Si les géants du luxe justifient en partie leurs prix en mettant en avant un savoir-faire d’exception, la réalité semble parfois bien éloignée de cette image d’excellence. L’autorité italienne de la concurrence a ouvert une enquête visant le groupe de luxe Giorgio Armani et Dior Italia, soupçonnés d’avoir fait preuve de laxisme sur les conditions de travail de leurs sous-traitants.
Des perquisitions ont été menées mardi avec le soutien de l’unité spéciale antitrust et de la garde financière italienne, au siège de Giorgio Armani et Dior Italia, a indiqué l’autorité de la concurrence (AGCM).
« Les entreprises ont misé sur la qualité et l’artisanat. Or, pour produire certains articles et accessoires, elles sont soupçonnées d’utiliser des ateliers et des usines employant des ouvriers mal payés », a-t-elle expliqué.
« De plus, ces employés travaillaient plus d’heures que le maximum légal autorisé et dans des conditions de santé et de sécurité inadéquates, contraires aux niveaux d’excellence de fabrication dont les entreprises se targuent », a déclaré la même source.
L’autorité italienne de la concurrence enquête également sur d’éventuelles violations du droit de la consommation liées à la manière dont certaines sociétés du groupe Armani et du groupe Dior promeuvent et vendent.
« Dans les deux cas, les entreprises pourraient avoir divulgué de fausses déclarations en matière de responsabilité sociale et éthique, notamment concernant les conditions de travail et le respect de la législation par leurs fournisseurs », ajoute l’autorité de la concurrence.
Les sous-traitants du groupe Armani ont passé des commandes auprès d’ateliers chinois
Le groupe Armani a assuré dans un communiqué que « les entreprises concernées s’engagent pleinement à coopérer avec les autorités », estimant que « les allégations sont infondées » et que « l’enquête aboutira à un résultat positif ». Interrogée, la société Christian Dior n’a pas fait de commentaire dans l’immédiat.
Une entreprise du groupe de luxe Armani a été placée partiellement sous administration judiciaire par le tribunal de Milan en avril dernier pour avoir eu recours à des sous-traitants, violant ainsi le droit du travail.
La société en question est Giorgio Armani Operations spa, contrôlée et supervisée par Giorgio Armani spa, et qui est responsable des collections et accessoires du prestigieux groupe italien, a précisé le tribunal dans sa décision.
Selon le tribunal, l’entreprise aurait eu recours à un fournisseur, Manifatture Lombarde srl, qui elle-même faisait appel à des sous-traitants qui passaient des commandes auprès d’ateliers chinois opérant dans la province de Milan et employant des immigrés sans papiers, pour la production de sacs, d’articles de maroquinerie et d’accessoires Armani.
Christian Dior Italia également concerné
En juin, un tribunal de Milan a ordonné la mise en redressement judiciaire d’une autre grande entreprise de mode pour des raisons similaires. Selon les médias, il s’agit de Manufactures Dior Srl, une filiale de Christian Dior Italia, la branche italienne du groupe de luxe appartenant au géant français LVMH. L’entreprise a sous-traité la production d’une partie de sa collection 2024 de sacs et d’accessoires à des sociétés tierces, selon un communiqué de la police. Une enquête a permis d’identifier des fournisseurs décrits comme « des entreprises chinoises, qui ont réussi à réduire leurs coûts en employant des travailleurs irréguliers et illégaux dans des conditions d’exploitation ». Quatre de ces entreprises ont été inspectées, « toutes irrégulières », selon la police.
Ils employaient 32 personnes, dont sept n’avaient pas les papiers requis et deux étaient en situation irrégulière en Italie. Les travailleurs étaient mal payés pour de longues heures de travail et logés dans des dortoirs construits illégalement et insalubres, selon la même source.
Le scandale intervient alors que LVMH, le groupe de Bernard Arnault qui possède la marque Dior, est sous le feu des projecteurs en tant que partenaire premium des Jeux olympiques de Paris qui débutent dans un peu plus d’une semaine.