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Dans les écoles d’ingénieurs, les enseignants, attirés par le privé, manquent

Vous passez à côté d’une révolution aussi importante que celle de l’intelligence artificielle (IA) ? « Impensable dans la formation d’ingénieur aujourd’hui »insiste Nicolas Travers, directeur adjoint du Centre de recherche De Vinci, à l’École d’ingénieurs Léonard-de-Vinci (Esilv). En 2020, l’établissement ouvre une spécialisation data et intelligence artificielle. La difficulté ? Parvenir à attirer des experts qualifiés pour y enseigner. « Quand on ouvre un poste dans l’IA, ça peut prendre quatre à six mois pour le pourvoir »il explique.

Esilv n’est pas un cas particulier. Si certaines écoles refusent de l’admettre pour préserver leur image de marque, en réalité, toutes sont confrontées aux mêmes difficultés. Y compris les plus prestigieux, comme Polytechnique. Cependant, l’école ne ménage aucun effort. « Pour augmenter nos chances, nous publions chaque annonce de recrutement dans les cinq établissements de l’Institut Polytechnique de Paris – qui comprend Polytechnique, Ensta Paris, Ensae Paris, Télécom Paris et Télécom SudParis »explique Dominique Rossin, directrice de l’enseignement et de la recherche à Polytechnique. Le groupe sollicite également activement les chercheurs qui ont exprimé un désir de mobilité.

Chez les jeunes enseignants-chercheurs, la recette fonctionne plutôt bien. « Le nom de X nous aide, tout comme notre implication de longue date dans le domaine de l’IA »assure Dominique Rossin. Ces dernières années, l’école a également ouvert le centre de recherche IA Cluster, ce qui a renforcé sa visibilité dans le monde académique. Cependant, elle peine encore à attirer les profils seniors.

« Le goût de l’enseignement »

Au déclin de l’attractivité des métiers de l’enseignement s’ajoute un autre obstacle : la forte concurrence du secteur privé. Lors du lancement de ChatGPT il y a deux ans, les entreprises ont pris conscience de la puissance de l’IA, du potentiel d’innovation qu’elle représentait, mais aussi de leur manque de compétences internes pour intégrer ces nouveaux outils et en faire un avantage concurrentiel. Depuis, on assiste à une véritable course au marché du travail.

Pour s’assurer les meilleurs profils, les poids lourds de la tech – Amazon, Google et consorts – n’hésitent pas à proposer des offres incroyables. Un jeune chercheur ayant seulement deux ou trois ans d’expérience peut se voir proposer jusqu’à 130 000 euros par an. Impossible pour les écoles de rivaliser. « En tant qu’association loi 1901, nous avons la chance, à Esilv, de ne pas être réglementés par l’Etat en matière de salaires.souligne Nicolas Travers. On peut donc négocier un peu avec les candidats en fonction de leur profil, de leur ancienneté et de la discipline enseignée. Mais notre marge de manœuvre reste limitée. Il faut aussi veiller à ce qu’il y ait une certaine équité entre tous nos enseignants. »

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Ray Richard

Head of technical department in some websites, I have been in the field of electronic journalism for 12 years and I am interested in travel, trips and discovering the world of technology.
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