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Déficits, dette : les experts recommandent des économies massives sur sept à douze ans

La France doit faire un énorme effort budgétaire, sans délai, mais en l’étalant intelligemment sur une période de sept à douze ans. C’est le large message d’une note publiée ce mercredi par le Conseil d’analyse économique (CAE), organisme rattaché au Premier ministre. Les trois économistes qui la signent – Adrien Auclert, Thomas Philippon et Xavier Ragot – expliquent aussi pourquoi l’effort initial gagnerait à être plus marqué, y compris en augmentant temporairement les impôts ou en ne revalorisant pas les prestations sociales.

Les premiers constats des chercheurs sont connus. Les finances publiques françaises sont mal en point. En 2023, la dette publique avoisinera les 110 % du PIB et le déficit a glissé à 5,5 % du PIB. Que ce soit pour éviter une hausse des taux d’intérêt, garder la dette sous contrôle ou simplement respecter les engagements européens du pays, les futurs gouvernements devront inévitablement s’attaquer au problème. La note du CAE sert de rappel sur le sujet, alors que la France cherche désespérément un nouvel exécutif.

112 milliards à économiser

Trois facteurs peuvent influencer le taux d’endettement : le déficit primaire (c’est-à-dire le solde des dépenses et des recettes publiques, hors charges d’intérêts), la charge d’intérêts et la croissance du PIB. Dans leur note, les économistes montrent que sur le long terme, ces deux derniers éléments s’annulent en France. Autrement dit, le stock de dette française (environ 3.100 milliards d’euros) n’est rien d’autre que la somme des déficits primaires des cinquante dernières années.

La « bonne nouvelle », comme disent les économistes, c’est que la France maîtrise toujours sa dette et n’est pas prise dans une spirale de remboursements qui engloutit ses ressources, comme l’Italie. La « mauvaise nouvelle », c’est qu’elle ne peut pas compter sur la seule croissance pour enrayer la hausse de sa dette, passée de 21 % du PIB en 1970 à 110 % aujourd’hui. Pour stabiliser le ratio à son niveau actuel, il faut ramener le déficit primaire à zéro ; pour le réduire, il faut dégager un excédent primaire.

Cette dernière hypothèse est privilégiée par le CAE, car elle permet de disposer d’une certaine marge de manœuvre en cas de choc majeur dans les années à venir. L’histoire des trente dernières années a montré que tous les dix ans, environ 7 points de PIB étaient engloutis par des mesures exceptionnelles comme après la crise financière de 2008 ou la crise du Covid plus récemment. De plus, l’incertitude sur le poids futur de certaines grandes dépenses – les retraites, la transition énergétique ou l’armée – incite à la prudence.

Les économistes préconisent donc, à moyen terme, un excédent primaire de 1% du PIB. En partant du niveau actuel (3,5% de déficit primaire, soit le déficit total moins 2 points de charges d’intérêts), il faudrait donc économiser 4 points de PIB, soit 112 milliards d’euros.

Lissage dans le temps

La somme est énorme et un tel effort pèsera inévitablement sur l’activité économique. Il convient donc de l’étaler dans le temps. Selon le modèle CAE, « un horizon de consolidation d’au moins sept ans est nécessaire ». Cette trajectoire se traduirait par un niveau d’endettement de 119 % du PIB à l’issue de l’ajustement, avant de commencer à diminuer.

Il est possible d’étaler encore l’effort, expliquent les économistes, mais « chaque année supplémentaire conduit à une augmentation de la dette d’environ 1 point de plus ». Lisser l’ajustement budgétaire sur plus de douze ans ferait ainsi franchir à la dette française le seuil de 125% du PIB – un niveau observé jusqu’ici uniquement en Italie et en Grèce et qui ferait courir le risque d’une envolée des taux d’intérêt qui pèserait sur l’équation.

Mesures à court terme

Bien qu’étalé dans le temps, l’effort gagnerait à être plus marqué dès maintenant, explique la note du CAE – à la fois pour une question de crédibilité et parce que cela permet d’influer plus rapidement sur la dynamique de la dette. Les économistes listent quelques mesures qui pourraient être prises à court terme : recentrer les aides à l’apprentissage (4 milliards d’économies attendues), supprimer les exonérations de cotisations sociales au-delà de 2,5 Smic (2 milliards), réduire le crédit d’impôt recherche dans les grandes entreprises (2,5 milliards) ou encore supprimer les exonérations sur les droits de succession (9 milliards).

Ces options ne s’avérant pas suffisantes face à l’ampleur de l’ajustement nécessaire, le CAE estime qu’il faudrait également « prendre des mesures temporaires, comme des hausses temporaires d’impôts ou une sous-indexation généralisée des dépenses et des tranches d’impôt ». Un gel du point d’indice des fonctionnaires, des prestations sociales et du barème de l’impôt sur le revenu « apporterait environ 20 milliards d’euros aux comptes publics », souligne la note. Des options déjà envisagées par l’exécutif ces derniers mois.

L’horizon de sept à douze ans préconisé par le CAE risque de faire grincer des dents à Bercy, où le ministre sortant insiste sur la nécessité de se remettre sur les rails d’ici 2027. En revanche, la lecture des économistes rejoint celle d’Emmanuel Macron sur un point clé : compte tenu du poids des prélèvements obligatoires en France, de l’inefficacité de certaines politiques publiques et des ajustements réussis à l’étranger (au Portugal notamment), il serait souhaitable de privilégier les baisses de dépenses aux hausses d’impôts. Le message sera transmis au prochain gouvernement.

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Ray Richard

Head of technical department in some websites, I have been in the field of electronic journalism for 12 years and I am interested in travel, trips and discovering the world of technology.
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