Des experts indépendants de l’ONU ont dénoncé, lundi 14 octobre, la mise en danger des migrants et réfugiés en Tunisie lors d’opérations de sauvetage en mer ou de transferts vers les zones frontalières. « Nous avons reçu des informations choquantes faisant état de manœuvres dangereuses lors d’opérations d’interception de migrants, de réfugiés et de demandeurs d’asile en mer »ont-ils déclaré dans un communiqué, citant notamment des coups et des chavirages de bateaux.
Ils notent qu’entre janvier et juillet, 189 personnes, dont des enfants, ont perdu la vie lors des traversées et 265 lors d’opérations d’interception en mer, tandis que 95 personnes sont portées disparues. « Pour les personnes « secourues » par les garde-côtes, y compris les victimes de trafic, leur situation ne ferait qu’empirer au débarquement dans les ports »soulignent les experts, qui sont mandatés par le Conseil des droits de l’homme de l’ONU mais ne parlent pas en son nom.
Ils font état d’allégations de transferts forcés arbitraires vers les frontières avec l’Algérie et la Libye, sans aide humanitaire. « Nous sommes consternés par les violences signalées et le recours excessif à la force lors de ces transferts. Les migrants, réfugiés et demandeurs d’asile, y compris les enfants et les femmes enceintes, seraient emmenés dans des zones désertiques à la frontière algéro-libyenne, et les gardes-frontières les abattraient s’ils tentaient de revenir. »insistent-ils.
Groupes criminels
Dans le communiqué, les quatre rapporteurs spéciaux et membres du groupe de travail sur les disparitions forcées ou involontaires s’inquiètent également des informations selon lesquelles les migrants, réfugiés et demandeurs d’asile subsahariens « sont soumis à des niveaux plus élevés de violence de la part des forces de sécurité tunisiennes ».
À cela s’ajoute la répression des organisations de la société civile et des défenseurs des droits humains qui a conduit à la suspension temporaire des activités de pré-enregistrement et à un accès limité des migrants aux services de base.
Les experts expriment également leur inquiétude face à l’augmentation du nombre de groupes criminels impliqués dans la traite des êtres humains et aux informations faisant état de violences sexuelles, notamment de viols de femmes et de filles âgées d’à peine 10 ans dans les zones frontalières.
« Nous sommes préoccupés par le fait que, malgré ces graves allégations, la Tunisie continue d’être considérée comme un endroit sûr après les opérations de recherche et de sauvetage en mer, et que la coopération se poursuive. (…) entre l’Union européenne et la Tunisie »ont-ils conclu. À l’été 2023, l’UE et la Tunisie ont conclu un accord qui prévoyait notamment une aide européenne de 105 millions d’euros pour lutter contre l’immigration irrégulière.