Derrière le refus de la suppression de 4 000 postes d’enseignants, les limites d’un système scolaire en crise
De l’aveu même du ministère de l’Éducation nationale, la procédure est rare, et inédite pour des raisons budgétaires : l’ensemble des sept organisations représentatives du personnel du ministère a déposé, lundi 14 octobre, un « alerte sociale »avant de déposer un préavis de grève, pour dénoncer la suppression de 4 000 postes d’enseignants prévue dans le projet de loi de finances (PLF) 2025, un chiffre inédit depuis 2012 et la fin du quinquennat de Nicolas Sarkozy.
« Une ligne rouge a été franchie »a fustigé l’intersyndicale dans un communiqué, déplorant « Des suppressions d’emplois à une échelle dévastatrice », qui concernera principalement l’école primaire. « À l’heure où l’école publique se porte mal, la seule réponse du gouvernement est de fermer des postes et donc d’entretenir l’illusion qu’on peut faire mieux avec moins », ajoutent les syndicats, qui ont été reçus mercredi 16 octobre par le cabinet de la ministre, Anne Genetet.
La rue de Grenelle assure prendre cette alerte « avec beaucoup de sérieux »mais n’a pas apporté de réponses sur l’aspect budgétaire aux syndicats, et fait référence à d’éventuelles évolutions au cours du débat parlementaire. Elle insiste également sur « augmentation significative » des crédits dont dispose l’éducation nationale dans un PLF 2025 qui prévoit 20 milliards d’euros d’économies sur les dépenses publiques.
Avec 64,5 milliards d’euros destinés à « l’éducation scolaire », le budget 2025 est effectivement quasi stable par rapport au PLF 2024 (64,4 milliards d’euros). Ce montant a été réduit de près de 700 millions d’euros en février, mais cette baisse n’a pas été reconduite pour 2025, d’où l’augmentation de 834 millions d’euros avancée par Rue de Grenelle. Or, le poste « éducation », premier budget de l’État, essentiellement constitué de dépenses de personnel, augmente naturellement de plusieurs centaines de millions d’euros chaque année, du fait de l’évolution de carrière de ses millions d’agents. La stabilité du crédit ne peut donc résulter que de l’épargne.
« Un changement psychologique très puissant »
L’Éducation nationale, qui perd à terme 2.000 emplois – grâce à la création, par ailleurs, de 2 000 postes d’accompagnement des étudiants handicapés – soutient ainsi 90 % des suppressions d’emplois dans la fonction publique, alors même qu’elle représente la moitié de ses effectifs. Et si 4 000 postes sur un effectif total de 850 000 enseignants peuvent paraître marginaux, ils pèsent en réalité lourdement sur un système scolaire en crise. « Du point de vue de Bercy, cela ne représente rienanalyse un expert du système éducatif qui souhaite rester anonyme. Mais, pour les enseignants, c’est un marqueur, un basculement psychologique très puissant, la goutte d’eau qui fait déborder le vase face à la dégradation de leurs conditions de travail et de leur reconnaissance. »
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