Congés payés acquis pendant un arrêt maladie: comment ça marche?
Députés et sénateurs ont approuvé un projet de loi permettant aux salariés en arrêt maladie de bénéficier du droit aux congés payés, même en cas d’arrêt d’origine non professionnelle.
Changement de direction confirmé. Le 10 avril, députés et sénateurs ont adopté un projet de loi permettant l’acquisition de droits aux congés payés pour les salariés en arrêt maladie d’origine non professionnelle. Jusqu’à présent, seuls les salariés dont le congé était lié à l’emploi, comme par exemple un accident du travail, pouvaient l’acquérir, dans la limite d’un an de congé.
• Qui est concerné par la mesure ?
Les salariés en arrêt maladie sans rapport avec le travail, comme les congés pour maladie de longue durée, acquerront désormais des droits aux congés payés comme ceux dont les congés sont d’origine professionnelle. Cette adaptation de la loi revient à considérer que les arrêts maladie non professionnels constituent du temps de travail effectif et non du repos.
• Quels sont les plafonds fixés par le texte ?
Les salariés en congés bénéficieront désormais de congés payés, à hauteur de 2 jours par mois de congé. Ce qui pourrait représenter jusqu’à 24 jours de congés payés pour une année complète de congé, soit quatre semaines samedi compris.
L’indemnité de congés payés reçue tiendra compte de 80 % de la rémunération reçue pendant le congé.
Pour les salariés en arrêt maladie professionnelle, pas de modification de leurs congés payés qui restent acquis à raison de 2,5 jours ouvrables par mois, soit le même nombre que ceux qui vont travailler. En revanche, ils bénéficient d’une nouvelle avance : l’acquisition des droits aux congés payés est étendue à toute la durée du congé et n’est plus limitée à un an de congé comme auparavant.
• Sera-t-il possible de reporter les congés acquis ?
Le report du congé payé est limité à 15 mois à compter du retour au travail. « Pour les salariés qui n’auraient pas pu prendre leurs congés acquis avant ou pendant l’arrêt maladie mais non utilisés du fait de l’expiration de la période de congé ; les jours acquis sont reportés dans la limite de 15 mois, dans la limite de quatre semaines. par an », confirme Maître Henrion, conseiller juridique chez Herald Avocats, cabinet d’avocats d’affaires.
• Quelles sont les obligations de l’employeur ?
L’employeur doit informer le salarié du nombre de jours de congés acquis dans un délai d’un mois. Cette notification doit être faite par tous moyens lors du retour au travail, sur sa fiche de paie par exemple. La date d’expiration de son congé doit également lui être communiquée.
• La mesure est-elle rétroactive ?
Le texte propose une forme de rétroactivité, couvrant une période remontant à décembre 2009. Concrètement, un salarié en arrêt maladie depuis décembre 2009 pourrait prétendre aux jours acquis entre 2009 et l’entrée en vigueur de la loi. Mais cette rétroactivité reste encadrée : les salariés ne pourront pas demander de jours supplémentaires pour arrêt de travail si pendant les périodes de référence concernées ils ont déjà pu acquérir quatre semaines de congés annuels.
Par ailleurs, les conditions de rétroactivité diffèrent selon la situation du salarié concerné. A priori, parce que la loi ne précise pas ce principe, en cas de rupture du contrat de travail, un délai de prescription de 3 ans s’applique pour obtenir une indemnisation. Ce qui signifie que pour les salariés ayant quitté leur ancien employeur depuis plus de trois ans, aucun recours ne sera possible. Et que la compensation financière ne puisse excéder une période de référence de trois ans précédant la résiliation du contrat.
Si le salarié est toujours lié contractuellement à son employeur, il bénéficiera d’un délai de deux ans pour réclamer les congés payés acquis pendant les périodes d’arrêt, et pourra ainsi faire valoir les droits acquis depuis 2009. « Si la loi est publiée le Le 15 avril 2024, les salariés concernés encore en poste auront deux ans, jusqu’au 14 avril 2026, pour intenter une action, couvrant toutes les périodes pendant lesquelles ils ont été en congé depuis 2009. L’action en justice n’est évidemment pas nécessaire si un accord est trouvé avec l’employeur, par exemple un octroi de jours acquis ou une transaction », donne en exemple Maître Henrion.
• Qu’en pensent les organisations d’employeurs ?
La rétroactivité de la mesure était la grande préoccupation des organisations patronales, dont le Medef et la CPME. Le président du Medef a estimé l’impact financier à plus de deux milliards par an. Les organisations d’employeurs ont initié de nombreuses actions auprès du gouvernement pour limiter l’impact d’un changement législatif.
• Pourquoi une telle révision ?
Le code du travail est révisé pour se conformer à une directive européenne entrée en vigueur en 2009 prévoyant un droit à un congé payé d’au moins quatre semaines. Le projet de loi adopté aujourd’hui fait suite à un arrêt de la Cour de cassation rendu en septembre 2023. La Haute Cour a considéré que les arrêts maladie, quelle que soit leur origine, étaient assimilables à des périodes de travail effectif.