Dans l’actualité : disparitions à répétition en Guinée
La liste est longue. Journalistes, militants des droits de l’homme, militants pro-démocratie et même manifestants militaires : les voix dissidentes sont réduites au silence ou, pire, disparaissent.
Dernier cas en date : on est sans nouvelles depuis le 9 juillet de deux figures du Front national pour la défense de la Constitution (FNDC), un mouvement de la société civile critique envers la junte au pouvoir dirigée par le général Mamadi Doumbouya. Il s’agit d’Oumar Sylla – plus connu sous le nom de Foniké Mengué – et de Mamadou Billo Bah. Deux militaires sont également portés disparus : le colonel Cécé Célestin Bilivogui et le sergent-chef Moussa Cheikh Soumah.
La justice guinéenne a exprimé mercredi 17 juillet sa préoccupation et annoncé l’ouverture d’une enquête. Dans un communiqué largement diffusé par la presse, notamment par le site Aminatale procureur général Fallou Doumbouya, affirme ne pas savoir » ni l’identité des personnes qui ont enlevé les deux dirigeants du FNDC et les deux militaires, ni leur lieu de détention » Le magistrat déclare également que » Ces disparitions altèrent la sérénité nationale, créent une psychose et un sentiment d’insécurité au sein de la population et portent gravement atteinte à l’image de la Guinée tant au niveau national qu’international. « .
Entre les mains de l’armée ?
Selon Le Monde Afriqueles deux militants seraient aux mains de l’armée… Le Monde Afrique qui s’appuie sur le témoignage d’Abdoulaye Oumou Sow, responsable de la communication du FNDC, » Oumar Sylla et Mamadou Billo Bah ont d’abord été conduits à la Direction centrale des investigations judiciaires de la gendarmerie de Conakry, puis dans un camp militaire de l’île de Kassa, au large de la capitale. (…) Pour Abdoulaye Oumou Sow, l’objectif de la junte est clair : «de rester au pouvoir le plus longtemps possible en muselant la société civile, les médias et toute voix dissidente au sein de l’armée« . Et pour rappeler la mort en détention, en juin, « dans des circonstances mystérieuses« , du général Sadiba Koulibaly, l’ancien chef d’état-major de l’armée et ancien numéro deux de la junte. Il avait été condamné à cinq ans de prison pour « désertion et possession illégale d’armes« . »
Il y a une semaine, continue Le Monde Afrique » Le député sénégalais Guy Marius Sagna a directement interpellé la délégation guinéenne au Parlement de la CEDEAO : «On parle d’au moins 47 morts (…) Avons-nous puni les personnes qui ont commis ces crimes ? Parce que si nous ne les punissons pas, vous qui êtes assis ici, frères et sœurs de Guinée, vous êtes en sursis« . Une intervention qui n’a pas manqué de provoquer une réaction du ministre guinéen des Transports et porte-parole du gouvernement, Ousmane Gaoual Diallo, qui a qualifié ces propos de « inacceptable« et portant »attaque contre les institutions du pays« . »
Des pressions de toutes parts
En tout cas, la pression augmente à l’intérieur comme à l’extérieur du pays : mardi 16 juillet, des rapports à nouveau Le Monde Afrique » Les avocats du barreau guinéen ont entamé une grève de deux semaines contre «arrestations arbitraires« Leur préavis de grève court jusqu’au 31 juillet, date à laquelle le tribunal de Conakry doit rendre son jugement dans le procès du massacre du 28 septembre 2009. »
Et puis « Dans une déclaration commune, plusieurs organisations de la société civile ouest-africaine, dont Y’en a marre, AfricTivistes et Article 19, dénoncent les arrestations arbitraires et les atteintes aux libertés fondamentales en Guinée. (…) Enfin, Jean-Luc Mélenchon, le leader de La France Insoumise, a appelé à l’intervention de l’EÉtat français, « fortement impliqué dans le pouvoir en place« en Guinée », dit-il, « afin d’obtenir leur libération. »
Avertissement à Doumbouya…
Au Burkina Faso, la vie quotidienne Le pays n’épargne pas ses critiques à l’encontre de la junte guinéenne et de son chef : » Mamadi Doumbouya, arrivé comme un messie après avoir mis fin au troisième mandat d’Alpha Condé, brise lentement mais sûrement le capital de sympathie dont il jouissait auprès de ses compatriotes. Et cela devrait constituer pour lui un avertissement quand on sait que la scène politique guinéenne est l’une des plus incandescentes du continent. C’est dire que le général danse sur un volcan dont l’éruption peut être aussi surprenante que meurtrière. C’est en raison de ce risque élevé que Doumbouya devrait se dépêcher de trouver les moyens d’apaiser le climat sociopolitique (…). Car, affirme toujours Le Pays, contrairement à d’autres pays de la sous-région dirigés par des puissances militaires et qui luttent contre l’hydre terroriste, la Guinée ne peut se prévaloir d’aucun argument solide pour végéter, indéfiniment, dans une transition qui n’a plus de boussole. »