Le ministre turc des Finances est aux États-Unis pour des réunions de haut niveau avec des investisseurs et des institutions financières internationales. Sa mission : ramener les capitaux étrangers qui ont fui le pays ces dernières années.
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Les investisseurs étrangers, occidentaux notamment, se sont détournés de la Turquie ces dernières années : depuis 2015, les investissements directs étrangers (hors immobilier) ont quasiment été divisés par deux. Il y a bien sûr des facteurs externes liés à la situation internationale, nettement moins favorable que celle dont a bénéficié la Turquie dans les années 2000 – années de prospérité qui ont également conduit aux succès électoraux de Recep Tayyip Erdogan. Mais il y a surtout des facteurs internes. Car même si la Turquie est restée politiquement stable (c’est le même parti, l’AKP, qui est au pouvoir depuis 22 ans), son régime est devenu de plus en plus autoritaire. Et cela a eu un effet direct sur sa gouvernance économique.
La perte d’indépendance des institutions judiciaires et financières comme la Banque centrale, l’entêtement du président pendant des années à ordonner des baisses de taux au nom de la lutte contre l’inflation (alors que l’inverse est préconisé), ou encore le laisser-faire en matière monétaire. un blanchiment dont ont profité toutes sortes de mafias et d’organisations criminelles internationales – qui a également conduit à inscrire la Turquie sur la liste grise du GAFI (le groupe d’action financière)… Tout cela explique pourquoi ce pays n’inspire plus confiance aux investisseurs occidentaux, même si son économie dépend des capitaux extérieurs.
Les doutes des investisseurs étrangers… et de la population turque
Même si le gouvernement met en œuvre les politiques nécessaires pour réduire l’inflation – qui était encore supérieure à 68 % sur un an le mois dernier – il n’est pas certain que cela suffira. Car la méfiance des investisseurs est fondamentalement liée à l’imprévisibilité de la Turquie de Recep Tayyip Erdogan. Et pas seulement au niveau économique, mais aussi au niveau de l’État de droit, car nous avons vu que les deux sont liés. Recep Tayyip Erdogan sera-t-il capable, compte-t-il même améliorer les choses dans ce domaine ? Pour améliorer, par exemple, l’indépendance de la justice ? Comme le doute est permis, on peut aussi douter de sa capacité à restaurer complètement la confiance des investisseurs étrangers.
Quant aux Turcs eux-mêmes, si l’équipe désignée par Erdogan met en œuvre le programme annoncé, ils peuvent s’attendre à une politique d’austérité visant à freiner la demande pour réduire l’inflation, et donc à une hausse du chômage. Symbole de cette période d’austérité qui semble commencer : le gouvernement vient d’annoncer qu’il n’y aurait pas de nouvelle augmentation du salaire minimum cette année, contrairement à ce qu’espéraient des millions de travailleurs turcs.