« Le Japon déclare l’état d’urgence après la découverte de ‘nanorobots’ chez 96 millions de citoyens », c’est ce qu’ont pu lire des centaines de millions de personnes dans divers messages partagés sur les réseaux sociaux.
Avant d’être relayée en français, cette « information » trouve sa source dans une vidéo partagée par le média complotiste anglophone « The people’s voice », qui cumule deux millions de vues sur X (Twitter). Cette rumeur circule également sur d’autres réseaux sociaux comme Facebook ou TikTok.
Le message original indique que « le Japon a présenté ses excuses à ses citoyens pour les conséquences désastreuses des vaccins à ARNm contre la COVID-19 et a lancé des enquêtes scientifiques et criminelles à grande échelle pour établir la vérité et punir les auteurs. »
Dans l’article correspondant publié sur « La voix du peuple », on peut lire que « une nouvelle étude japonaise publiée dans le « International Journal of Vaccine Theory Practice and Research » prouve que les vaccins Pfizer et Moderna contiennent des entités non autorisées ressemblant à des vers animés, invisibles à l’œil humain, qui nagent, se tortillent et s’assemblent en structures complexes. »
FAUX
Contacté par 20 minutes Concernant un « état d’urgence » décrété par les autorités japonaises, l’ambassade du Japon en France a déclaré qu’« il s’agit bien d’une fausse information et que les autorités japonaises n’ont jamais instauré un quelconque état d’urgence dans cette affaire ».
Qu’en est-il de l’étude scientifique citée dans l’article en question ? On peut en effet y retrouver une publication intitulée « Real-time self-assembly of artificial constructs visible under stereoscopic microscope in incubated samples of mRNA products mostly from Pfizer and Moderna: A Comprehensive longitudinal study », parue dans le « International Journal of Vaccine Theory Practice and Research » en juillet 2024.
Il faut cependant se méfier de la fiabilité de cette revue. Malgré sa prétendue spécialisation dans les vaccins, il s’avère que son rédacteur en chef est un linguiste, et son rédacteur associé est un professeur d’ophtalmologie et neuroscientifique connu pour ses positions controversées sur les vaccins (comme celle selon laquelle les vaccins pourraient provoquer l’autisme).
L’article en question mentionne en effet que des observations au « stéréomicroscope jusqu’à un grossissement de 400X » du contenu des vaccins contre la COVID-19 ont révélé « la présence d’un grand nombre d’entités artificielles visibles s’auto-assemblant », « ressemblant à des vers, des disques, des chaînes, des spirales, des tubes ». Mais là aussi, les profils des auteurs de l’article remettent en cause sa fiabilité. Selon les informations mentionnées dans l’article, le premier est professeur de linguistique appliquée à l’Université chrétienne d’Okinawa au Japon, et le second est un « médecin praticien spécialisé en obstétrique et gynécologie » en Corée. Là encore, le fait qu’aucun de ces deux auteurs n’ait d’expertise scientifique particulière sur les vaccins incite à la prudence.
La nanotechnologie ne signifie pas des nanorobots
Cette rumeur sur les « nanorobots » reprend l’une des théories du complot les plus populaires sur les vaccins à ARN messager, notamment utilisés contre le Covid-19. Le terme « nanotechnologie », effectivement utilisé dans les vaccins Pfizer ou Moderna, désigne des techniques et outils scientifiques à l’échelle infiniment petite. Comme l’explique l’Inserm, ceux-ci permettent « d’étudier ou d’interagir avec des phénomènes particuliers qui existent à l’échelle nanométrique ou nanoscopique ».
Comme l’ont déjà détaillé de nombreux articles de fact-checking, comme celui publié par Reuters, dans le cas des vaccins, « le terme ‘nanoparticule’ désigne une minuscule gouttelette lipidique qui transporte le composant vaccinal ». En fait, ces nanotechnologies ne signifient pas que les vaccins contiennent de petits appareils électroniques ou des robots. Ce malentendu est utilisé depuis plusieurs années comme argument pour promouvoir la théorie selon laquelle les vaccins contiendraient des puces connectées à la 5G, qui 20 minutes a déjà vérifié.