De la confidentialité à la Coupe du monde, comment le futsal français a réussi à se transformer
Qualifiés pour la Coupe du monde en Ouzbékistan, les Bleus du futsal débutent leur aventure lundi face au Guatemala. Une première historique pour la France, après un long parcours.
Publié
Temps de lecture : 4 min
De l’ombre à la lumière. Classée 37e mondiale il y a dix ans, l’équipe de France de futsal a connu une transformation spectaculaire en une décennie. Désormais classée 10e, les Bleus s’apprêtent à disputer leur tout premier match de Coupe du monde, lundi 16 septembre (17 heures) à Boukhara, en Ouzbékistan, face au Guatemala. S’ils ont dû attendre la dixième édition de la compétition pour se qualifier, les joueurs ont de grandes ambitions, fruit de plusieurs années de professionnalisation.
Créée en 1997 à l’occasion d’un match amical face à la Belgique, l’équipe de France de futsal est officialisée en 1998 avec l’arrivée d’Aimé Jacquet, champion du monde avec l’équipe de France de football, à la tête de l’encadrement technique national. Pourtant, malgré ces bases établies, les résultats tardent à venir et les Bleus peinent à s’imposer sur la scène internationale.
Contrairement au Brésil, à l’Espagne, au Portugal ou à l’Ukraine, le futsal a longtemps eu du mal à se faire une place en France. Ce sont avant tout les jeunes qui se passionnent pour ce sport né en Uruguay dans les années 1930. Le futsal s’est développé dans les collèges et lycées, loin des sphères professionnelles. Aujourd’hui, il est le sport collectif le plus pratiqué en milieu scolaire (UNSS), devant le handball, le basket-ball ou encore le football, avec plus de 200 000 joueurs selon la Fédération française de football (FFF).
Ce n’est qu’en 2017 que la FFF reconnaît enfin l’importance du futsal, en en faisant une priorité. Noël Le Graët, alors à la tête du football français, lance un plan de développement sous la direction de Philippe Lafrique, référent futsal au sein du comité exécutif.Nous étions en retard par rapport à d’autres pays. Il fallait démocratiser le sport en France. De nombreuses régions n’avaient pas de championnat de futsal.« , rappelle-t-il. Des moyens ont ensuite été déployés pour développer les infrastructures et la formation, et le nombre de clubs a depuis augmenté, atteignant 1 582 en septembre 2024.
En 2018, un hub français a été créé à Lyon pour accompagner la professionnalisation.Comme tous les clubs du championnat français ne sont pas professionnels, nous avons pris du retard. Ce centre de formation a pour vocation de combler ce manque.ajoute Philippe Lafrique. Il y a huit ans, nous devions nous occuper du travail de nos joueurs, qui ne pouvaient pas toujours répondre aux convocations.« En 2024, la donne a changé : tous les joueurs sont désormais professionnels.
Raphaël Reynaud, sélectionneur de l’équipe de France depuis 2021, attribue ce succès aux moyens mis en œuvre par les clubs et la fédération. Les joueurs bénéficient d’un encadrement plus structuré, avec jusqu’à sept séances d’entraînement par semaine. La professionnalisation de l’équipe s’est également accompagnée d’un renforcement du staff technique avec un préparateur physique, un analyste vidéo et trois kinésithérapeutes.
Les clubs français, comme l’Etoile Lavalloise et le Sporting Club de Paris, régulièrement qualifiés pour la Ligue des champions, fournissent de nombreux internationaux. Raphaël Reynaud souligne également l’importance des joueurs évoluant à l’étranger, comme Mamadou Touré au FC Barcelone ou Souheil Mouhoudine au Jimbee Cartagena, également en Espagne, qui contribuent à élever le niveau de l’équipe.
En Europe, des pays comme le Portugal, champion du monde en titre, ou l’Espagne, qui possède le meilleur championnat, sont des références.En France, nous manquons de culture futsal. Pour combler ce manque, nous misons sur une identité de jeu forte, basée sur un pressing constant et des transitions rapides.« , explique le sélectionneur français. Ce modèle est appliqué dès les équipes de jeunes au sein du pôle français, ainsi qu’avec l’équipe féminine.
Si l’équipe de France masculine existe depuis plus de vingt-cinq ans, l’équipe féminine est toute récente. Sa première sélection a été créée en 2023, avec en ligne de mire la première Coupe du monde, prévue en 2025 aux Philippines.Le futsal féminin est crucial pour nousdéclare Philippe Lafrique. Le nombre de licenciés augmente chaque année et nous travaillons à mettre en place des championnats dans les districts.« Cependant, les joueurs internationaux ne bénéficient pas encore du statut professionnel.
Plus avancés dans leur progression, les Bleus ont même réalisé des performances remarquables, comme leur victoire face au Brésil en avril dernier. Sous la direction de Raphaël Reynaud, l’équipe affiche un bilan impressionnant de 30 victoires en 44 matches.
A l’approche de la Coupe du monde, la FFF s’est fixé comme objectif de sortir de la phase de poules en terminant aux deux premières places de son groupe ou parmi les quatre meilleurs troisièmes, sur six poules. Raphaël Reynaud et son équipe nourrissent de grands espoirs.Nous avons demandé à nos joueurs quel était leur objectif pour la Coupe du monde. L’un d’eux a dit : « On va fermer le gymnase, pour être les derniers à partir. » Ils veulent aller jusqu’au bout. Nous restons humbles, car c’est notre première Coupe du monde, mais nous sommes des compétiteurs.« , dit l’entraîneur, néanmoins lucide et conscient que « leur manque d’expérience » pourrait leur jouer des tours.
Pour leur entrée en lice dans la compétition, et pour espérer lancer une magnifique épopée, les Bleus joueront sous les yeux du président de la FFF, Philippe Diallo, qui a fait le déplacement en Ouzbékistan.