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Comment « Un petit plus » a encouragé les jeunes à organiser des vacances pour les personnes handicapées

Parmi les 10 millions de spectateurs qui ont vu le film d’Artus au cinéma, certains ont eu une révélation. La comédie phénomène raconte l’évasion de deux escrocs cachés au milieu d’une colonie de vacances pour jeunes handicapés mentaux.

Un succès phénoménal qui suscite des vocations ? Un petit quelque chose en plus a dépassé les 10 millions d’entrées au cinéma, samedi 17 août. Projeté dans les salles depuis début mai, le premier film d’Artus est non seulement le plus gros succès de l’année au box-office français, mais aussi le plus gros succès hexagonal depuis la pandémie de Covid-19. Portée notamment par des acteurs en situation de handicap, la comédie raconte l’évasion de deux criminels, père et fils, qui, pour échapper à la police, se cachent au milieu d’une colonie de vacances pour jeunes handicapés mentaux.

Pour certains de ses spectateurs, le long métrage a même été une source d’inspiration. Forts de leur choix par ce qu’ils avaient vu à l’écran, ils ont encadré leur tout premier séjour adapté durant l’été. Six de ces néophytes ont raconté leur expérience à franceinfo. A la fois les moments où la réalité s’apparentait confusément à la fiction et ceux où elle s’en écartait, parfois douloureusement.

En janvier, Eulalie a répondu à une annonce sur Facebook proposant d’encadrer plusieurs séjours adaptés pendant l’été. L’étudiante infirmière de 20 ans, passionnée de scoutisme, y a vu une opportunité de« apprendre, tant sur le plan personnel que professionnel »Quelques mois plus tard, elle va au cinéma voir Un petit quelque chose en plusElle dit aujourd’hui que le film l’a aidée à « projeter » dans un univers qui lui était complètement étranger.

« Le lien qui se crée entre Artus et les vacanciers dans le film m’a émue. J’espérais pouvoir moi aussi vivre cette grande ambiance familiale. »

Eulalie, 20 ans

à franceinfo

Pour Noah aussi, découvrir le film d’Artus, en plus « en avant-première »autorisé à élever « un blocage » face à cela « grand saut dans l’inconnu »confie cette étudiante en droit qui a rejoint pour la première fois cet été l’équipe de compagnons d’une amie, directrice d’un séjour adapté. Une impression partagée par Safia, 19 ans, qui mûrit depuis plusieurs mois le projet de devenir éducatrice spécialisée. La jeune femme voit même dans le film une « référence »qu’elle compte ensuite utiliser pour son travail d’été.

Pour Thibault, voir la comédie au cinéma n’a cependant pas suffi à calmer ses inquiétudes avant de partir. L’étudiant en pharmacie de 25 ans a choisi d’accompagner un séjour de « six personnes souffrant de graves troubles mentaux » en juillet, sannées Jamais avoir « J’ai déjà piégé quelqu’un auparavant. » Alors, lorsqu’il s’est présenté aux vacanciers, il a décidé de jouer franc jeu, leur dévoilant son stress à l’idée de mal faire. « Ils m’ont dit : « Ne t’inquiète pas, on va bien prendre soin de toi ! » Cela a balayé toutes mes angoisses. »dit-il, un sourire dans la voix. Eulalie, elle aussi, loue cette « utilisation instinctive du « tu » informel et ceci « une simplicité incroyable dans les échanges » qui vous met immédiatement à l’aise.

Thibault a trouvé le séjour « en essayant »il salue un « expérience extraordinaire »conformément à « l’esprit du camp d’été » retranscrit par le film d’Artus. Il se souvient particulièrement de la dernière soirée du séjour. Pour l’occasion, il décide d’organiser une sortie dans un bar qui diffuse l’Euro de football. Les vacanciers ont passé la semaine à exiger les scores des matchs. Ils sont « surexcité ». « Pour nous, ilEst « C’était anodin, mais pour eux c’était un rêve. »Thibault est toujours ému. Quand ils arrivent, « le regard des autres » les clients du bar sont curieux, mais « pas du tout négatif ». « Des gars musclés nous ont aidé à porter un fauteuil électrique sur la terrasse, pas du tout à la hauteur », dit l’étudiant. Avec cette finale, Thibault espère s’être montré « à la hauteur » vacanciers en attente « toute l’année » ce petit voyage.

« complicité » représenté à l’écran « colle à la réalité »confirme Justine, 24 ans, reste manager depuis 2021. Un petit quelque chose en plus est même devenue une référence culturelle commune entre animateurs et vacanciers. « Ils sortent souvent des répliques cultes du film qui font rire tout le monde.la jeune femme se réjouit.

Cependant, « Tout n’est pas si rose » que dans la fiction. Marco, étudiant ingénieur de 23 ans qui a participé à son tout premier voyage, près de Sète (Hérault), a pris particulièrement conscience du poids de l’organisation. Il faut toujours « penser aux médicaments », invisible dans le film, et surtout bien planifier le programme à l’avance : « RRéserver une sortie pour un groupe dans un séjour adapté nécessite une préparation des mois à l’avance. » Thibault s’est ainsi rendu compte à quel point les activités pour personnes à mobilité réduite ne sont pas courantes. « On voulait faire la cathédrale de Rouen, mais on n’a pas pu parce qu’il y avait une ou deux marches, ça suffit à gâcher une journée. »soupire le jeune homme.

Il lui a également fallu apprendre à gérer des situations humaines aussi inédites que délicates, comme le raconte l’histoire. Eulalie, qui appréciait néanmoins « la très bonne ambiance » de son séjour près de Saint-Malo (Ille-et-Vilaine). La jeune femme n’oubliera pas « cette dame qui refusait tout en disant ‘non, non, non’… » La compagne s’est retrouvée confrontée à la peur de« infantiliser » le vacancier handicapé.

Les jeunes superviseurs doivent apprendre à travailler sans instructions et avec une « fatigue » croissance.

« Au début, j’ai réussi à être extrêmement patient, en répétant vingt fois la même chose, mais plus le séjour se prolonge, plus il est difficile de rester patient. »

Marco, 23 ans

à franceinfo

Pour éviter les déconvenues, Justine, la directrice du séjour, a pris soin de ne pas cacher les difficultés du métier de guide. « La première chose que j’ai dit aux nouveaux qui sont arrivés après avoir vu le film, c’est que dans la vraie vie, nous travaillons 24 heures sur 24, 7 jours sur 7, avec beaucoup de responsabilités et de stress », souligne la jeune femme.

Safia, partie en Vendée pour s’occuper – avec un autre encadrant – de cinq vacanciers en situation de handicap mental, considère le film « réaliste »avec quelques détails mineurs. Le premier est musical : la bande originale du film, Clic clic panoramique panoramique de Yanns, ne résonne pas dans son minibus, qui vibre plutôt au son de la voix de Johnny Hallyday. La seconde, moins anecdotique, se cache dans les moments de tristesse ou de honte qu’elle doit gérer au quotidien, sans expérience préalable. « Il y a cette vacancière que j’adore, qui danse, chante, aide les autres, et qui me dit un matin, d’une toute petite voix, qu’elle a fait pipi au lit, que ce n’est pas de sa faute. »elle souffle, avant de remettre les choses en perspective. « Mais avec elle, c’est facile, je lui rappelle qu’elle est en vacances, pas à la maison, et bam, ça recommence en une fraction de seconde », la jeune femme est contente, mais admet qu’il n’est pas toujours facile d’être confrontée « à la vie privée » vacanciers.

« Pour tous les débutants, les moments les plus difficilesce sont les premiers secours pour se laver »confirme Eloïse, 25 ans, qui encadre des séjours depuis cinq ans. « Quand la première pluie est terminée, je les vois revenir soulagés d’avoir traversé la capuchon« affirme cette institutrice récemment diplômée. Thibault, 25 ans, redoutait ce moment : « C’était la première fois que j’ai touché le pénis d’un autre homme, mais j’ai vite compris que pour lui, il n’y avait pas de problème, donc pour moi non plus finalement »l’étudiant se demande. Pauline, partie encadrer 10 vacanciers pendant deux semaines en Corrèze, a été rapidement mise au repos sur la question : « Je les ai vus tous nus dans la salle de bain et, en fait, il n’y avait aucune gêne du tout »elle raconte. « Ils s’en fichent je m’en fiche totalementils y sont habitués, alors allons-y joyeusement !ajoute la femme de 28 ans.

Jérôme Durand, directeur de l’association Bien-Etre Tourisme Loisirs Handicap, qui propose des séjours adaptés aux adultes en situation de handicap mental en Rhône-Alpes, porte un regard optimiste sur ces nouvelles recrues pleines de bonne volonté. « difficile à fermer » chaque année, et le directeur espère que « Le film d’Artus apporte beaucoup pour l’avenir ». Bien sûr, Il trouve à redire sur certains points du film, comme « la caricature du vieux cuisinier grincheux qui prépare des plats dégoûtants » ou le fait que, dans la réalité, les personnes qui encadrent les vacances d’été ne sont pas les mêmes personnes qui suivent les participants le reste de l’année ou bien, « très marginal ».

Mais « Le plus important c’est que le film décrit parfaitement la bonne humeur qui règne lors d’un séjour adapté »il se réjouit. Il s’attend donc à « j’ai beaucoup de demandes l’année prochaine » des jeunes ayant réussi la partie théorique du certificat d’aptitude aux fonctions d’animateur (Bafa) après avoir vu Un p‘mésange chose supplémentaire et qui souhaitent valider leur formation pratique lors d’un séjour adapté. Mais il anticipe un écueil : « Aujourd’hui, ce stage ne peut pas être validé dans une structure de vacances adaptée »déplore Jérôme.

Le sujet est particulièrement délicat, après plusieurs incidents qui ont accru la vigilance de l’État sur les questions de sécurité dans ce type de séjour. Fin juillet, les vacances dans les Alpes-de-Haute-Provence ont notamment été suspendues par arrêté préfectoral après « événements indésirables graves »dont la disparition d’un participant pendant près d’une journée. En 2023, un violent incendie a ravagé un gîte alsacien, provoquant la mort de 11 personnes. Des drames susceptibles de susciter une certaine réticence à recruter des jeunes sans expérience.

Pourtant, c’est là le facteur clé d’un séjour réussi, selon Jean-Louis Garcia, président de l’Association des Adultes et Jeunes Handicapés (APAJH), convaincu que « fraîcheur » de ces compagnons, leur « ingéniosité » et leur « audace » sont essentiels pour créer un « une bouffée d’air frais » aux vacanciers. Il prône cependant la création de garde-corps solides. « Dans nos séjours, au moins 50% des dirigeants ont le Bafa et ont déjà travaillé avec nous les années précédentes » il explique, considérant que le « tutorat » est un élément essentiel pour un séjour réussi.

Les compagnons aspirants doivent également suivre « trois jours de formation » systématique, alors qu’il n’existe pas de règles en la matière au niveau national, comme le souligne le dernier rapport de l’Inspection générale des affaires sociales (Document PDF : page 37), publié en mai, qui recommande « rendre la période de formation de deux jours obligatoire et rémunérée ». JENous devons également accepter que « Parfois ça ne marche pastempère Jean-Louis Garcia. Au bout de 48 heures, si le jeune ne le sent toujours pas, il vaut mieux arrêter.

Le président de l’APAJH espère également que le film d’Artus suscitera « vocations », ou même « la merveille » pour ces compagnons qui permettent de réaliser la « droit aux vacances pour les personnes handicapées » Et « le droit au répit pour les aidants »Il se souvient de deux étudiants à qui il a demandé pourquoi ils passaient leurs vacances à faire ce job d’été plutôt qu’à d’autres, plus lucratifs : « L’un d’eux m’a répondu : « Je cherche un petit supplément d’âme. » Il a tout compris. »

Cammile Bussière

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