Covid-19, infections sexuellement transmissibles, dengue… On vous explique pourquoi ces maladies sont surveillées par les autorités
Alors que des millions de visiteurs sont attendus durant les Jeux olympiques et paralympiques jusqu’au début septembre, les autorités sanitaires surveillent de près certaines maladies, comme le Covid-19 et celles transmises par le moustique tigre.
Un événement planétaire et des chiffres vertigineux. Du vendredi 26 juillet au dimanche 11 août, puis du mercredi 28 août au dimanche 8 septembre, les Jeux olympiques et paralympiques de Paris attireront plus de 15 millions de visiteurs, dont près de 2 millions d’étrangers, selon les projections de l’office de tourisme de la capitale. (PDF)Sans compter les milliers de sportifs, accompagnés de leur staff, et les quelque 20 000 journalistes étrangers qui seront également sur place, selon les estimations de Santé publique France (SPF).
Si ces mouvements de population sont censés être positifs pour l’économie française, ils sont scrutés de près par les autorités sanitaires qui craignent une résurgence de certaines maladies, comme le Covid-19 ou la coqueluche, en hausse partout en Europe. Ou encore des maladies transmises par le moustique tigre, très présent en Ile-de-France, et des infections sexuellement transmissibles (IST). L’Unité d’intervention biologique d’urgence (Cibu) de l’Institut Pasteur se prépare par exemple depuis des mois à « diagnostiquer une gamme de virus et de bactéries beaucoup plus large que d’habitude »explique son directeur, Jean-Claude Manuguerra, à France 3 Paris-Ile-de-France.
Pourquoi les autorités sanitaires développent-elles de tels dispositifs ? « A ce jour, il n’y a pas de motif d’inquiétude ni de signe d’alerte particulier »écrit Marie Bâville dans un article, Sous-directeur de la surveillance et de la sécurité sanitaire à la direction générale de la santé et responsable du centre de crise sanitaire de l’Inserm. Mais il faut « faire attention » Et « se préparer à toutes les éventualités car le mélange de milliers d’individus pourrait favoriser les transmissions ». À commencer par le Covid-19, en forte hausse depuis le début de l’été. Après la tenue sous confinement des Jeux olympiques de Tokyo en août 2021, athlètes et organisateurs craignent que la maladie ne perturbe à nouveau la compétition, obligeant certains à déclarer forfait en cas de contamination. Plusieurs athlètes ont été contraints de déclarer forfait lors d’événements sportifs ces derniers mois, comme le Critérium du Dauphiné, le Tour de France ou les Championnats de France d’athlétisme. La Fédération française de judo a également dû écourter un stage de préparation au Creps de Montpellier, moins de 20 jours avant le début des épreuves.
Le Sars-CoV-2 n’inquiète pas que les sportifs. Début juin, Santé publique France (SPF) a enregistré, sur une semaine, une hausse de 52 % des passages aux urgences et de 51 % des appels à SOS Médecins (1 507 interventions du 3 au 10 juin) à cause du virus. « Moins de 50 jours avant les Jeux Olympiques »l’infectiologue Benjamin Davido s’inquiétait sur franceinfo que la population ait « on a perdu le réflexe, quand on est malade, de se masquer, et tout simplement de se faire tester pour éviter de contaminer les gens et de créer des clusters ».
Et même si SPF note une stabilisation de la circulation du virus début juillet, avec une « impact modéré sur le système de santé »le nombre important de visiteurs attendus pour les Jeux de Paris appelle à la vigilance. « On est loin des pics de l’an dernier, mais avec les JO, les rassemblements pourraient provoquer un léger rebond de l’épidémie »prévient le journaliste et médecin Damien Mascret. « Le seul risque réel serait l’émergence d’un nouveau variant pour lequel notre immunité serait naïve ou affaiblie. Mais pour l’instant, nous sommes toujours dans des variants d’Omicron »Il poursuit. Or, au 26 juin, seulement 25,2% des personnes de plus de 60 ans avaient reçu une dose de rappel de vaccin adapté à cette variante du Covid-19, selon SPF.
Outre les maladies respiratoires, les autorités sanitaires s’inquiètent également de la prolifération des arboviroses, des maladies comme la dengue, le zika ou le chikungunya. Elles se transmettent d’homme à homme via les piqûres du moustique tigre, présent partout en France. Par ailleurs, le premier cas autochtone de dengue, c’est-à-dire une personne ayant contracté le virus sans avoir auparavant voyagé dans une zone à risque, a été détecté dans l’Hérault le 8 juillet. « Le malade a été pris en charge et son état de santé ne donne pas lieu à inquiétude »a indiqué l’ARS, précisant qu’elle avait déployé « actions préventives » Pour « prévenir la propagation du virus localement ».
Comment la situation va-t-elle évoluer avec l’arrivée de milliers de touristes en provenance de zones à risque ? Mi-avril, les autorités sanitaires ont alerté sur une situation « inédit » Le ministère de la Santé a mis en garde contre une recrudescence des cas importés en France métropolitaine, liés à une flambée de dengue dans les Amériques et les Caraïbes, et appelé à une vigilance accrue à l’approche des Jeux olympiques, propices au brassage des populations. Du 1er janvier au 30 avril, 2.166 cas importés de dengue ont été recensés en France métropolitaine, contre une moyenne de 128 cas sur la même période au cours des cinq années précédentes, selon les données publiées fin juin. Le record de 2023 de cas importés (2.019) a ainsi été battu en quatre mois. « Je ne sais pas quelle proportion de personnes atteintes d’arbovirus seront présentes aux Jeux, mais leur temps de vacances sera très court », ce qui permettra de limiter les risques de propagation très rapide de la maladie, rassure l’épidémiologiste Yves Buisson. Ces vigilances renforcées ont aussi un rôle préventif pour les soignants et le grand public.
« Si nous détectons rapidement les premiers cas, nous serons en mesure de réagir. »
Yves Buisson, épidémiologisteà franceinfo
Cette réactivité permet ainsi de limiter la propagation du virus. D’une part, en informant les médecins des risques de rencontrer ces maladies inhabituelles en Ile-de-France, afin qu’ils puissent correctement orienter les patients et être attentifs aux signaux faibles, ces symptômes communs à de nombreuses maladies comme la fièvre, les éruptions cutanées, les nausées et les vomissements. D’autre part, en utilisant des répulsifs, en demandant aux personnes présentes sur les lieux de l’infection de porter des manches longues et aux riverains de vider les eaux stagnantes. Pour limiter le risque épidémique, des opérations de démoustication ont également été mises en place en Ile-de-France.
La prévention est également particulièrement nécessaire pour les infections sexuellement transmissibles (IST). « Il n’est pas exclu que dans ce contexte d’échanges, il y ait davantage de relations sexuelles impromptues et non protégées »prévient Dominique Costagliola, directeur de recherche émérite à l’Inserm, sur le site de l’institution. Même si ce risque demeure « difficile à évaluer » en raison du manque de connaissance des profils des visiteurs, « Il faudra se préparer à l’éventualité d’une augmentation des situations d’urgence pour les prescriptions de traitements post-exposition contre le VIH ou de dépistage des infections sexuellement transmissibles »Elle ajoute.
Du côté des athlètes, plus de 200.000 préservatifs masculins, 20.000 préservatifs féminins et 10.000 « digues buccales » seront distribués au village olympique, a annoncé le comité d’organisation des Jeux (Cojop). « Une campagne de sensibilisation sera déployée au sein de la polyclinique des Jeux »promet le comité Paris 2024 à Sidaction, qui ajoute que « Des tests de dépistage, principalement pour le VIH, seront effectués et (que)un soutien peut être initié si nécessaire ».
Côté spectateurs, Santé publique France a mis à disposition plusieurs affiches concernant la santé sexuelle, à destination des publics francophones et non francophones. L’agence sanitaire a également rediffusé une campagne d’information sur la santé sexuelle, entre le 21 mai et le 9 juin, mais elle est uniquement rédigée en français et ne concerne pas spécifiquement la période des Jeux. Pour Damien Mascret, « Les touristes et les sportifs doivent être informés des risques liés aux maladies sexuellement transmissibles et des services gratuits dont ils peuvent bénéficier. »