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Comment OpenAI compte à nouveau creuser l’écart avec ses rivaux

Comment OpenAI compte à nouveau creuser l’écart avec ses rivaux

Le temps est venu pour OpenAI de réaffirmer sa domination dans le domaine de l’intelligence artificielle. Selon Les informationsLe créateur de ChatGPT pourrait présenter d’ici la fin du mois son modèle d’IA « Strawberry », doté de capacités de raisonnement jamais vues auparavant, selon l’entreprise. Cette annonce devrait s’accompagner du déploiement de GPT-Next, la nouvelle itération de GPT-4, son IA de référence sortie il y a 18 mois. De quoi mettre un peu de distance entre elle et la concurrence, qui s’est considérablement renforcée depuis la sortie de ChatGPT en novembre 2022.

Comme les bonnes nouvelles n’arrivent pas seules, l’entreprise, qui vient de dépasser le million d’utilisateurs payants sur ses différents services, prépare une nouvelle levée de fonds massive, peut-être de plusieurs milliards de dollars. Il lui faut remettre du charbon dans une machine qui brûle plusieurs milliards de dollars par an. Mais si OpenAI parvient à démontrer qu’elle reste la plus capable d’atteindre l’idéal de superintelligence poursuivi par l’industrie, l’argent continuera à couler à flot.

OpenAI, un numéro un fragile

Depuis la sortie tonitruante de son modèle GPT-4 en mars 2023, la star de l’intelligence artificielle a perdu de son éclat. Faute d’innovations de rupture, son avance a été progressivement grignotée par un trio de sociétés dont Google, Meta et sa rivale Anthropic. D’autres, comme xAI, la très financée par Musk, ou le joyau français Mistral, restent en embuscade.

Malgré cette relative stagnation, le créateur de ChatGPT s’accroche à son siège officieux de numéro un du secteur. Il veille à mettre à jour régulièrement son meilleur modèle, désormais baptisé GPT-4o, pour qu’il apparaisse en tête des classements de performances scrutés par les experts. Il se distingue surtout par la variété de ses outils, que seul Google parvient à copier : ChatGPT pour la conversation textuelle et audio, Sora pour la génération de vidéos et bientôt SearchGPT pour la recherche en ligne.

Garder la tangente n’est pas sans coût : la start-up reste une machine à brûler du cash. Les informationselle aurait dépensé pas moins de 7 milliards de dollars en 2023, pour un chiffre d’affaires annualisé (la projection de ses revenus mensuels sur 12 mois, NDLR) de 3,4 milliards de dollars. Ce bilan financier, désastreux pour n’importe quelle autre industrie, n’effraie pas les investisseurs, bien au contraire.

Car si le secteur de l’IA générative dans son ensemble tarde à montrer les premiers signes de rentabilité, il dispose néanmoins d’un atout précieux : le saut technologique. Les investisseurs espèrent décrocher le jackpot dans cinq ou dix ans, lorsque les fameuses « superintelligences » projetées par les chercheurs pourraient arriver sur le marché.

Un sauveur nommé Strawberry

Justement, deux annonces d’OpenAI, attendues ce mois-ci, donnent un motif d’espoir à ceux qui ont misé des milliards de dollars sur sa technologie. La première n’est autre que le lancement du successeur de GPT-4, évoqué dans les rumeurs sous les noms de GPT-Next ou Orion.

Depuis l’officialisation de ce projet en novembre 2023, l’entreprise ne cesse de promettre un saut technologique pour cette nouvelle génération de modèles. Tadeo Nagasaki, directeur japonais d’OpenAI, a même annoncé qu’elle serait 100 fois plus puissante que son prédécesseur. Une estimation très vague mais révélatrice des attentes autour du nouveau modèle en termes de génération et de manipulation de texte, d’image et de son. Tout cela, sans consommer plus de ressources à l’usage.

Mais GPT-Next n’est pas le modèle le plus attendu. Après tout, même s’il est le premier à arriver sur le marché, il pourrait rapidement être imité par les concurrents d’OpenAI, qui ont eux aussi promis des avancées technologiques.

Non, l’IA la plus attendue d’OpenAI s’appelle « Strawberry ». Un secret bien gardé par l’entreprise, à l’exception de rares fuites dans Les informations Et Reutersil aurait été en développement depuis au moins deux ans.

Apprendre à l’IA à raisonner, le nouveau Saint Graal de l’industrie

Concrètement, cette IA franchirait une nouvelle étape par rapport aux modèles actuels en termes de raisonnement. D’une certaine manière, elle serait capable de réfléchir à un problème dans son intégralité avant de répondre à une question, c’est-à-dire de faire  » recherche approfondie « , dans le jargon d’OpenAI. Elle permettrait ainsi à l’industrie de faire un pas crucial vers l’idéal de la superintelligence.

À court terme, ces nouvelles capacités pourraient aider à corriger les hallucinations (situations dans lesquelles l’IA présente des mensonges comme la réalité) et à résoudre des problèmes plus complexes en général. Ou, plus simplement, l’IA pourrait enfin évaluer correctement le nombre de lettres « r » dans le mot « fraise », un test populaire auquel tous les tests de référence du secteur échouent. Selon Reuters, Strawberry a même obtenu des résultats exceptionnels lors d’un test de mathématiques de référence pour les modèles d’IA génératifs.

Mieux encore, ce nouveau type d’IA serait capable de générer des données de haute qualité, qui serviraient à entraîner des modèles d’IA comme GPT-Next, alors que le secteur fait face à une crise des données après avoir aspiré pratiquement tout ce qui était disponible sur Internet.

Selon les journaux américains, Strawberry ne serait pas accessible en tant que tel aux clients d’OpenAI, mais ses capacités seraient distillées dans ses différents outils, à commencer par ChatGPT. Et encore, il ne s’agirait-il que d’une version miniature du modèle, dont la dangerosité potentielle suscite déjà des spéculations.

Des milliards pour alimenter le réservoir

La présentation de ces nouveaux modèles permettrait de relancer la machine à sous. Selon plusieurs titres de presse américains comme CNBCOpenAI prépare une levée de fonds majeure d’ici la fin de l’année, sur la base d’une valorisation de plus de 100 – certains disent 103 – milliards de dollars.

C’est au moins 20 milliards de plus que fin 2023, lorsque l’entreprise a racheté des actions à ses salariés. C’est aussi quatre fois la valorisation de xAI (24 milliards de dollars en avril 2024 pour la start-up d’Elon Musk) et d’Anthropic (18,4 milliards de dollars en mai 2024), et sans comparaison avec Mistral AI (6 milliards d’euros, soit 6,6 milliards de dollars, en juin 2024) et d’autres concurrents.

S’il est certain que la levée de fonds s’élèvera à des milliards de dollars, reste à savoir si elle dépassera les 10 milliards de dollars du dernier tour de table, daté de mars 2023, pour une valorisation de 29 milliards de dollars. Alors qu’OpenAI est depuis 2019 et jusqu’à présent quasi exclusivement nourri par Microsoft, il ouvre cette fois son capital aux fonds de capital-risque et autres grands groupes. Le géant de la tech, qui a déjà investi plus de 13 milliards de dollars et détient 49 % des parts, devrait mettre au pot mais il ne mène pas ce nouveau tour de table. Selon Reuters, la levée de fonds est initiée par Thrive Capital, qui met un milliard de dollars, et sera suivie par la crème des investisseurs de la Silicon Valley et plusieurs géants de la tech comme Apple et Nvidia.

L’énorme besoin de liquidités d’OpenAI a plusieurs origines. Il faut d’abord se payer de la puissance de calcul : pour se rapprocher de sa promesse d’une IA capable de surpasser les capacités humaines, l’entreprise crée des modèles avec toujours plus de paramètres, qui nécessitent toujours plus de puissance de calcul pour les entraîner, et par extension l’achat de toujours plus de processeurs. Même si Nvidia améliore les capacités des puces pour les rendre plus efficaces – la prochaine génération de processeurs IA, Blackwell, devrait être livrée l’année prochaine – et que de nouvelles méthodes d’ingénierie permettent de réduire la puissance nécessaire pour entraîner les IA, cela ne suffit pas du tout à contenir la hausse de la demande.

Et ce n’est pas tout : une fois que les modèles quittent les laboratoires de recherche, il faut les exécuter, ce qui n’est pas sans coût. La version gratuite de ChatGPT, utilisée par plus de 200 millions d’utilisateurs par semaine, se traduit par une perte nette pour OpenAI, même si elle sert de démonstrateur public de la technologie.

De même, la version payante du célèbre chatbot, ChatGPT Premium, affiche un coût fixe de 20 euros par mois, qui ne tient pas compte du volume d’utilisation. Heureusement, la sortie du modèle GPT4-o, bien moins vorace que son aîné GPT-4 à performances égales, a permis de diviser drastiquement la facture. Enfin, OpenAI doit sortir le chéquier pour mener une guerre sans merci des talents, où se mélangent géants de la tech aux poches presque infinies et start-ups surfinancées.

OpenAI fait peau neuve

A l’échelle de l’industrie, si OpenAI a tant besoin d’être rassuré sur sa capacité à mener des innovations disruptives comme Strawberry, c’est aussi parce qu’elle ne ressemble plus du tout à l’OpenAI qui a lancé ChatGPT. Le New York Times80 % des 1 700 employés d’OpenAI n’étaient pas présents en novembre 2022 lors de la sortie du chatbot.

Son hypercroissance s’est aussi accompagnée d’un renouvellement du management. Sur treize cofondateurs en 2015, il n’en reste que deux : le PDG Sam Altman et le président Greg Brockman. Et pourtant, ce dernier a pris un congé sabbatique cet été, et ne devrait pas revenir avant l’année prochaine. Le début d’année a notamment été marqué par le départ, qui a semblé être un claquement de porte, d’Ilya Sutskever, cofondateur considéré comme le cerveau scientifique de l’entreprise, désormais aux commandes de sa propre start-up, Safe Superintelligence. Il avait voté le licenciement de Sam Altman fin 2023, une décision annulée à peine une semaine plus tard.

Intelligence artificielle : OpenAI traverse une période d’incertitude au pire moment

Du côté des équipes opérationnelles, Altman a pioché ses nouveaux dirigeants chez Facebook, Twitter et Nextdoor. Des profils qui ont travaillé dans de grandes entreprises technologiques et qui inspirent OpenAI. Il s’agit d’un véritable tournant culturel pour la jeune société. Lancée comme un laboratoire privé de recherche fondamentale à ses débuts, OpenAI a progressivement glissé vers le statut d’entreprise à but lucratif. Cette dualité, exacerbée lors de la saga autour de l’éviction manquée de Sam Altman, reste une source de tensions, notamment avec les chercheurs en IA. Selon la presse américaine, l’entreprise pourrait même revoir son statut administratif pour clarifier la situation.

Cet OpenAI 2.0 joue gros avec les présentations à venir, à la fois pour son avenir, mais aussi pour celui de l’industrie. Alors que les inquiétudes concernant une bulle de l’IA gagnent du terrain, le créateur de ChatGPT a l’occasion de les dissiper en partie. Et de montrer que non seulement l’idéal de la superintelligence n’est pas qu’un mirage, mais qu’il peut aussi être mis en ordre de marche pour devenir un business rentable à long terme.

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