Décès d’Alberto Fujimori, ancien président du Pérou condamné pour crimes contre l’humanité
YOSHIKAZU TSUNO / AFP
L’ancien président péruvien Alberto Fujimori, photographié ici en 1996, est décédé le 11 septembre 2024.
INTERNATIONAL – L’ancien président péruvien Alberto Fujimori (1990-2000), gracié en décembre pour raisons de santé après avoir été condamné « crimes contre l’humanité »est décédé ce mercredi 11 septembre à Lima à l’âge de 86 ans, a annoncé sa famille sur le réseau social X.
« Après une longue bataille contre le cancer, notre père, Alberto Fujimori, vient de partir à la rencontre du Seigneur. Nous demandons à ceux qui l’ont aimé de nous accompagner d’une prière pour le repos éternel de son âme. Merci pour tout, Papa ! »a annoncé ses enfants Keiko, Hiro, Sachie et Kenji Fujimori.
L’ancien dirigeant, d’origine japonaise, a été libéré en décembre après avoir passé 16 ans dans une prison de l’est de Lima. Il purgeait une peine de 25 ans pour crimes contre l’humanité, dont deux massacres de civils commis par un escadron de l’armée lors des combats contre les guérilleros maoïstes du Sentier lumineux au début des années 1990.
Surnommé « El Chino »
Il a été libéré en décembre sur ordre de la Cour constitutionnelle. « pour des raisons humanitaires »malgré l’opposition de la Cour interaméricaine des droits de l’homme. En mai, Alberto Fujimori a annoncé qu’on lui avait diagnostiqué une tumeur maligne à la langue.
Après avoir dirigé le Pérou d’une main de fer pendant dix ans, l’héritage du dictateur divise encore profondément les Péruviens. Alberto Fujimori a divisé les Péruviens comme peu d’hommes politiques l’ont fait dans l’histoire du pays. Car dans ce pays andin de 32 millions d’habitants, il est difficile d’oublier le passage au pouvoir de celui que l’on surnommait « Le Chinois » (les Chinois).
Pour certains, il est l’homme qui a stimulé la croissance économique du pays grâce à ses politiques ultra-libérales et qui a combattu avec succès les guérillas du Sentier lumineux (maoïste) et du mouvement révolutionnaire Tupac Amaru (guévariste).
Gouvernance autoritaire
D’autres se souviennent surtout de ses scandales de corruption et de ses méthodes autoritaires, qui l’ont conduit derrière les barreaux pour avoir ordonné deux massacres perpétrés par un escadron de la mort en 1991-1992, dans le cadre de la lutte contre le Sentier lumineux.
Né à Lima le 28 juillet 1938 de parents immigrés japonais, Alberto devient ingénieur agronome puis enseignant de mathématiques. En 1964, il passe une année universitaire à Strasbourg où il apprend le français et obtient, en 1970, une maîtrise de mathématiques aux États-Unis.
En 1990, Alberto Fujimori remporte à la surprise générale l’élection présidentielle face au célèbre écrivain et prix Nobel de littérature Mario Vargas Llosa. Faute de majorité, le 5 avril 1992, avec le soutien des forces armées, il dissout le Parlement et suspend la Constitution. L’année suivante, il fait passer une nouvelle Loi fondamentale donnant plus de pouvoirs au président.
Après sa victoire sur le Sentier Lumineux et l’arrestation de son leader Abimael Guzman – décédé en prison le 11 septembre 2021 – le magazine américain Temps En 1993, il est élu Personnalité sud-américaine de l’année. Il est réélu président en 1995.
Licencié pour des affaires de corruption
En 1996, le Parlement vote une loi lui permettant de briguer un troisième mandat. En mai 2000, Alberto Fujimori est à nouveau élu, mais le Parlement vote en novembre sa destitution pour corruption. L’affaire prend des allures de scénario hollywoodien. Le dirigeant déchu s’enfuit au Japon, pays dont il est également citoyen, et démissionne par fax depuis un hôtel de la capitale japonaise.
Lima a tenté pendant des années de convaincre Tokyo de l’extrader, en vain. Après une longue bataille juridique, c’est finalement le Chili, où il s’était rendu en 2005, qui a extradé Alberto Fujimori deux ans plus tard.
Sa famille et ses avocats se sont battus pour qu’il ne finisse pas sa vie derrière les barreaux. Mi-mars 2022, une grâce présidentielle accordée la veille de Noël 2017 par le président de l’époque, Pedro Pablo Kuczynski, a été annulée en octobre 2018 par la justice. Le 7 décembre 2023, la Cour constitutionnelle a finalement ordonné la libération immédiate de l’ancien président controversé, rétablissant la grâce accordée en 2017.
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