Ils ont volé avec Boeing mais risquent d’atterrir avec SpaceX. Lorsque Butch Wilmore et Suni Williams ont décollé à bord du vaisseau Starliner conçu par Boeing à destination de la Station spatiale internationale le 5 juin, ils ne devaient rester dans l’espace qu’une dizaine de jours. Cela fait maintenant 52 jours qu’ils flottent à 400 kilomètres du sol avec les sept autres habitants de l’ISS et pourraient y rester jusqu’en 2025. Divers problèmes techniques identifiés sur le Starliner font que ce vaisseau ne peut être utilisé sans risque pour revenir sur Terre, contrairement à ce qui était prévu. Selon le Wall Street Journal, des responsables de la Nasa ont discuté mercredi 7 août d’un plan B pour rapatrier les deux astronautes : utiliser le vaisseau du concurrent direct de Boeing, SpaceX.
Le vaisseau spatial de Boeing avait déjà rencontré plusieurs problèmes lors de sa première mission. Son décollage avait été reporté à deux reprises en raison de fuites d’hélium – le gaz qui permet à la capsule de manœuvrer en apesanteur dans l’espace – qui avaient été réparées avant le vol. C’est lors de l’arrivée de la capsule à l’ISS, le 6 juin, que cinq des 28 propulseurs à réaction ont surchauffé, obligeant les astronautes à s’arrimer manuellement à la station orbitale. Depuis, Butch Wilmore, 61 ans, et Suni Williams, 58 ans, tentent de comprendre ce qui a pu provoquer une telle surchauffe, qui ne peut se faire que dans la station et retarde le retour des deux astronautes. Les moteurs appartiennent à un module qui se détachera de Starliner et brûlera en entrant dans l’atmosphère terrestre.
SpaceX à la rescousse
Le 10 juillet, la NASA a donné à Boeing et à ses astronautes le temps de tester et de réparer Starliner. Le 6 août, l’agence spatiale américaine a même annoncé que le neuvième vol de SpaceX vers l’ISS, le vol de Équipage-9, à bord de la capsule Dragon, serait reportée du 18 août au 24 septembre pour « finaliser la planification du retour des essais en vol de l’équipage de Boeing. » Mais les résultats ne sont pas rassurants pour la NASA. Si la capsule peut se désarrimer de l’ISS sans problème, le comportement des propulseurs lors du trajet retour inquiète toujours l’agence. C’est pourquoi elle a néanmoins prévu un « plan B » pour ramener Wilmore et Williams sur Terre. « Nous ne sommes pas obligés de ramener un équipage à bord du Starliner, a expliqué Ken Bowersox, administrateur associé de la Direction des missions spatiales de la NASA. « On pourrait les ramener dans un autre véhicule. »
Un autre véhicule qui pourrait être le concurrent direct de Boeing : la société d’Elon Musk, SpaceX. Concrètement, il s’agirait d’utiliser la rotation déjà prévue pour la mi-septembre avec le Équipage-9Deux des quatre astronautes censés partir avec la capsule Dragon resteraient sur Terre afin de pouvoir ramener Wilmore et Williams à la fin de cette rotation qui est prévue pour février 2025. Outre l’attente du couple de naufragés de l’espace, une telle manœuvre nécessiterait que la capsule de Boeing reparte vide. Problème, selon le site Ars Technica, Le logiciel de Starliner permet uniquement de désamarrer la capsule de l’intérieur. À moins que le logiciel ne soit modifié, il est impossible de désamarrer la capsule de l’ISS sans personne à bord.
Un clou dans le cercueil spatial
« Nous n’avons pas approuvé ce plan », « Nous avons déjà une décision à prendre à la mi-août, mais la simple évocation du projet SpaceX sonne déjà comme une humiliation pour Boeing. Le constructeur est en concurrence directe avec la firme d’Elon Musk depuis que la NASA a sélectionné les deux entreprises pour remplacer ses navettes vers l’ISS », a prévenu Steve Stich, responsable des vols commerciaux à la Nasa.
SpaceX avait pris la tête de la course en envoyant sa navette en 2020 Dragon vers la station orbitale alors que Boeing subissait des échecs. Bien que partenaire historique de l’agence spatiale américaine, une nouvelle déception pourrait menacer cette collaboration qui remonte à 1933. Toujours selon le site Ars Technicaen cas de nouvel échec, Boeing pourrait vouloir mettre fin au programme Starliner qui lui a déjà coûté 1,6 milliard de dollars depuis 2016.
Pour l’heure, la décision reste entre les mains de la NASA. En attendant, Butch Wilmore et Suni Williams continuent de participer à des expériences au sein de la station orbitale tels des astronautes en mission. Côté nourriture et ravitaillement, l’ISS dispose d’une grande quantité de rations. Les deux naufragés de l’espace pourront donc continuer à admirer la Terre et à profiter de l’apesanteur de l’espace.