Dans le Puy-de-Dôme, l'extinction absurde d'une usine d'éclairage LED – Libération
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Dans le Puy-de-Dôme, l’extinction absurde d’une usine d’éclairage LED – Libération

Dans le Puy-de-Dôme, l’extinction absurde d’une usine d’éclairage LED – Libération
Dans les Combrailles, 102 salariés, dont de nombreuses femmes, vont perdre leur emploi lors de la liquidation de la Manufacture des Lumières (anciennement Dietal). Vendredi, ils ont organisé une journée d’action, marquée par le contexte des élections législatives et les enjeux de la réindustrialisation.

Vendredi 21 juin, les salariés de la Manufacture des Lumières à Saint-Georges-de-Mons (Puy-de-Dôme) ont organisé, avec l’aide de la CGT, une journée pour dénoncer la liquidation judiciaire de leur entreprise. La fermeture de l’entreprise, qui produit depuis quarante ans des luminaires pour espaces publics, laisse derrière elle 102 familles. Neuf jours avant les élections législatives, les travailleurs ont interpellé les acteurs politiques locaux sur la désindustrialisation de leur région, les Combrailles. De nombreux anciens collègues sont venus témoigner leur soutien, à l’instar des maires du bassin d’emploi.

« Il est scandaleux que le prêt demandé à la BPI n’ait pas pu être accordé. »

— Boris Bouchet, conseiller régional communiste Auvergne-Rhône-Alpes

« Nous avons arrêté la production mardi, seul le côté administratif continue de fonctionner » » raconte Laurence, 55 ans avec trente ans de boîte, les mains enfoncées au fond de ses poches. Nous sommes à pied d’œuvre dans les Combrailles. Cette industrie permettait aux femmes (70 % de la population active), dans une zone rurale et industrielle, de gagner leur vie même si les salaires avoisinent majoritairement le Smic hors prime d’ancienneté. La Manufacture des Lumières, anciennement Dietal, a subi des vagues successives de licenciements et de délocalisations progressives d’activité. « J’ai vu cette usine se créer, je l’ai vue aussi se débattre longtemps avec plusieurs PSE. Dietal employait jusqu’à 600 personnes », témoigne Christine Pirès-Beaune, députée sortante, originaire de Saint-Georges, candidate du Nouveau Front populaire dans la circonscription. Beaucoup de travailleurs ont plus de 50 ans et vivent dans un rayon proche, sans transports en commun quotidiens pour les transporter vers les bassins d’emploi de Riom ou de Clermont-Ferrand. « Psychologiquement, c’est très dur » note l’ancien député, qui souligne que « La réforme de l’assurance chômage pour certaines femmes et hommes de plus de 60 ans va s’avérer catastrophique ! »

Aurélie, 45 ans dont vingt-quatre ans d’usine, s’indigne : « Nous avons découvert par email qu’il n’y avait aucun acheteur. » Odeli, petit fabricant d’éclairage LED à Issoire, a retiré sa demande soixante-douze heures avant la décision du tribunal. La solidité de son projet était conditionnée à l’acceptation de deux prêts bancaires de BPI France et de la Société Générale. Ils n’ont pas été validés. Boris Bouchet, conseiller régional communiste Auvergne-Rhône-Alpes, s’agace : « Il est scandaleux que le prêt demandé à la BPI n’ait pas pu être accordé. » Il regrette qu’une grande partie de l’argent public ait été versé par l’Etat, la Région, « sans conditions ni garanties ».

« Un gouvernement qui dit vouloir réindustrialiser, qui parle de souveraineté industrielle, de rénovation énergétique, mais qui permet à cette entreprise de fermer alors que l’éclairage LED est un des moyens les plus rapides à mettre en place pour économiser l’énergie ! Les salariés ne peuvent plus se retrouver dans cette politique.»

— Anthony Vedeau, délégué syndical CGT

La rancune est alimentée par la gestion énigmatique de l’ancien directeur, accusé par la CGT de s’être accordé « un salaire surdimensionné par rapport à la taille de cette entreprise ». Christelle, 52 ans dont trente-deux ans dans l’entreprise, murmure : «C’est exaspérant. On vient d’apprendre qu’il y avait 5,7 millions de dettes. Pourtant, ce n’est pas quelque chose qu’on découvre du jour au lendemain ! Les salariés se demandent s’il y avait vraiment une volonté de poursuivre l’activité ou si l’entreprise a été utilisée comme un simple outil financier poussé au maximum. « Ce n’est qu’en mars 2024 qu’il a été annoncé au CSE que l’entreprise connaissait des difficultés depuis trois ans. Pourquoi avons-nous maintenu des dépenses de fonctionnement injustifiées dans une telle situation ? demande Frederik Duplessis, l’avocat du CST.

Le contexte politique alimente la colère. Anthony Vedeau, délégué syndical CGT, s’emporte : « Un gouvernement qui dit vouloir réindustrialiser, qui parle de souveraineté industrielle, de rénovation énergétique, mais qui permet à cette entreprise de fermer alors que l’éclairage LED est un des moyens les plus rapides à mettre en place pour économiser l’énergie ! Les salariés ne peuvent plus se retrouver dans cette politique.» Une dizaine d’ouvriers enveloppés dans des gilets noirs aux couleurs de la Manufacture des Lumières, serrés les uns contre les autres, fument une dernière cigarette sous la pluie. « Je connais mes convictions politiques, la situation me confirme que je fais le bon choix. » assure l’un des plus jeunes. Derrière, des petits cercueils métalliques et les prénoms des salariés décorent les portes de l’usine qui ferme.

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