Dans l’électorat féminin du RN, la tromperie a payé – Libération

Comment expliquer le vote croissant des femmes pour un parti qui a toujours joué contre leurs intérêts ? Dans le bassin minier du Pas-de-Calais, où le RN a obtenu jusqu’à 70 % des voix au premier tour des législatives, les électrices voient l’extrême droite comme un remède aux fins de mois difficiles sans se soucier de l’aspect sociétal du projet lepéniste.

« Traditionnelle distribution de roses offertes par la municipalité ce matin sur le marché de Bruay-la-Buissière pour la fête des mères ! Un bonheur de voir vos sourires. Bonne fête à toutes les mamans ! » Sur la page Facebook de Ludovic Pajot, le message est enthousiaste, les commentaires élogieux. Le 26 mai dernier, le maire RN de cette petite ville minière du Pas-de-Calais, 22 000 habitants, distribuait une quantité de fleurs aux mères de famille. A la mairie depuis 2020, Ludovic Pajot « fait des choses qui sont vues », comme le dit Véronique Laurent, coordonnatrice de la Maison des échanges.

Claudine, 70 ans, habituée de cette association locale de solidarité, a reçu deux roses le 26 mai. L’initiative la ravit, comme tout ce que fait le maire. A trois jours du premier tour des législatives, la retraitée hésite avant de révéler son vote RN. Les mains sur la toile cirée, après un goûter typiquement nordiste composé de café et de gaufres, elle parle de son vote sur un ton féministe : « On nous a donné le droit de vote : je suppose. » Revendique son indépendance : « Nous n’écoutons pas les maris. » Alors la fille de ce mineur polonais fixe son regard bleu royal sur le nôtre et dit : « Nous aimerions du changement. » Elle n’est pas la seule à soutenir le RN. Bruay-la-Buissière a voté à 66,91% pour son candidat, Thierry Frappé,