Désormais, pour protéger votre enfant, vous pouvez vacciner la mère ou immuniser le bébé. Que choisir ?
L’automne approche à grands pas, et comme chaque année à la même période, il devrait entraîner dans son sillage l’épidémie saisonnière de bronchiolite, cette affection respiratoire qui peut être très virulente chez les tout-petits. Si depuis l’année dernière, il est désormais possible de protéger les nourrissons avec Beyfortus, une nouvelle option vient compléter l’arsenal de lutte contre la bronchiolite.
Depuis quelques jours, un nouveau vaccin est disponible : l’Abrysvo. Sa particularité par rapport au Beyfortus : il n’est pas administré au bébé mais à la maman pendant sa grossesse. Pourquoi deux stratégies pour lutter contre la bronchiolite ? Comment fonctionnent-elles ensemble ? L’une est-elle meilleure que l’autre ? 20 minutes vous explique.
Vaccin ou anticorps, « un arsenal décisif »
Source majeure d’inquiétude pour les parents de nouveau-nés, l’épidémie annuelle de bronchiolite touche « 30 % des nourrissons de moins de 2 ans chaque hiver », rappelle Santé publique France. Le plus souvent, elle est provoquée par le « virus respiratoire syncytial (VRS), responsable d’infections respiratoires chez les nouveau-nés et les nourrissons pouvant évoluer en bronchiolite, précise la Haute Autorité de santé (HAS). Celle-ci se caractérise par un épisode de gêne respiratoire dont les signes sont une toux et une respiration rapide et sifflante. Et si elle est fréquente et le plus souvent bénigne, la bronchiolite peut, dans certains cas, entraîner des complications sévères et conduire à une hospitalisation ». Or, « les tout-petits sont les plus à risque de développer des formes graves, au point d’avoir besoin d’oxygène et d’être hospitalisés, voire admis en réanimation », insiste le Dr Brigitte Virey, pédiatre et présidente du Syndicat national des pédiatres français (SNPF).
« C’est très éprouvant pour les nourrissons qui ont des difficultés respiratoires et peuvent avoir des difficultés à s’alimenter, très dur pour les parents qui sont inquiets et se sentent démunis, et très compliqué à gérer en termes de pression hospitalière, et même en médecine de ville, poursuit le pédiatre. Mais c’était avant 2023 et l’arrivée du Beyfortus (nirsévimab), développé par les laboratoires Sanofi et AstraZeneca, un anticorps monoclonal qui immunise les tout-petits contre le VRS. Et depuis le 2 septembre dans les pharmacies et à partir du 15 septembre dans les maternités, un vaccin, Abrysvo, développé par Pfizer, complète cet arsenal pour lutter contre la bronchiolite. Un vaccin destiné aux femmes enceintes, permettant à leur bébé de naître immunisé contre la bronchiolite. Deux traitements préventifs remboursés par la Sécurité sociale.
« C’est le choix des parents »
Mais l’un de ces traitements est-il meilleur que l’autre ? « C’est extrêmement simple : ce qui protège le nourrisson de la bronchiolite, ce sont les anticorps contre le VRS, principal agent responsable de la bronchiolite, rappelle le Pr Robert Cohen, infectiologue pédiatrique au CHI de Créteil, qui a participé au développement de Beyfortus et d’Abrysvo, et coordinateur d’Infovac, une plateforme d’information sur les vaccinations. Tous deux reposent sur le même principe de traitement : les anticorps contre le VRS, et sont très bien tolérés. Il s’agit soit d’anticorps monoclonaux administrés à l’enfant, soit d’anticorps neutralisants produits par la mère pendant la grossesse, via la vaccination, et transmis via le placenta à son futur enfant. Dans les deux cas, cela va immuniser le bébé pendant une période d’environ 6 mois. »
Alors que choisir ? « C’est vraiment le choix des parents, répond le professeur Cohen. Les médecins sont là pour informer les parents de leurs options. Si la vaccination maternelle est faite à temps, le niveau de protection est très similaire voire identique. C’est aux mères de décider si elles préfèrent se faire vacciner pendant la grossesse, comme c’est déjà le cas pour la coqueluche, ou si elles préfèrent que leur bébé soit immunisé après la naissance. Nous, médecins, n’avons pas d’arguments majeurs en faveur de l’un ou de l’autre, assure-t-il. Pour le vaccin destiné aux mères, il faut simplement anticiper un peu, puisqu’il doit être administré entre la 32e et la 36e semaine d’aménorrhée, et les femmes accouchent en moyenne entre la 38e et la 40e semaine. Alors qu’avec le nirsevimab, tant que l’épidémie n’a pas commencé, on peut immuniser le bébé. »
L’hiver dernier, « les parents ont été touchés par la très forte épidémie de bronchiolite de l’année précédente et ont voté pour Beyfortus, victime de son succès faute de doses suffisantes », souligne le Dr Virey. Environ 250 000 doses ont été administrées. Cette année, davantage de pédagogie sera nécessaire, notamment concernant la vaccination maternelle, alors qu’une part des femmes enceintes reste réticente à se faire vacciner pendant la grossesse. » Pour faire son choix, la HAS liste les avantages et les inconvénients de chaque méthode. Elle rappelle ainsi qu’Abrysvo « permet aux parents de choisir une stratégie qui ne nécessite pas d’injection pour leur nouveau-né » et que « le nouveau-né est protégé dès la naissance par des anticorps neutralisants maternels transférés par voie transplacentaire ». Quant à Beyfortus, son avantage est son « efficacité et sa sécurité, qui ont été confirmées en vie réelle dans plusieurs pays en 2023-2024 », y compris « chez les nouveau-nés prématurés ». Côté négatif pour Abrysvo, « l’efficacité protectrice peut être réduite si trop peu d’anticorps sont produits ou transmis au nouveau-né (naissance prématurée ou moins de 14 jours après la vaccination) ». Et « l’efficacité vaccinale, maximale à la naissance, décline régulièrement au cours du temps et est plus faible 6 mois plus tard ». Beyfortus, en revanche, « nécessite une injection chez le nourrisson, à réaliser le plus tôt possible après la naissance, de préférence avant « quitter la maternité en phase pré-épidémique ou épidémique ».
« Protéger le plus grand nombre d’enfants possible »
Il appartient aux parents de faire leur choix, mais ce qui est sûr, c’est qu’en un peu plus d’un an, une révolution a eu lieu dans la prévention de la bronchiolite. « C’est une très bonne nouvelle, se réjouissent le Dr Virey et le Pr Cohen. Cette année, pour la première fois, nous avons deux systèmes de prévention contre la bronchiolite. C’est crucial, surtout quand on sait à quel point la bronchiolite déséquilibre complètement les services d’urgences pédiatriques et les hospitalisations pendant l’hiver. »
« Les deux dispositifs forment un arsenal complémentaire pour protéger le plus grand nombre d’enfants possible : les parents pourront opter pour l’un ou l’autre des traitements, notamment en fonction de la date de naissance du bébé et du début estimé de l’épidémie, souligne le Dr Virey. Cela nous permet d’avoir la couverture vaccinale la plus élevée possible chez les très jeunes enfants, qui sont les plus à risque de formes graves. » En pratique, « avec une immunité d’environ 6 mois conférée par l’un ou l’autre des deux traitements, on peut espérer une réduction de 70 à 80 % du risque de bronchiolite chez l’enfant, ce qui est déjà énorme. Et avec la crise actuelle aux urgences, c’est crucial », insiste le Pr Cohen. L’an dernier déjà, malgré un nombre limité de doses, Beyfortus nous avait sauvé la mise : il n’y avait pas de services de réanimation remplis de cas de bronchiolite, et le nombre d’hospitalisations a nettement diminué. Cette année, grâce à un nombre suffisant pour ces deux traitements, on espère avoir une épidémie assez plate. » Pour rappel, « la saison 2022-2023 des bronchiolites a été marquée par une très forte intensité, notamment en termes de passages aux urgences (73 262) et d’hospitalisations (26 104) d’enfants », rappelle la HAS.