers et 86 disparus.
  • Pertes rebelles : 800 tués dénombrés (nombreuses pertes), plus un certain nombre hors position dans les tranchées d’approche.

240 parachutistes ont été largués par les Dakota. L’opération a dû être interrompue à 00h30 en raison d’un orage dans le bassin. Un bâton d’une vingtaine de déportés tombe parmi l’ennemi. 12 Dakota sur 14 ont pu lâcher leur personnel.


Ces missions « Banjo » seront parmi les plus délicates et les plus dangereuses. Les parachutistes devaient être largués à 400 mètres sur une DZ courte, en deux passages, voire trois. L’obligation de toujours passer au même endroit, en ligne droite, à la vitesse d’un parachute, nous faisait tirer dessus comme des pigeons.

Les parachutistes n’ont pas eu le temps d’apprendre à sauter (les avions ont été emmenés pour des missions opérationnelles). Certains avaient fait un ou deux sauts, les autres aucun : ils étaient jetés dans la fournaise de Diên-Biên-Phù, la nuit, sans entraînement. Certains voulaient absolument se battre, d’autres ont paniqué au dernier moment. Ils ont dû décrocher leur SOA (sangle à ouverture automatique), ce qui a retardé les autres. Il arrivait même parfois que l’un d’entre eux, pour être sûr de ne pas être bousculé de force par les répartiteurs, s’ouvrait le ventre dans l’avion. Bonjour dommage !

Au total les quatre groupes « Franche-Comté », « Anjou », « Béarn » et Sénégal » effectueront 164 missions Banjo et largueront 3 024 parachutistes.

Dans la pénombre, les Dakota font la queue sur le parking où règne l’effervescence qui précède les missions Banjo. Les bâtons de parachutistes qui sauteront dans quelques heures, de nuit, dans la fournaise de Diên Bien Phu, sont en préparation.

L’équipage du « Franche-Comté » du C-47 n° 545 F-RAYA, le pilote LAMARQUE, la NCA, un certain capitaine…, euxécano VLASSOF et radio RUBEL, observent les parachutistes, alignés, dont nous vérifions le matériel avant l’embarquement.

Combien d’entre eux reviendront de Dien Bien Phu ? Il y aura ceux qui ne recevront pas bien à leur arrivée sur le terrain et qui connaîtront immédiatement l’infirmerie, ceux qui combattront et qui finiront soit morts, soit blessés, soit évadés mais prisonniers dans des conditions telles que peu s’échapperont. En fait, je crois que je ne me posais pas trop de questions à l’époque où j’avais 21 ans. La mission était là et il fallait l’exécuter.

Les parachutistes embarquent, démarrent, roulent, décollent et se dirigent vers Diên Bien Phu. Routine

Comme pour toutes les missions nocturnes, les cache-flash et la discrétion sont essentiels. Même les vers luisants sont interdits à bord !

A l’approche de la DZ, les parachutistes attachent leur SOA et le répartiteur, pour les vérifier, allume sa lampe électrique, ne laissant filtrer qu’un mince rayon de lumière entre ses doigts. Immédiatement notre NCA lui crie : pas de lumière !

Alignement pour le premier passage. Top chute…et au lieu de‘appuyez sur la cloche de libération, notre bonne NCA… allume les pharesatterrissage!!!

C’est immédiatement un festival de traceurs qui convergent vers nous. Lamarque, furieux, donne un coup de coude au bras du navigateur, éteint les phares en tournant et « s’esquive ». Les deux passages pour faire exploser les parachutistes se feront sans l’aide du navigateur. Avec tout ça nous n’avons pris que deux impacts. Mais quelle chaleur !


HUGUETTE 5 attaque ; les rebelles se sont arrêtés.

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