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Décès de Charles Juliet, écrivain de l’intime

Décès de Charles Juliet, écrivain de l’intime
Charles Juliette, en 2013

Charles Juliet, poète et auteur d’un journal monumental, est décédé à Lyon le 26 juillet, à l’âge de 89 ans. L’œuvre de cet écrivain de l’intime ne s’est jamais limitée à décrire les errances de soi et les petits désastres de l’existence. S’il a beaucoup écrit sur sa difficulté d’être, cette introspection n’a jamais été une fin en soi. Pour Juliet, la souffrance est un état qu’il faut surmonter. « J’avais ce besoin impératif de me connaître pour résoudre mes problèmes, dépasser mes contraintes et découvrir l’être humain en général », il a expliqué à la Monde. Cette douleur a une origine lointaine dans la vie de l’écrivain.

Charles Juliet, né le 30 septembre 1934 à Jujurieux (Ain), est le quatrième enfant d’un couple modeste. A un mois, l’enfant est séparé de sa mère, suicidaire et interné dans un hôpital psychiatrique. Abandonné par son père, il sera placé dans une famille d’accueil, qui l’adoptera. Toute l’œuvre de Charles Juliet sera marquée par cet arrachement à sa mère. Dans son récit L’année de l’éveil (POL, 1989), il racontera comment il a pu surmonter ce drame primitif pour finalement « laisse ton cœur courir ». Lors d’une interview à Monde En décembre 2017, Charles Juliet évoquait à nouveau cette séparation tragique en termes radicaux : « C’était comme si j’étais coupé en deux. »

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L’écriture a-t-elle le pouvoir de reconstruire un homme ? De guérir une existence ? À 12 ans, il entre dans une école militaire, d’où il sort à 20 ans pour être admis à l’École de santé militaire de Lyon. C’est en 1949 qu’il commence à tenir son journal. Charles Juliet a 15 ans. De ces années d’écriture, il ne reste que quelques pages. Lorsqu’on lui demande ce qu’il en pense soixante-dix ans plus tard, Charles Juliet reste évasif. « Ce sont des notes bien écrites, mais elles ne racontent pas grand-chose. Si j’avais vraiment osé écrire, je n’aurais pas pu rendre compte de ce que je vivais. Je n’avais pas encore accès à mon monde intérieur. »

Se rapprocher de soi

A 33 ans, alors qu’il n’a encore rien publié et qu’il a abandonné ses études pour se consacrer exclusivement à ses recherches artistiques, Charles Juliet rencontre Samuel Beckett, sur les conseils du peintre Bram van Velde. Fasciné par l’auteur deEn attendant Godot (Minuit, 1952), il s’entretiendra avec lui à plusieurs reprises chez lui à Paris. Dans le livre qu’il lui consacre (Rencontre avec Samuel Beckett, POL, 1999), on peut lire cette phrase : « Étrange idée », pensais-je, « de venir interroger celui qui ne fait qu’interroger. » En 1969, Beckett, tant vénéré par Juliette, lui écrit une lettre cinglante, destinée, sans doute, à secouer l’apprentie écrivaine. « Ayant lu et relu vos poèmes et vos lettres, je ne trouve rien à vous dire sinon que je m’incline devant cette grande détresse (…). Bonne chance, cher Charles Juliet, éloigne-toi de mon travail et de toi-même.

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