Construction d’une synagogue sur l’esplanade des Mosquées : un ministre d’extrême droite israélien crée une nouvelle polémique
« Si je pouvais faire ce que je voulais, je mettrais un drapeau israélien sur le site », a déclaré lundi le ministre israélien d’extrême droite Itamar Ben Gvir, qui a lancé une nouvelle polémique en mettant en doute la sagesse du statu quo sur le site de la mosquée de Jérusalem.
Dans une interview à la radio militaire israélienne Galei Tsahal, il a admis qu’il pourrait envisager de construire une synagogue sur le site. « Les Arabes peuvent prier où ils veulent », a-t-il déclaré, « donc les Juifs devraient aussi pouvoir prier où ils veulent ».
Troisième site le plus sacré de l’islam, l’esplanade des Mosquées se situe dans la zone de la Ville sainte occupée et annexée par Israël en 1967. Elle est construite sur les ruines du deuxième temple juif, détruit en l’an 70 par les Romains. Pour les juifs, il s’agit du mont du Temple, lieu le plus sacré du judaïsme. Le lieu est au cœur même du conflit israélo-palestinien et l’objet de tensions récurrentes.
En vertu d’un statu quo décrété après la conquête de Jérusalem-Est par Israël, les non-musulmans peuvent se rendre sur l’esplanade à des heures précises sans prier, mais cette règle est de plus en plus bafouée par un nombre croissant de juifs nationalistes.
« Un acte dangereux, inutile et irresponsable »
Bien que le site soit administré par la Jordanie, son accès est contrôlé par les forces de sécurité israéliennes. Ben Gvir est donc chargé de faire respecter le statu quo, mais il l’a lui-même bafoué de manière spectaculaire le 13 août en se rendant sur l’esplanade avec plusieurs centaines d’Israéliens pour une prière à l’occasion d’une fête juive.
Le bureau du Premier ministre Benjamin Netanyahu a qualifié cet « incident » de « perturbation du statu quo » et a déclaré que seuls « le gouvernement et le Premier ministre (…) définissent la politique (israélienne) sur le mont du Temple », et non un ministre en particulier.
« La politique (actuelle) permet (aux juifs) de prier sur » l’esplanade, a pourtant affirmé lundi Itamar Ben Gvir à la radio militaire, obligeant une nouvelle fois les services du Premier ministre Benjamin Netanyahu à publier un communiqué laconique, assurant qu’il n’y a « aucun changement dans le statu quo sur le mont du Temple ».
Plus incisif, alors qu’Israël est en guerre dans la bande de Gaza contre le Hamas, le ministre de la Défense Yoav Gallant a jugé sur X que « les actions de Ben Gvir mettent en danger la sécurité de l’Etat d’Israël ». « Remettre en cause le statu quo sur le mont du Temple est un acte dangereux, inutile et irresponsable », a-t-il ajouté.
Le leader de l’opposition israélienne Yair Lapid a plaisanté à propos de X, affirmant que la déclaration de Benjamin Netanyahu était correcte car « en effet, il n’y a aucun changement dans le statu quo, qui était et reste que Ben Gvir ne s’en soucie pas et que Netanyahu a perdu le contrôle de son gouvernement ».
Depuis son entrée au gouvernement en décembre 2022, Itamar Ben Gvir, ministre de la Sécurité nationale, s’est rendu au moins six fois sur l’Esplanade des Mosquées, des visites dénoncées comme des provocations et des attaques contre le statu quo par les Palestiniens et de nombreuses capitales étrangères.
Une « ligne rouge »
Les propos du ministre d’extrême droite ont suscité la colère au Moyen-Orient. « Les lieux saints sont la ligne rouge que nous ne permettrons pas de franchir », a déclaré le porte-parole de la présidence de l’Autorité palestinienne, Nabil Abou Rudeina. Le Hamas a qualifié les propos de Ben Gvir de « dangereux » et appelé « les nations arabes et islamiques à prendre leurs responsabilités pour protéger les lieux saints ».
La diplomatie saoudienne a exprimé « son rejet catégorique de ces déclarations extrémistes et incendiaires » et souligné « la nécessité de respecter le statut historique et juridique » de la mosquée Al-Aqsa sur l’Esplanade des Mosquées. Le ministère qatari des Affaires étrangères a pour sa part dénoncé une « provocation » contre les musulmans du monde entier.
« La Jordanie prendra toutes les mesures nécessaires pour mettre un terme aux attaques contre les Lieux saints », a réagi son ministère des Affaires étrangères, qui « prépare les dossiers juridiques nécessaires pour intenter une action devant les tribunaux internationaux » à ce sujet.