Malgré quelques sorties médiatiques, la tête de liste des Républicains plafonne dans les sondages, avec des intentions de vote stagnant entre 6 et 8 %. Franceinfo a assisté à l’une de ses réunions publiques dans les Yvelines.
« Oh! Il y a des gens »» dit une retraitée en entrant dans la mairie du Chesnay (Yvelines). « Et il fait chaud ! » répond avec le sourire un jeune militant, occupé à ajouter des chaises pour accueillir les 500 personnes venues assister à la réunion publique de François-Xavier Bellamy, mardi 28 mai. La tête de liste Les Républicains est « une star locale », après avoir fait ses premiers pas en politique au conseil municipal de la commune voisine de Versailles. Et cela se voit : à dix jours des élections européennes du 9 juin, des partisans politiques ont répondu, à l’image de Valérie Pécresse, la présidente de la région Ile-de-France, et son « mentor » François de Mazières, maire de Versailles, assis au premier rang. Le public offre une standing ovation au professeur de philosophie, sollicité pour d’innombrables selfies à la fin de la séance.
Cette ambiance enthousiaste contraste avec les pronostics décevants pour la liste du parti de droite, dont la popularité n’a jamais décollé, avec des intentions de vote stagnant entre 6 et 8% depuis plusieurs mois. Pourtant, les partisans de François-Xavier Bellamy et même ses adversaires estiment qu’il réalise une bonne campagne. Mais coincés entre l’extrême droite – avec le Rassemblement national et la Reconquête – et la majorité, les Républicains sont à la peine. Au siège du parti, on espère modestement maintenir le résultat de 2019. François-Xavier Bellamy avait alors enregistré le pire score de la droite aux élections européennes, avec 8,48 % des voix, converties en huit sièges au Parlement européen. Les conserver aujourd’hui serait un véritable soulagement pour LR.
« Nous n’avons pas beaucoup d’éléments favorables dans cette campagne, nous allons à contre-courant, à contre-courant »» reconnaît François-Xavier Bellamy depuis le podium. « Nous héritons d’un discrédit qui pèse sur notre parti. » Et qui déteint aussi sur sa campagne. Paul et Maylis font partie des plus jeunes à s’être glissés parmi les cheveux blancs ce soir. Les deux vingtièmes apprécient la tête de liste, mais la trouvent « mal entouré ». « LR a trop fait le yo-yo, avec des positions floues sur la bioéthique, sur l’immigration, sur la préférence nationale… » dit Paul. « Il y a un côté opportuniste chez certains », serre Maylis dans ses bras. Plusieurs personnalités du parti ont également été débauchées par le gouvernement, comme Rachida Dati en janvier. Qu’est-ce qui explique la fuite d’une partie de l’électorat de droite vers les macronistes ?
« Nous souffrons d’une position difficile vis-à-vis d’Emmanuel Macron. »
Un parlementaire républicainsur franceinfo
Les Républicains font également face à une concurrence à leur droite. Selon une enquête Ifop publiée le 28 mai 19% des électeurs de Valérie Pécresse en 2022 soutiennent désormais la liste menée par Jordan Bardella. Et seuls deux électeurs de François-Xavier Bellamy sur trois se disent sûrs de leur choix pour le 9 juin. «François-Xavier Bellamy a besoin d’encouragements», reconnaissent Henri et Christian, deux retraités versaillais. Adhérents fidèles, ils ont toujours voté pour LR, même dans les moments difficiles, comme lors de l’élection présidentielle de 2022, où Valérie Pécresse a enregistré le pire score de l’histoire du parti.
« Il parle de l’Europe, pas comme les candidats qui font de cette élection une élection nationale ou locale. »
Henri, député des Républicainssur franceinfo
« Il travaille dur et possède des capacités orales extraordinaires », poursuit-il, sous le regard approbateur de Christian. Malgré ses atouts, les deux hommes constatent que leur candidat ne fait pas de percée dans les intentions de vote. « Il n’est pas assez connu »soupire Christian.
La médiatisation est souvent critiquée par les partisans du candidat, connu de 65% des Français selon un sondage OpinionWay. « On juge surtout l’image, et il n’y a que des débats cacophoniques »déplore Valérie Pécresse, qui regrette au passage le « phénomène extrêmement toxique » sondages publiés quotidiennement. « Il faut briser cette superficialité médiatique pour aller au fond des choses »veut croire le président de la région Ile-de-France. Le candidat reprend lui-même cet argument, pour faire rire la salle ce soir. « J’espère que ce n’était pas trop incompréhensible »» dit-il à propos du débat sur BFMTV, auquel il a participé la veille. « Si »proclame le public. « Si je pouvais, j’aurais éteint la télé, mais j’étais devant la télé ! » ajouta-t-il avant de dire solennellement : « Je ne peux pas me résigner à ce que la politique soit un spectacle. »
Cependant, son équipe s’est fixé pour objectif de « essayer de briser le mur du son ».
« Nous avons un bon candidat, une bonne liste, un bon projet, du sérieux… Il ne reste plus qu’à rendre le message audible. »
Othman Nasrou, directeur de campagne de François-Xavier Bellamysur franceinfo
Ce dernier se réjouit du « très bien » performance de François-Xavier Bellamy sur le débat Attal-Bardella. Interrogé sur le plateau de France 2, juste après le duel entre le Premier ministre et la tête de liste du Rassemblement national, largement en tête dans les sondages, le candidat a dénoncé « mise en scène » Et « le signe d’une crise démocratique ». La séquence devenue virale a été vue plusieurs millions de fois sur les réseaux sociaux.
L’équipe de campagne a tenté d’autres coups de théâtre, en envoyant le 7 mai François-Xavier Bellamy rencontrer le député insoumis Louis Boyard devant Sciences-Po, bloqué par des étudiants opposés à la guerre à Gaza. Un « clash » qui lui vaut une invitation immédiate sur le plateau de Cyril Hanouna sur C8. Le philosophe s’est même lancé sur TikTok, un réseau social de buzz et de concision. Mais les jours et les semaines passent et il n’y a toujours aucun signe d’intentions de vote.
En interne, nombreux sont ceux qui doutent que le parti parvienne à rééditer son score de 2019. Certains pensent même que LR passera sous la barre des 5 %, seuil à atteindre pour remporter des sièges. « Bellamy, c’est une grosse berline allemande, mais avec un moteur bridé, sur une pente difficile et avec une vieille caravane rouillée accrochée à l’arrière », représente un cadre du groupe. Une métaphore automobile pour dénoncer les travers du parti dont souffre la tête de liste. « Il a été sciemment tenu à l’écart entre 2022 et 2024. Désormais, il est trop tard pour rattraper ce déficit d’image en quinze jours, cela reste peu connu »poursuit cette source.
Dans les meetings, le candidat se concentre sur les fondamentaux du parti de droite, tout en ciblant le Rassemblement national et le camp présidentiel. Depuis la tribune, il critique la lenteur administrative française, prône « contrôle de nos frontières » et rappelle son combat pour interdire « Publicités de la Commission européenne sur le port du hijab ». « Le macronisme, c’est parler comme la droite à Paris, mais voter comme la gauche à Bruxellesil attaque. Et le RN, c’est la politique de la chaise vide !
Le candidat de 38 ans sait qu’il lui reste encore un atout, pas tapageur, mais pragmatique : l’appartenance de LR au groupe majoritaire au Parlement européen, le Parti populaire européen (PPE). « Nous n’avons pas besoin d’arriver les premiers. Dans dix jours, nous aurons la majorité au Parlement européen et donc à la Commission »promet-il des partisans, en s’appuyant sur un éventuel vote utile. « Nous visons un électorat qui comprend le fonctionnement de l’Union européenne. Nous parions que dans la dernière ligne droite, les électeurs feront un choix raisonnable.»explique Pierre-Henri Dumont, le député du Pas-de-Calais.
Pour les Républicains, il s’agit aussi de limiter les dégâts en attendant des jours meilleurs. « Les rivières retrouveront leur lit une fois la parenthèse Macron refermée », veut croire Thomas Gourlan, président de l’agglomération de Rambouillet. Au-delà du 9 juin, François-Xavier Bellamy nourrit le même espoir : « U« Un jour, nous redeviendrons la majorité dans le pays. »