Au début, c’est un film recherché par le Musée d’Orsay. À l’arrivée, «l’heure d’été» se demande si la salle d’exposition n’est pas le gravédige de l’art. À l’occasion de sa diffusion ce vendredi soir, sur Arte, retourne à la Genèse paradoxale de ce travail avec son directeur, Olivier Assayas.
« Été », par Olivier Assayas, avec Jérémie Renier, Juliette Binoche et Charles Berling. MK2 Productions
Publié le 09 mai 2025 à 18h03
EN 2006, le Musée d’Orsay est dû au cinéma pour lui souhaiter un joyeux anniversaire. Vingt ans que l’ancienne gare a définitivement échangé les trains contre les œuvres du XIXe siècle. Serge Lemoine, son président, demande au producteur François Margolin de développer un film dans Sketch, qui réunirait quatre courts métrages liés au musée. Jim Jarmusch, Raoul Ruiz, Hou Hsiao-hsien et Olivier Assayas sont contactés. Seuls les deux derniers sont intéressés.
Les deux hommes s’apprécient. En 1984, Olivier Assayas, toujours une critique de Cahiers de cinéma, est le premier journaliste occidental à interviewer le cinéaste taïwanais, marquant la naissance d’une complicité artistique et amicale étroite. Mais après un début de collaboration autour du projet du Musée d’Orsay, ils préfèrent chacun faire un long métrage.
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Le projet initial est ainsi abandonné. François Margolin concentre ses efforts sur le film de Hou Hsia-Hsien, Le voyage du ballon rouge, Avec Juliette Binoche; Olivier Assayas, en revanche, doit trouver un autre producteur. Il soumet son scénario à Marin Karmitz, le fondateur de la société MK2. « Il a immédiatement accepté, Rappelle le directeur. Dans l’élan, Juliette Binoche m’appelle pour me dire qu’elle a lu le script et qu’elle veut jouer dans le film. C’était un petit rôle, mais elle l’a vraiment tenue. L’idée aimait être dans les deux films du Musée d’Orsay. »» Celui d’Olivier Assayas raconterait l’histoire d’une famille a explosé dans le monde, soudainement confronté au poids d’un patrimoine artistique, patrimonial et sentimental. Ce serait Heure d’été,, méditation suave sur le temps, la mémoire et la transmission au xxie siècle.
L’art est conçu pour être vécu et non regardé dans les musées.
Olivier Assayas
Désolé d’avoir lancé un film à partir duquel il a ensuite pris sa retraite financière, Orsay ouvre ses portes au tournage et prête gracieusement des œuvres de sa collection. « Ce n’était pas facile de les protéger lorsque vous couriez dans la maison familiale, qui est une propriété privée. Nous avons dû appeler des gardes de nuit avec des chiens … »

En 2007, Olivier Assayas sur le tournage de « Summer Time ». MK2 Productions
Deux panneaux d’Odilon Redon sont déplacés, le moulage d’une statue Degas, un fauteuil, une fenêtre et un bureau de Louis Majorlle. Ce bureau qui, à la fin du film (méfiez-vous, divulgue) laisse la famille pour le Musée d’Orsay, conduisant précisément à sa fonction principale en cours de route. C’est l’épicentre de la réflexion du cinéaste: « Il y a une idée fondamentale qui traverse le xxe Century et ce gars Debord a peut-être apporté le plus loin: celui de l’opposition entre la vie et l’art. L’art doit naître de la vie. L’art est conçu pour être vécu et non regardé dans les musées. L’authenticité du sentiment de l’artiste perd sa vie dans le musée. Quelque chose de son âme s’éloigne. »»
Je ressentais un peu d’inconfort: je leur ai montré quelque chose qui, grossièrement, assimilé au musée à mort!
Olivier Assayas
Ainsi, lorsque vous dévoilez le film en direction d’Orsay, l’embarras a changé de camp. « J’ai ressenti un peu d’inconfort: je leur ai montré quelque chose qui, à peu près, a assimilé le musée à mort! » En fait, ils l’ont très bien pris, car c’est précisément une question qu’ils se posent tous les jours. Leur travail consiste à chercher comment donner vie aux œuvres. Je leur offre une solution. »»
Pour Olivier Assayas, cette solution se trouve dans le cinéma lui-même, l’art de la vie par excellence. «Je viens des arts plastiques, puis j’ai choisi le cinéma, qui a résolu des questions que je me posais en tant que jeune artiste plastique. J’ai vécu très mal la solitude de la peinture. Le cinéma est un art collectif, en contact avec les autres, qui explore le monde. La création est partagée. Il y a une continuité dans mon travail qui est lié à ce que les autres m’apportent.
Le cinéma est la forme artistique la plus populaire.
Olivier Assayas
Sans oublier que les œuvres prêtées par le musée, dont certaines ont été enterrées dans les réserves, ont trouvé la vie par la grâce du cinéma. Et une certaine longévité: dix-sept ans après sa libération, Heure d’été S’invite à toutes les maisons, grâce à Arte. «Le cinéma est la forme artistique la plus populaire. L’art contemporain, la poésie, la musique savante ont complètement perdu leur relation avec la société, avec le monde. Le cinéma a gardé cette spécificité de s’adresser à tout le monde.»
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