« Convaincre pour conquérir »répète l’activiste Oslainer Hernandez, au milieu d’une mission « 1 sur 10 », une campagne de terrain menée par des militants du pouvoir vénézuélien, chargés de persuader dix personnes chacune de voter dimanche pour le président Nicolas Maduro, en quête d’un troisième mandat.
Dans l’autre camp, Monik Bule propose de transporter des personnes qui promettent de voter pour le candidat de l’opposition, Edmundo Gonzalez Urrutia, lors de cette élection tendue qui pourrait s’avérer serrée.
Jusqu’au dernier moment, les deux camps cherchent à convaincre les électeurs.
Oslainer Hernandez, 41 ans, dirigeant local du Parti socialiste unifié du Venezuela (PSUV) dont M. Maduro est le président, vit à Maracaibo, une ville traditionnellement d’opposition.
« Nous convainquons »elle explique. « De l’humilité avant tout, beaucoup d’humilité, et se mettre à la place de la personne que l’on cherche à convaincre. ».
« Il s’agit d’essayer de résoudre (leurs problèmes) avec les outils dont nous disposons, car les gens aiment qu’on prenne soin d’eux. »elle poursuit, sans rien révéler des électeurs qu’elle a réussi à recruter.
Dans le cadre de la mission « 1 sur 10 », chaque militant doit recruter au moins un nouveau jeune électeur et un ancien opposant.
Le système électoral de 2024 est « l’élection la plus organisée et la plus puissante des 30 dernières années. Nous en avons remporté 28 »M. Maduro s’est félicité lors d’un meeting de campagne.
Les experts s’interrogent toutefois sur la solidité et l’efficacité de ce système au profit d’un président empêtré dans une crise économique dont le pays peine à sortir.
« Il n’existe aucune donnée publique permettant de savoir s’ils (le gouvernement) ont mobilisé leur +armée électorale+ »+, a déclaré à l’AFP Oswaldo Ramirez d’ORC Consultores. « Il est difficile de réaliser quelque chose d’aussi ambitieux que 10 personnes »il croit.
Le sociologue Hector Briceño décrit le PSUV comme « un parti avec beaucoup d’argent, avec beaucoup de ressources, mais qui fait face à une grande insatisfaction interne »en raison de la crise économique dans laquelle le pays est tombé.
« L’électorat du chavisme (la doctrine d’Hugo Chavez, dont Maduro est l’héritier) est bouleversé et déçu, tout comme la direction intermédiaire (…) Cela affectera la mobilisation elle-même »il analyse.
L’opposition accuse le gouvernement de chercher à sécuriser les électeurs en distribuant des sacs de nourriture, de matériel médical ou de médicaments.
Mais les dirigeants de la communauté chaviste ont déclaré à l’AFP qu’ils n’avaient pas suffisamment de ressources à proposer pour convaincre les gens de voter pour eux.
une moto
L’opposition, qui tente de mettre fin à 25 ans de pouvoir chaviste, compte sur la mobilisation spontanée, convaincue que le mécontentement jouera en sa faveur.
« Je l’ai vu : des gens qui étaient pro-gouvernementaux rejoignent le mouvement parce que la réalité actuelle ne correspond tout simplement pas à leurs attentes. »explique Mme Bule, qui votera pour Edmundo Gonzalez Urrutia, qui remplace la charismatique leader de l’opposition Maria Corina Machado, déclarée inéligible.
Architecte de profession, Mme Bule, 40 ans, qui ne se décrit pas comme une militante, transporte les électeurs de l’opposition sur sa moto depuis 2015.
Cette année, elle s’est glissée dans le système « Le 28, je t’emmène »une campagne d’opposition visant à fournir des transports aux électeurs pour qu’ils puissent voter, la participation étant considérée comme essentielle cette année.
« Si vous avez une moto, une voiture, un bus ou un camion, vous pouvez emmener un voisin ou une connaissance »a expliqué Maria Corina Machado en faisant la promotion de l’initiative.
« C’est une belle campagne car elle montre (…) la conscience des Vénézuéliens qu’il s’agit d’une cause commune »elle a salué.
Une électrice a déjà réservé la moto de Mme Bule : une jeune fille de 19 ans qui votera pour la première fois dans une école loin de chez elle.
L’opposition a également mis en place « commanditos »de petits groupes qui apporteront de la nourriture aux électeurs qui attendent dans la file et observeront également les bureaux de vote en plus des scrutateurs officiels de l’opposition.
Le sociologue Hector Briceño souligne que la capacité des partis d’opposition ne doit pas être sous-estimée. « Ils savent comment organiser des élections, ils savent comment rivaliser avec des ressources limitées, ils savent comment s’organiser pour participer, surtout dans les grandes villes. ».
Monik Bule est optimiste : « Nous n’avons rien à perdre. Nous sommes convaincus que si la participation est massive, nous réussirons. ».
Oslainer Hernandez dit qu’il est « serein »: « Je suis sûr que nous gagnerons le 28 juillet, je n’ai aucun doute ».