critique Mad Marx sur Arte
Course de maître PC
Une fois n’est pas coutume, la comparaison n’est pas un simple effet d’annonce. Dès le premier épisode, une mystérieuse héroïne (Margot Bancilhon) enfile une salopette de travail floquée aux couleurs de Bruce Lee dans Le jeu de la mort, comme La Mariée dans le film de Tarantino. Quant aux thèmes marxistes, ils sont cités dans le texte par un ex-héroïnomane converti au bon mot rouge (Joey Starr). Lorsque le premier, en fuite, trouve un emploi dans la même usine que le second, ils deviennent amis. Leur duo s’opposera à la délocalisation de la production et mettra en pratique la lutte des classes à son échelle.
L’objectif affiché est clair : aborder les préceptes de Karl Marx à travers le prisme de la pop culture. Un postulat qui comporte son lot d’incohérences idéologiques (même si certains considèrent l’imaginaire hollywoodien comme l’étape terminale du radicalisme de gauche), mais qui rend l’ensemble plutôt divertissant. Le conflit entre la bande d’ouvriers et le grand patron coréen et son armée de chiens de garde prend ainsi des proportions aussi artificielles qu’amusantes, surtout après le grand tournant de l’intrigue, à mi-parcours.
Juge Dreads
Les scénaristes tournent vite le dos à toute forme de justesse habituellement revendiquée par le cinéma social et entassent les rebondissements, les grands discours et les grosses bagarres, jusqu’à un climax qui franchit allègrement les limites du plausible, le tout dans un style directement inspiré de John Wick 3. En fait moins hypocrite que certains ouvrages sur le même sujet, Machine assume son manichéisme, ses dialogues de série B (les punchlines insérées au forceps), ses emprunts au cinéma mainstream et défend finalement la révolution à coups de poing, quitte à taquiner assez vicieusement les grands syndicats. Une perspective discutable, mais qui a le mérite d’éviter la traditionnelle défense du statu quo.
Devons-nous faire une petite séparation ?
Cette machine tue toujours les fascistes
Machine mets ton pied dans le plat. Ou plus souvent en face, pour paraphraser un grand homme 100 % communiste. La star de la série est la gauche en direct de Margot Bancilhon, un mélomane éclectique qui fait exploser de la musique capitaliste sur K. Maro et Chemical Brothers. L’actrice s’est entraînée pendant 6 mois et dit avoir réalisé ses propres cascades. Il faut reconnaître que la demi-douzaine de séquences de combat comportent des chorégraphies généreuses, issues d’un amour sincère pour le cinéma d’arts martiaux, rarissime pour le moins sur le petit écran.
Le visage du capital
Le tout peut donc être suivi sans déplaisir, à condition d’évacuer la question qui conditionne tous les travaux de ce type : peut-on vraiment simplifier à ce point un mécanisme social et politique, surtout à l’heure actuelle ? Car pour tenir en haleine le plus large public possible, la série caricature la quasi-totalité de ses personnages, antagonistes… et protagonistes. L’ancien toxicomane repenti, le blogueur conspirateur-gilet jaune et la femme maltraitée par un mari alcoolique forment la galerie traditionnelle des prolétaires unilatéraux. Pas sûr que les Français qu’ils sont censés représenter en aient vraiment besoin.
La question ayant été débattue par les critiques depuis des décennies, ce n’est pas en bref sur 6 épisodes finalement très anecdotiques que nous allons la résoudre. C’est au public de décider.
Tous les épisodes de Machine sont disponibles sur Arte.tv