L’examen du projet de loi de finances pour l’année à venir (PLF 2025) a débuté lundi soir, en séance publique, à l’Assemblée nationale. Les débats s’annoncent épiques, et leur issue connue d’avance. La France ne pourra se doter d’un budget qu’en recourant à une nouvelle pirouette constitutionnelle.
On peut toujours rêver qu’il en soit autrement et dénoncer l’utilisation de l’article 49.3 de la Constitution comme d’un « déni de démocratie ». Élisabeth Borne a été vivement critiquée pour cela, mais comment faire adopter le budget dans un Parlement où l’on ne dispose pas de la majorité absolue, sans recourir à ce système destiné à éviter ce type de blocage ?
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Une mission quasiment impossible après 2022, le gouvernement ne disposant que d’une majorité relative à l’Assemblée nationale. C’est pire depuis la dissolution de cet été, les nouvelles élections législatives et l’apparition d’une équipe gouvernementale encore plus fragile. L’examen du volet « recettes » du budget 2025 par la commission des Finances la semaine dernière vient de le démontrer.
Le plan envisagé par Bercy pour équilibrer les comptes publics prévoit 20 milliards de recettes fiscales supplémentaires l’année prochaine ? Les députés de ladite commission, en s’accordant parfois entre gauche et centre, centre et droite, droite et extrême droite, sont parvenus à accroître « l’effort » à hauteur de 50 milliards. Les amendements déposés ont déséquilibré le texte au point que les parlementaires ont fini par rejeter leur propre travail samedi.
Retour à la case départ – la version élaborée par le gouvernement – ce lundi soir. Les mêmes causes produisant les mêmes effets, on peut s’attendre à voir des débats en séance publique donner lieu à autant de confusion et de déraison que les travaux en commission. Avec l’impossibilité d’obtenir un consensus final.
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Un compromis parlementaire ?
Si les textes budgétaires ne peuvent « passer » que par 49,3 cette année encore, pourquoi attendre ? Certains – dont Laurent Wauquiez (Les Républicains) ou Gabriel Attal (Renaissance) – plaident pour les dessiner sans tarder. Cela permettrait au gouvernement d’imposer son texte, en y ajoutant les amendements de son choix, sans débat ni approbation de l’Assemblée ou du Sénat.
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À cette formule mise en œuvre en 2022 et 2023 par « Madame 49.3 » – le surnom donné à Élisabeth Borne par ses détracteurs – Michel Barnier devrait préférer celle du compromis parlementaire. Le nouveau Premier ministre, qui a promis de « respect » Le Parlement a tout intérêt à laisser les débats se développer au sein des deux chambres. Pour montrer qu’il est à l’écoute, il lui suffira de sélectionner, parmi la masse d’amendements pour lesquels ils voteront sans doute, ceux qui proposeront des économies ou des recettes compatibles avec sa vision des choses.
Gageons que le Sénat formulera plus que l’Assemblée. Parce que la Chambre haute est moins remuante, plus rigoureuse, constructive et raisonnable que la Chambre basse. Car il ne compte dans ses rangs aucun élu LFI ou RN. Et parce qu’il est aux mains des Républicains, sur la même longueur d’onde que le nouveau Premier ministre, dont le gouvernement est essentiellement composé d’élus locaux et – pour un quart – de sénateurs.
Au final, Michel Barnier imposera un budget 2025 d’ici 49,3, insistant sur toutes les améliorations retenues, émanant du Parlement. Et qui viendra – tous les paris sont ouverts – principalement du Sénat.