Le célèbre chanteur réunionnais Danyèl Waro appelle à un vote massif lors des prochaines élections législatives du 30 juin et du 7 juillet, afin de barrer la route à l’extrême droite.
Publié le 21 juin 2024
Mis à jour le 21 juin 2024 à 20h23
Publié le 21 juin 2024
Mis à jour le 21 juin 2024 à 20h23
Danyèl Waro, il y a quelques années, l’extrême droite ne dépassait pas les 3% à La Réunion. Lors des dernières élections européennes, il était majoritaire sur l’île. Ce qui s’est passé ?
Je réalise que les gens ne connaissent pas l’histoire. Nous manquons de conscience politique. Avant, il y avait un parti communiste, un parti socialiste, une droite et tout était plus clair. Au fil du temps, les hommes politiques ont manœuvré en tissant des alliances pour conserver le pouvoir, ce qui a créé un flou entre les différentes tendances. Les gens étaient désorientés.
J’ai personnellement pris conscience de cette confusion lorsqu’en 1994, je suis allé manifester artistiquement contre la venue de Jean-Marie Le Pen et que j’ai été agressé par Maurice Brasier. Ce dernier m’avait assommé d’un violent coup de pied à la tête. Certains ont alors cru que j’étais allé chanter pour Le Pen et que j’avais été attaqué par les communistes. C’est à ce moment-là que j’ai réalisé l’ampleur de la confusion dans la tête des gens.
De la même manière, en 2012, alors que je me rendais à l’aéroport pour protester contre l’arrivée de Marine Le Pen, une personne est venue me voir pour me féliciter… d’avoir apporté mon soutien au Front National. Certains ont pensé que ma protestation artistique était une expression de soutien ! Cela vous indique à quel point les gens ont perdu toute direction.
Depuis que je chante du maloya, que j’exprime mes idées à travers mes paroles, il ne doit y avoir aucun doute sur mon côté politique. Si les gens aiment mes chansons et suivent mon parcours, ils comprennent vite que je ne peux pas être associé à Le Pen et aux autres. Je suis de gauche et je suis pour le Nouveau Front Populaire. Je suis contre l’extrême droite, la droite et Macron.
Tous les électeurs d’extrême droite sont-ils racistes ?
Les gens qui votent pour l’extrême droite ne sont pas forcément racistes, mais ils manquent d’analyse. Ces gens tombent dans le piège des raccourcis proposés par Marine Le Pen : « On jette les étrangers dehors et tous les problèmes seront résolus ». Il faut réfléchir un peu. Les gens sont en colère à cause de la situation économique et sociale. Il y a de la pauvreté et les prix augmentent. Tout cela est vrai. Il y a des problèmes de logement. On peut même aborder la question de l’immigration sans tabou. Nous pouvons discuter de tout. Mais il ne faut pas tomber dans le piège proposé par l’extrême droite. Nous devons exprimer notre colère de la bonne manière dans le bureau de vote et choisir un camp qui nous propose une bonne solution. Ce ne peut être ni Le Pen ni Macron. Il y a un petit manque de sensibilisation, de connaissance, chez les jeunes, pour savoir qui sont réellement Le Pen et l’extrême droite.
Pourquoi est-il important de voter ?
C’est vrai qu’on s’interroge sur l’utilité de voter car on est souvent dégoûté par la politique. Je ne vote pas tout le temps. Mais nous avons toujours ce moyen d’expression. Les gens d’extrême droite se mobilisent pour voter Le Pen. Ensuite, nous nous plaignons du fait que le fascisme est en tête. Il est en avance parce que nous ne nous sommes pas suffisamment mobilisés pour voter, choisissant de nous abstenir. Tout le monde doit aller voter, petits et grands. Il faut mettre dans les urnes un bulletin qui empêche Le Pen, Bardella et le Rassemblement national d’accéder au pouvoir. Il ne faut pas qu’ils passent ! Nous devons choisir un camp qui propose des solutions à notre colère, à notre mal-être, à nos difficultés. Nous devons bien réfléchir et nous mobiliser pour voter.
Pour quel camp appelez-vous les Réunionnais à voter aux élections législatives du 30 juin et du 7 juillet ?
DW : Il faudra choisir son camp le 30 juin et le 7 juillet. La gauche a décidé de se rassembler dans toute sa diversité et de se mettre d’accord sur l’essentiel. Nous sommes pour l’accueil des gens. Nous luttons pour des lois sociales, pour un meilleur accès au logement. Nous sommes contre la retraite à 64 ans. Macron a eu le temps de faire ses preuves et il a échoué. Nous avons une proposition avec tous les partis réunis au sein du Nouveau Front Populaire pour une alternative à la politique actuelle. Il n’y a pas d’autre côté pour nous. Il faut choisir le Nouveau Front Populaire, le front de la gauche. C’est la seule solution contre Le Pen et l’extrême droite.
Propos recueillis par Salim Lamrani, entretien réalisé en créole et traduit en français.