Le Covid-19 a contaminé une grande partie de l’humanité, provoquant plusieurs millions de décès, la plupart dans les premières années de la pandémie. Pourtant, un nombre indéfinissable de personnes ne sont jamais tombées malades. Bien qu’elles aient été en contact avec des « covid », elles n’ont jamais signalé de symptômes.
Ces cas restent un mystère qu’une nouvelle étude scientifique, publiée dans la revue Nature, vient d’éclaircir. Une équipe internationale
a permis d’établir une chronologie de la réaction de l’organisme à l’exposition au virus du covid-19. Elle met notamment en évidence des réponses immunitaires qualifiées d' »inédites », qui protègent mieux les personnes concernées.
Patients volontaires
Pour parvenir à ce résultat, les scientifiques ont inoculé le virus par le nez à une petite cohorte de 36 jeunes adultes volontaires, constituée de juin à août 2021. Tous décrits comme sains, afin de réduire le risque de forme grave. Les sujets de l’étude n’avaient aucun antécédent de contamination ou de vaccination.
Les chercheurs ont ensuite pu effectuer un suivi très détaillé de la muqueuse nasale et du sang chez 16 de ces patients. Ils ont pu suivre l’activité des cellules immunitaires grâce à une technique qui permet d’analyser l’information génétique au niveau d’une seule cellule. Les scientifiques ont pu recueillir des données pour plus de 600 000 d’entre elles.
« Cette étude est vraiment intéressante car elle apporte des informations très détaillées d’un point de vue virologique et immunologique. Et son avantage, par rapport à des travaux plus classiques, c’est que le jour et l’heure précis de l’infection sont connus : on a pu contrôler tous les paramètres depuis la veille de l’infection et jusqu’à 14 jours après », commente au Télégramme Olivier Schwartz, responsable de l’unité virus et immunité à l’Institut Pasteur.
Un gène particulier activé
L’étude met en évidence des réponses immunitaires très spécifiques selon les patients, entre ceux qui ont connu des infections longues et transitoires (inefficaces malgré la présence de virus) ou des infections abortives, c’est-à-dire sans traces visibles. « Les auteurs de l’étude ont détecté une activation de l’immunité innée entre un et deux jours après l’infection et elle était surtout visible, de manière surprenante, au niveau sanguin, avant de l’être au niveau de la muqueuse nasale », note Olivier Schwartz.
L’infiltration de différents types de globules blancs s’est également produite plus rapidement chez les personnes ayant subi une infection transitoire, par rapport à celles infectées pendant une période plus longue, « comme si le système immunitaire était plus rapidement sur le lieu de l’infection et était capable de le nettoyer plus efficacement », note le virologue.
Autre observation faite chez les non infectés : un gène d’immunité particulier s’exprimait la veille de l’inoculation du virus. « On ne sait pas s’il s’agit de quelque chose de permanent chez ces personnes ou d’un état favorable lié à une infection antérieure ou autre chose », s’interroge Olivier Schwartz.
En tout cas, ces travaux semblent prometteurs : dans un communiqué, Marko Nikoli, l’auteur principal, estime que « nous avons désormais une meilleure compréhension de toutes les réponses immunitaires, ce qui pourrait servir de base au développement de traitements et de vaccins potentiels imitant ces réponses protectrices naturelles ».
* Wellcome Sanger Institute, University College London (UCL), Imperial College London et Netherlands Cancer Institute.