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Consternation sur BFM TV après les révélations de « Mediapart » sur l’opération « Sauver Sarko » – Libération

L’article, publié mercredi par le média d’investigation, qui révèle les échanges de SMS entre le communicant de l’ancien président et plusieurs figures de la chaîne, dont son directeur Marc-Olivier Fogiel, inquiète les journalistes. Ceux-ci réclament des garanties pour leur indépendance.

Choc et consternation à la rédaction de BFM TV à 11h22, mercredi 10 juillet. C’est à ce moment-là que l’article est sorti. Médiapart révélant des échanges de SMS entre plusieurs personnalités de la chaîne d’information, dont son directeur Marc-Olivier Fogiel, et la conseillère presse de Nicolas Sarkozy, Véronique Waché, autour de l’opération « Sauver Sarko », soit la vidéo de la fausse rétractation de Ziad Takieddine diffusée par BFM TV en novembre 2020.

« Mépris des règles éthiques »

Un regard ahurissant dans les coulisses d’une véritable opération de communication visant à disculper l’ancien président dans l’affaire du financement libyen, pour laquelle il doit être jugé à partir de janvier 2025. Les échanges de SMS entre Véronique Waché obtenus par les juges d’instruction et révélés par Médiapart Les journalistes de BFM TV révèlent ainsi comment plusieurs personnalités de BFM TV, comme l’ancienne présentatrice Ruth Elkrief, le chroniqueur Bruno Jeudy ou l’ancien PDG d’Altice Media Arthur Dreyfuss ont tenu le camp Sarkozy informé en temps réel de la diffusion des images de Ziad Takieddine ou ont orienté les séquences de plateau abordant l’affaire, critiquant parfois les journalistes de la rédaction jusqu’à l’attachée de presse. Certains, comme Marc-Olivier Fogiel ou Ruth Elkrief, lorsqu’ils n’avaient pas Nicolas Sarkozy directement au téléphone, se sont alors enquis auprès de Véronique Waché de l’efficacité de l’opération. « De bons retours ? » demande Marc-Olivier Fogiel au Communiqué au lendemain d’une interview de Sarkozy par Ruth Elkrief. « Des canons ! » répond Véronique Waché.

Dans un communiqué intersyndical publié mercredi soir, la CGT et le SNJ de BFMTV ont indiqué « consterné et abasourdi par le contenu des messages échangés ». « Ces échanges démontrent que Marc-Olivier Fogiel a utilisé la chaîne BFMTV pour rendre un service à ses connaissances, au mépris de nombreuses règles déontologiques. »fustiger les organisations syndicales, qui estiment que « Son compromis ternit la crédibilité de toute l’équipe éditoriale »Les deux syndicats demandent « garanties d’indépendance totale », « explications très claires de Marc-Olivier Fogiel sur sa collusion ouverte avec l’ancien chef de l’État » et l’inviter à « prendre ses responsabilités ». Cela pose la question de savoir si Marc-Olivier Fogiel peut continuer à diriger BFM TV après de telles révélations.

Briefing de quelques journalistes

La Société des journalistes de la chaîne (SDJ) a adressé mercredi une série de questions à la direction pour obtenir des explications. Les réponses, consultées par Libérerse réfèrent à la ligne de défense que Marc-Olivier Fogiel a communiquée à Médiapart, à savoir que c’était le travail habituel de la direction de protéger la rédaction des pressions extérieures, en traitant directement avec les forces politiques, affichant parfois une certaine complaisance. « L’apparente complicité avec le directeur de la communication de Nicolas Sarkozy s’explique par la nécessité de convaincre l’ancien président de la République d’accorder cet entretien, puis la volonté de relâcher la pression afin de ménager les équipes et la chaîne. » écrit la direction de BFM TV en réponse à la SDJ.

Les SMS révèlent cependant une forme de briefing de certains journalistes en plateau, pour orienter les interviews d’invités pour défendre Nicolas Sarkozy ou mettre l’ancien président en difficulté. Médiapart Edwy Plenel, par exemple, invité le 15 novembre sur BFM. « Évidemment, les questions ne sont jamais posées à l’avance, écrit la direction. Et dans ce cas, dans l’interview de Plenel, c’étaient des thèmes évidents qui allaient être évoqués. Savoir « L’islamo-gauchisme et le fait qu’il ait ouvert la voie aux attentats », comme l’écrit Marc-Olivier Fogiel à Véronique Waché – « calomnie », note Médiapart dans son article.

La société des journalistes s’est également inquiétée de l’indépendance de la couverture du futur procès de Nicolas Sarkozy sur le financement libyen, en janvier 2025. La direction de BFM TV a répondu que « Les faits parlent d’eux mêmes » citant l’exemple d’un récent projet de documentaire sur l’affaire évoquée par la direction de la police et de la justice de la chaîne avec le clan Sarkozy. Ce projet aurait été abandonné par Marc-Olivier Fogiel en concertation avec la rédaction « parce que journalistiquement ce qui était proposé n’avait aucune valeur »La direction de la chaîne d’information estime en tout cas que le traitement de l’affaire à l’antenne a été « irréprochable », citant un « interview pugnace et intransigeante Sarkozy/Elkrief », « interventions à l’antenne de personnalités opposées à Sarkozy (Edwy Plenel ou Fabrice Arfi) » ou la « présence à l’antenne dès le début du chef du département police/justice de l’époque, qui relativise cette déclaration de Ziad Takieddine et relativise son importance dans l’affaire ». Même si cela a été mis en difficulté par l’éditorialiste Bruno Jeudy, encouragé par le chargé de communication de Nicolas Sarkozy.

Contexte de l’acquisition de BFM

Les journalistes demandent enfin à leur direction « des garanties claires et précises sur l’indépendance de la rédaction face à d’éventuelles pressions extérieures de la part des communicants et des politiques. » Ce à quoi la direction de BFM TV a répondu que « Rien ne nous empêche de réfléchir collectivement à une charte améliorée, même si, aujourd’hui, force est de constater que nous travaillons en toute indépendance ; il suffit de regarder les ondes. » Après avoir reçu ces explications, la SDJ a publié jeudi un communiqué de presse rapportant que des journalistes « déçu (par) les réponses fournies par la direction. » Une réunion avec le reste des journalistes de la rédaction a eu lieu jeudi à 14 heures. Même si l’idée d’une motion de censure a été évoquée, ce projet reste en suspens. Marc-Olivier Fogiel a donné rendez-vous à sa rédaction vendredi après-midi. Il sera accompagné du directeur de l’information de BFM TV et RMC, Hervé Béroud, pour faire le point sur une éventuelle charte de l’indépendance éditoriale et sur les relations entre journalistes et politiques.

Ces révélations interviennent dans un contexte particulier pour BFM TV, peu après le rachat de la chaîne par le milliardaire Rodolphe Saadé. Contacté, le groupe CMA Media, nouvelle maison mère de BFM TV, a indiqué qu’il ne ferait aucun commentaire. Ce changement d’actionnaire a récemment alimenté les rumeurs sur un éventuel départ de Marc-Olivier Fogiel, lui aussi fragilisé par les performances de la chaîne, récemment dépassée par CNews en termes d’audience. Interrogé sur le sujet mercredi matin, avant la parution de l’article de Médiapart, Marc-Olivier Fogiel avait affirmé qu’il serait bel et bien présent à la direction de BFM TV à la rentrée. Une stabilité à assurer car une autre échéance est imminente : le processus de renouvellement de la fréquence TNT de BFM TV, qui s’achève en 2025. Dans cette perspective, l’audition des dirigeants de la chaîne par l’Arcom, l’autorité de régulation de l’audiovisuel, aura lieu mardi prochain, 16 juillet.

Cammile Bussière

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