Il était l’un des symboles du retour de la gauche au pouvoir. Premier socialiste sous la Ve République à présider l’Assemblée nationale, Louis Mermaz est décédé cinq jours avant son 93e anniversaire, ont annoncé ce jeudi 15 août plusieurs responsables politiques, de droite comme de gauche. « Louis Mermaz (…) nous a quitté chez lui dans l’Essonne, écrit sur X le président du conseil départemental, François Durovray. Son engagement au service de notre pays a laissé une trace dans son histoire. Le premier secrétaire du Parti socialiste, Olivier Faure, a exprimé sa « immense tristesse » pour ce partisan de la première heure de Mitterrand. « Compagnon de voyage » de l’ancien Président de la République, « Son esprit vif nous a accompagné dans tous nos combats, même dans ces derniers jours, pendant la campagne législative », a ajouté le député de Seine-et-Marne.
Très bon soldat
Né à Paris en 1931, ce professeur agrégé d’histoire est aux côtés de François Mitterrand bien avant le congrès d’Epinay de 1971. Louis Mermaz milite au sein de l’Union démocratique et socialiste de la Résistance et est l’un des fondateurs de la Convention des institutions républicaines en 1965. Élu député de l’Isère sous la bannière de la Fédération de la gauche démocratique et socialiste – battu en 1968 avant de reconquérir son siège en 1973 –, il est élu à la tête de l’Assemblée nationale le 2 juillet, après l’élection de François Mitterrand à la présidence de la République, confirmée par les législatives. Entre-temps, Mermaz goûte au portefeuille, nommé ministre de l’Équipement et des Transports dans le premier gouvernement Mauroy. Un poste qu’il retrouvera sept ans plus tard, dans le premier gouvernement de Michel Rocard avant de le quitter à nouveau… un mois plus tard pour présider le groupe socialiste jusqu’en 1990 et être appelé à l’Agriculture dans les équipes d’Edith Cresson et de Pierre Bérégovoy. Très bon militaire, il terminera sa carrière ministérielle comme porte-parole et ministre des Relations avec le Parlement avant la seconde cohabitation.
Maire de Vienne pendant trente ans (de 1971 à 2001), député jusqu’à la même date avant de passer dix ans au Sénat, Louis Mermaz reste dans les mémoires socialistes comme l’un des gardiens du temple Mitterrand, l’un de ceux qui, en 1981, plaidèrent pour un « Le socialisme à la française (qui) ne peut se contenter d’un rafistolage du capitalisme ». « Il faut montrer que le socialisme fonctionne ! » il lança ainsi au congrès de Valence en 1981, celui qui suivit la victoire de la gauche, la mise en garde contre la « dérive vers une vague de social-démocratie (qui) conduira à un retour au libéralisme. »
« Un véritable modèle de défense des libertés publiques et des droits de l’homme »
Plusieurs personnalités du Parti socialiste ont déjà réagi à l’annonce de son décès. L’ancien premier secrétaire du PS Jean-Christophe Cambadélis parle d’une « Intellectuel à l’humour corrosif, compagnon de route de Mitterrand du congrès d’Epinay à la présidence de l’Assemblée, militant à gauche jusqu’à son dernier souffle lors des élections européennes, il me disait en 2017 : « On s’en remettra, on en a vu d’autres. » Le sénateur PS David Assouline salue la « qui a participé à tous les combats de la gauche pour l’égalité. » Le leader de La France Insoumise Jean-Luc Mélenchon se souvient« un véritable modèle de défense des libertés publiques et des droits de l’homme (…) sans crainte du qu’en-dira-t-on. » L’ancienne sénatrice socialiste Marie-Noëlle Lienemann souligne « sa sagacité et ses engagements sont restés intacts. »
Louis Mermaz était aussi un écrivain engagé. Son œuvre Les Prisons de la République a dénoncé en 2001 les conditions dans lesquelles sont détenus les immigrés illégaux. Je dois te dire publié en 2013 retrace soixante années de vie politique à gauche. La notion de mémoire tient une place importante dans son parcours politique. En 2015, il a légué aux archives nationales 200 cartons de documents qui constituent ses archives publiques et privées. Elles sont à l’origine de la création du fonds Louis-Mermaz qui retrace cinquante ans d’histoire de la gauche. Hasard ou coïncidence, dans l’une de ses dernières interviews accordées au quotidien le Dauphiné libéré, il a déclaré : « Je pense que ce qui est important, c’est ce qui se passe après la mort. »
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