Nouveau revers pour le gouvernement. L’un des articles du projet de loi de finances pour 2025 prévoit de reporter de trois ans la suppression de la contribution sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE). Une mesure censée rapporter 1,1 milliard d’euros de recettes à l’Etat. Mais un amendement du président de la commission des Finances Éric Coquerel (LFI), soutenu par l’ensemble du Nouveau Front populaire, est allé au-delà de ce simple report. Il prévoit ainsi un rétablissement progressif de la CVAE, dans un premier temps pour les entreprises réalisant un chiffre d’affaires supérieur à un milliard d’euros.
Pour Eric Coquerel, la suppression progressive de la CVAE est un « Un cadeau fiscal qui pèse sur le budget de l’État » sans » aucune justification économique » et qui « profite principalement aux grandes entreprises « .
Le ministre du Budget Laurent Saint-Martin a estimé que ce n’était pas nécessaire » briser l’ambition de supprimer définitivement la CVAE « , Et « renvoyez ce signal « . Même si la nécessité de redresser les comptes publics le justifie » un nouveau parcours plus patient « .
118 voix contre 115
L’amendement qui réécrit l’article a été approuvé de justesse par 118 voix contre 115, les voix du Rassemblement national se mêlant à celles des groupes gouvernementaux clairsemés, pour tenter de contrer la gauche.
» La gauche vient d’augmenter les impôts sur la production de 10 milliards alors qu’on a déjà des records de faillites ! Les Français doivent voir le SABOTAGE du budget par les macronistes et la droite dont les rangs sont VIDE pour donner la victoire aux Insoumis », a réagi sur X (ex-Twitter) le député RN Jean-Philippe Tanguy.
Le RN critiqué
Dans l’hémicycle, le RN a été fréquemment la cible de critiques de la gauche comme du camp gouvernemental, en raison d’une ligne jugée floue sur la fiscalité des entreprises.
La présidente du groupe écologiste, Cyrielle Chatelain, a accusé le RN d’être le « béquille » du gouvernement en assurant « garde le week-end « .
« Nous sommes habitués à ce que le programme économique du Rassemblement national change tous les trois mois, généralement d’ailleurs au rythme des entretiens avec (son président) Jordan Bardella. Mais finalement, là, visiblement, le programme n’est pas encore stabilisé », a ironisé le député David Amiel (Ensemble pour la République, ex-Renaissance).
Tandis que le député Ensemble pour la République (EPR, Ex-Renaissance) Charles Sitzenstuhl invitait le groupe présidé par Marine Le Pen à tenir une « réunion de groupe » pour résoudre ses supposées contradictions internes, entre soutien aux entreprises et hausse de la fiscalité. Les députés avaient précédemment rejeté les amendements visant à supprimer l’article, dont celui déposé par Jean-Philippe Tanguy, exigeant que le gouvernement respecte la promesse faite aux entreprises. Des membres des groupes LR et EPR ont également réclamé cette suppression.
Le Rassemblement National a accusé les groupes soutenant le gouvernement de se livrer à « opération de sabotage (…) du budget par leur absence « .
Défaites du gouvernement
Le gouvernement continue ses coups à l’Assemblée samedi sur son projet de loi de finances 2025, avec peu de chances d’arriver au terme de l’examen du volet recettes avant minuit comme prévu. Contre l’avis du ministre du Budget Laurent Saint-Martin, les députés ont ainsi décidé de pérenniser la contribution exceptionnelle demandée aux entreprises de fret maritime, et plafonné la niche fiscale dont bénéficie ce secteur à 500 millions d’euros. Voire même supprimer un article prévoyant d’alourdir le malus pour les voitures essence et diesel.
Les députés ont également approuvé un article introduisant une taxe sur les rachats d’actions. Les socialistes ont fait adopter un amendement visant à baser l’impôt sur la valeur de rachat des actions et non sur leur valeur nominale, et les Insoumis un autre étendant la mesure à l’ensemble de l’année 2024.
Vendredi déjà, le gouvernement avait essuyé de nombreuses défaites sur ce point » recettes » du budget. Notamment avec la suppression de la surtaxe temporaire sur les grandes entreprises, après que la gauche ait sensiblement augmenté les tarifs, ou la suppression de la hausse de la taxe sur l’électricité, combattue par ses propres troupes.
Les députés de l’opposition soupçonnent le camp gouvernemental de pousser en faveur d’un 49,3, en permettant que le projet de budget de Michel Barnier soit profondément remanié. D’autres se demandent s’il ne cherche pas plutôt un rejet du texte, comme en commission des Finances, ce qui permettrait sa transmission au Sénat, sans même avoir à en examiner la partie » dépenses « du budget. Le gouvernement peut aussi choisir de recourir à l’article 47 de la Constitution, selon lequel si l’Assemblée ne peut se prononcer en première lecture sur un projet de loi de finances après 40 jours (21 novembre), il saisit le Sénat.
(Avec l’AFP)