Nouvelles locales

Debout – Chronique de Pierre Serna – 20 septembre 2024

En 1857, Frederick Douglass, un ancien esclave en fuite, tirait les conclusions de son combat abolitionniste et lançait un avertissement pour l’avenir : « Ceux qui prétendent vouloir la liberté mais refusent l’agitation politique sont des gens qui veulent la moisson sans labourer la terre ; la pluie sans le tonnerre et les éclairs ; l’océan sans le terrible rugissement des eaux. La lutte peut être une lutte morale, ou une lutte physique, ou les deux. Mais ce doit être une lutte. Le pouvoir ne renonce à rien sans qu’on lui enlève quoi que ce soit. Il ne l’a jamais fait et ne le fera jamais. ».

Cette vérité professée au milieu du XIXe siècleet Le siècle résonne étrangement aujourd’hui avec une modernité intacte et une valeur toujours plus profonde à méditer. L’adversité n’a jamais cessé. Les luttes sociales, les blocages politiques, la dureté économique des temps, la dévastation écologique, les discriminations persistantes et les répressions plus ou moins insidieuses se déchaînent contre tous ceux qui ont décidé de se tenir debout.

Sur la brèche, ils veillent, sentinelles rebelles, déjouant toutes les perfidies et les bassesses d’un monde sans boussole ni valeur, aux mains des menteurs, des calomniateurs, des opportunistes. La lutte n’a de sens que par la dignité qu’elle comporte et la justice du combat qu’elle tend à soutenir. Combattre, mais sans s’abaisser à la médiocrité des puissants du jour. Rester digne, rester debout.

Le peuple des Afro-Américains, descendants d’esclaves, n’offre-t-il pas une formidable métaphore de la force, de la dignité de ce combat pour rester debout, encore et encore. Bien longtemps après Frederick Douglass, il a fallu du courage à tous les Noirs des États-Unis pour combattre le racisme systémique, le rejet de leur personne, de leur humanité à cause de la couleur de leur peau, à cause de la « ligne de couleur »la ligne de ségrégation interdisant le mélange, le beau mélange.

Et si la boxe, en tant que figure essentielle et primitive du combat, incarnait la lutte des Noirs pour leur dignité et leur pleine égalité ? Il y a quelques semaines, une biographie de l’un des plus grands champions de boxe de tous les temps, Jack Johnson (1878-1946) a été publiée.

Nous sommes au début du 20ème siècle.et siècle à Reno, Nevada, sous un soleil de plomb, le 4 juillet 1910, jour de l’Indépendance. 22 000 passionnés ont fait le déplacement pour assister au « combat du siècle » entre Jeffries, le chevalier de la cause blanche, et l’indestructible colosse Jack Johnson, le fils d’esclaves, l’homme le plus libre dans sa tête et dans son corps, connu pour son goût de la vitesse, de la belle vie, sûr de sa force.

Les insultes raciales pleuvent. Les moqueries simiennes qui auraient dû l’humilier le renforcent, et le voilà qui inflige une correction à son adversaire. L’annonce de la victoire de Johnson a provoqué des dizaines d’assassinats racistes dans le pays. Magnifique, l’histoire du duel s’incruste dans la mémoire de Jack qui la raconte. Round après round, se dévoile une vie chaotique de boxeur, sans cesse en porte-à-faux avec l’hostilité des Blancs. Les panneaux se déclinent en noir, blanc et rouge sang, jusqu’au dénouement.

Johnson se bat pour tous ses frères de couleur qui ont trouvé dans la boxe l’exutoire de leur colère, de leur frustration. Johnson incarne la dignité et la force de tous les opprimés en lutte, et plus encore, de toute l’humanité souffrante quelle que soit sa couleur, ses origines. Johnson se bat pour tous ceux qui sont injustement accusés… ou l’histoire des Le dernier debout.

Le dernier deboutde Youssef Daoudi (dessin, couleurs) et Adrian Matejka (scénario), Futuropolis, 320 pages

Aux côtés de ceux qui combattent !

L’urgence sociale est la priorité quotidienne de l’humanité.

  • En dénonçant la violence des employeurs.
  • En montrant ce que vivent ceux qui travaillent et ceux qui aspirent à le faire.
  • En fournissant aux salariés des clés de compréhension et des outils pour se défendre face aux politiques ultra-libérales qui dégradent leur qualité de vie.

Connaissez-vous d’autres médias qui font cela ? Soutenez-nous !
Je veux en savoir plus.

New Grb1

Gérard Truchon

An experienced journalist in internal and global political affairs, she tackles political issues from all sides
Bouton retour en haut de la page