Gauche, centre ou droite. D’où que vienne le prochain gouvernement, il n’échappera pas à un resserrement budgétaire historique. Ce point de vue de Pierre Moscovici, premier président de la Cour des comptes, est largement partagé dans le monde politique et des affaires, et même dans l’opinion publique. Mais chut ! L’état catastrophique des finances publiques n’est guère évoqué au sein du NFP (Nouveau Front populaire) ni entre les différentes composantes de la droite et du centre dans les négociations.
Le risque d’une France ingouvernable et insolvable
Avec l’immigration et l’ordre, elle est pourtant au cœur du sujet. Le déficit public a encore glissé de plus de 58 milliards, au premier semestre. La dette dépasse déjà les 3 100 milliards. Il nous en coûtera bientôt 70 milliards pour payer les intérêts. Une pure folie au vu des enjeux cruciaux auxquels nous devons faire face : décarbonation, intelligence artificielle (IA), réindustrialisation, défense, éducation… « Nous avons construit un monde de dépenses palliatives plutôt que productives. Ce modèle est à bout de souffle. » Cette prophétie d’Emmanuel Macron remonte à 2016. Elle n’a jamais été aussi vraie. Et, après trois consultations électorales, le risque est celui d’une France ingouvernable et insolvable.
Ne comptons pas sur la croissance : contrairement à ce qu’affirme Bruno Le Maire, elle serait à peine de 1 % cette année. A peine mieux en 2025. Deuxième certitude, celui qui héritera du poids de la dette et des déficits devra se convaincre que la réduction de la dette n’est pas une mode idéologique mais la seule façon de reconstruire une marge de manœuvre pour l’action publique. Après le 11 septembre, les subprimes et la pandémie, la relance keynésienne a profité à la redistribution. Elle a accru la dette. Sans améliorer la productivité ni la compétitivité. Et si le pays bénéficie encore de la planche à billets de la BCE à Francfort, c’est la fin d’un cycle.
Notre dépendance nous rend fragiles
La France, lanterne rouge des déficits, scrutée par les agences, les marchés, l’Europe, est dos au mur. Le RN est rentré dans le rang, le risque de rupture avec l’économie ouverte, l’Europe, voire l’alliance contre la Russie a disparu. A l’autre bout, le PFN, qui fustige la dérive de la dette sous Macron, prévoit 150 milliards de dépenses supplémentaires. Implosif pour la croissance, l’investissement, l’emploi, c’est la promesse démagogique d’un nouveau soutien à la redistribution et à la consommation alors que notre pays ne produit qu’un tiers de ses besoins industriels. Exemple du projet, la retraite à 60 ans est une bombe à retardement financière.
Nous sommes sous le coup d’une procédure pour déficits excessifs à Bruxelles. Incapable d’éviter une tragédie budgétaire, la France ne serait pas toujours sauvée par la BCE et l’Europe de l’euro, qu’elle exposerait à un risque systémique.
Notre dépendance nous fragilise. Les investisseurs étrangers, en l’occurrence, détiennent plus de la moitié de notre dette négociable (source Ifrap). Nous sommes soumis à une procédure pour déficits excessifs à Bruxelles. Incapable d’éviter une tragédie budgétaire, la France ne serait pas toujours sauvée par la BCE et l’Europe de l’euro, qu’elle exposerait à un risque systémique.
Macron l’Européen n’en a cure. Comme ses prédécesseurs, il a continué à inonder un pays accro à la dépense publique. Stratosphérique, elle culmine à 57 % du PIB, contre 49,4 % dans l’Union européenne. Dans ce domaine, son attitude du « quoi qu’il en coûte » a fini de convaincre les Français que l’État avait des ressources infinies. Les facilités post-covid pour les commerçants, les entreprises et les salariés étaient certes opportunes. Mais personne n’a réalisé qu’il s’agirait de rembourser. Ni même que le plan de relance arraché à l’Allemagne de Merkel était un « one shot ».
A l’heure actuelle, le débat n’est pas tranché entre le maintien de la politique de l’offre de Macron et le financement de la demande à crédit. Entre libéraux et keynésiens purs et durs. Il faudra trouver 50 milliards d’économies sur deux ans ou, à défaut, augmenter les recettes pour éviter que le déficit ne dépasse à nouveau 5 % l’an prochain, et nous projeter vers une crise de la dette et l’incursion du FMI… Choisir entre le grand retour des impôts ou la baisse des dépenses sociales. La peste et le choléra. Depuis Matignon, qui prendra les choses en main ?