Spécialiste diversité et inclusion à l’OIT, ancien membre de l’équipe de France de goalball
L’accessibilité de Paris 2024 est loin de permettre à tous d’assister aux Jeux de manière équitable et avec un accès complet aux épreuves. Prenons l’exemple des spectateurs aveugles ou malvoyants. Les Jeux comptent 3 562 heures d’épreuves, mais seulement 13 % d’entre elles ont été ou seront audiodécrites, soit 460 heures. Par déduction, 3 102 heures de séances de Paris 2024 resteront inaccessibles à une partie du public. Autant compter sur votre bonne étoile pour que la séance à laquelle vous souhaitez assister soit parmi le lot.
L’audiodescription m’a donné l’impression d’être de nouveau sur le terrain, comme un ancien joueur de goalball, puisqu’elle me permet de savoir quel joueur a le ballon, sa position de tir et la qualité défensive de l’adversaire. Mais au vélodrome jeudi, je comptais sur mes amis pour interpréter les acclamations de la foule au passage des cyclistes. Dans ce contexte d’accessibilité aléatoire, ce qui est frappant, c’est que les trois quarts des heures d’audiodescription ont été allouées aux Jeux paralympiques. 6 % des épreuves olympiques de Paris 2024 ont proposé ce service sur place, contre 31 % pour les épreuves paralympiques.
Comme si les personnes handicapées étaient condamnées à rester entre elles, à ne s’intéresser qu’aux événements à connotation handicap. Dans ce cas, on se mobilise souvent un peu plus. Cela se voit dans divers domaines. Dans les médias, une vidéo sur le handicap a beaucoup plus de chances d’être accessible qu’une autre sur le réchauffement climatique. Lors des journées annuelles consacrées au handicap en entreprise, on pense à vérifier s’il y a une rampe d’accès sur site, des toilettes PMR, pourquoi ne pas proposer des programmes en braille… Tout va bien, on a coché les cases, on se félicite, et l’entreprise peut à nouveau continuer à fonctionner comme avant.
Le chemin pour que l’accessibilité devienne une norme et non une exception, pour apparaître vertueuse à un moment donné, reste très long. Et c’est souvent aux personnes handicapées de se battre pour le raccourcir, alors qu’il s’agit là d’une responsabilité collective. Récemment, la journaliste Laetitia Bernard a été choisie pour animer une émission de football sur TV Monaco. « Sérieusement ? Ils vont oser mettre quelqu’un qui ne voit pas à l’écran, régulièrement, et sans avoir à parler de handicap ? Super, on y va ! » « Elle a été très sollicitée, elle s’est exclamée sur sa page Facebook. Des mots subtils qui traduisent le bonheur d’avoir été contactée une fois n’est pas coutume pour ses compétences professionnelles et non pour l’assigner à un rôle stigmatisant. Et en prime à la télé, où l’image des corps « valides » fait office de norme et la cécité est dépeinte comme un bouleversement.
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