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comment l’attitude de Gisèle Pélicot a déjà donné au procès une dimension historique et internationale

comment l’attitude de Gisèle Pélicot a déjà donné au procès une dimension historique et internationale



La combativité de la victime et ex-femme du principal accusé, qui a refusé de comparaître à huis clos et a témoigné publiquement jeudi, contribue au retentissement de cette audience, où 50 autres hommes sont jugés pour l’avoir violée alors qu’elle était droguée et inconsciente.

Son visage est désormais connu dans le monde entier. Avec son carré brun et ses lunettes de soleil, Gisèle Pélicot, dont le patronyme était encore réduit à l’initiale « P. » quelques jours plus tôt, est propulsée sous le feu des projecteurs depuis l’ouverture du procès pour viol de Mazan, lundi 2 septembre à Avignon (Vaucluse). Son mari et 50 coaccusés comparaissent pour avoir abusé d’elle pendant dix ans alors qu’elle était droguée et inconsciente. Depuis que l’affaire a éclaté en 2020, cette épouse était restée dans l’ombre généralement réservée aux victimes de violences sexuelles. C’est sa fille, Caroline Darian, qui a porté le flambeau de la médiatisation à travers un livre et des interviews sur le phénomène de soumission chimique.

Cette femme, qui aura bientôt 72 ans, a pris le relais dès le premier jour d’audience, refusant le huis clos auquel elle avait droit. « La honte doit changer de camp »a martelé l’un de ses avocats, Stéphane Babonneau. Un courage salué par l’auteure Lola Lafon dans Libérerqui compare « Gisèle » aux athlètes olympiques que la France a admirés tout l’été : « Nous aurons célébré et célébré le courage, la force, la capacité à dépasser ses limites. Aujourd’hui, une femme s’apprête à accomplir un exploit. » Selon l’auteur de Chavirercette victime, en exposant son calvaire à la face du monde, « confirme la fin d’un mythe qui a tous les attributs d’un déni collectif : le mythe du monstre. »

« Le procès Mazan est remarquable par le nombre de prévenus, mais il est temps d’arrêter d’invoquer le caractère « spécial » de cette affaire, en la qualifiant de fait divers « hors du commun ». Cette affaire est la loupe de tous les viols conjugaux, ce crime si peu entendu, si peu reconnu. »

Lola Lafon

dans « Libération »

Dans la salle d’audience comble du tribunal correctionnel d’Avignon, Gisèle Pélicot se retrouve face à son ex-mari, Dominique Pélicot, dont elle a récemment divorcé, et aux dizaines d’hommes jugés pour l’avoir violée alors qu’elle était inconsciente. Pompier, artisan, infirmier, gardien de prison et journaliste… La majorité des accusés sont venus une fois, dix plusieurs fois et, pour certains, jusqu’à six fois. Seuls 14 d’entre eux ont reconnu les faits qui leur étaient reprochés. Et trois ont présenté leurs excuses à la victime. « Assumez la responsabilité de vos actes au moins une fois dans votre vie »elle leur a dit jeudi.

Grâce à la médiatisation des débats, les propos puissants de Gisèle Pélicot ont résonné dans la salle et bien au-delà. Reprises par les journalistes des 36 médias accrédités, elles ont fait la une de la presse internationale. « J’ai été sacrifié sur l’autel du vice »titre le quotidien britannique Le Gardien. « Il n’avait aucune pitié, aucune pitié du tout »rapporte le quotidien indien Le Hindustan Timesalors que l’Inde est régulièrement confrontée à des cas de viols collectifs très médiatisés. « Ils m’ont traité comme une poupée de chiffon, un sac poubelle »le quotidien espagnol maintient Le monde. LE Le New York Times cite pour sa part cette phrase prononcée à l’adresse de toutes les autres victimes potentielles de la soumission chimique : « Quand d’autres femmes se réveilleront sans aucun souvenir, elles se souviendront peut-être du témoignage de Mme Pélicot. »

« J’ai tenu bon pendant ces quatre mois de procès. Ce n’est pas pour moi que je témoigne, mais pour toutes ces femmes qui subissent la soumission chimique. »

Gisèle Pélicot

devant le tribunal correctionnel d’Avignon

C’est lors de ce premier témoignage que cette mère et grand-mère a insisté pour qu’on l’appelle par son nom. « Je veux m’appeler Gisèle Pélicot, en solidarité avec mes enfants »elle a dit après avoir détaillé ces années de « torture » sans cligner des yeux, tandis que tous les détails de sa vie privée étaient révélés au tribunal.

De leur côté, ses trois enfants ont indiqué jeudi à l’AFP qu’ils souhaitaient désormais que leur nom de famille soit publié par la presse. « Plus que jamais, ils sont fiers de leur mère »ont plaidé leurs avocats, Stéphane Babonneau et Antoine Camus. Quant aux petits-enfants, « C’est une fierté pour eux d’être les petits-enfants de Gisèle Pelicot. Pour eux, c’est important que cela devienne une fierté dans la cour de récréation de porter ce nom qui était aujourd’hui celui du courage incarné et de la force dans la vie »a ajouté Antoine Camus.

Bien que Gisèle Pélicot souhaite reprendre son nom de jeune fille après le procès, l’histoire retiendra probablement ce patronyme comme celui de la victime et non celui de l’accusé. C’est en tout cas cette démarche combative – elle s’est comparée à une « boxeur » – et public qui semble avoir donné cette tournure historique et internationale au procès dès la première semaine. « Chère Gisèle Pélicot, vous êtes entrée dans nos vies comme à la cour d’Avignon, par la grande porte. Vous marchez droit, la tête haute. »écrit Hélène Devynck dans une chronique publiée par Le monde. Comme Lola Lafon, la journaliste, qui est l’une des plaignantes dans l’affaire PPDA, souligne « banalité des profils » accusé, « une réalité difficile à accepter » pour l’avis.

« Ce n’est pas seulement toi, Gisèle, qu’ils nous traitent comme une chose. Ils nous disent à tous combien nous sommes insignifiants. Ta force nous rend nôtres. Merci pour cet immense cadeau. »

Hélène Devynck

dans « Le Monde »

Dans la salle d’audience, des militantes féministes remercient Gisèle Pélicot de ne pas avoir demandé un huis clos, comme on peut le voir sur des images de l’émission « Quotidien ». La députée Sandrine Josso, qui accuse le sénateur Joël Guerriau de l’avoir droguée en vue de l’agresser sexuellement ou de la violer, a également fait le déplacement. Elle a confié aux journalistes avoir été convoquée « submergé par les larmes » par le témoignage de Gisèle Pélicot. A distance, l’influenceuse Nabilla, ex-star de télé-réalité, avait lancé une cagnotte de soutien intitulée « Nouvelle vie pour Gisèle Pélicot », afin de « pour contribuer aux frais de justice et l’aider à traverser cette terrible épreuve »Ouverte jeudi soir, elle a été fermée vendredi à la demande de la victime.

Par la voix de leurs avocats, Gisèle Pélicot et sa famille « Je remercie toutes les personnes qui ont envoyé des messages massifs de soutien du monde entier depuis le début du procès. » Mais la principale intéressée, là encore, semble presque s’oublier elle-même pour le plus grand bien du procès, qu’elle souhaite « préserver la dignité et la sérénité des débats »Elle appelle à « la plus grande modération sur les réseaux sociaux ».A la barre, c’est sa fille Caroline qui a pris le relais vendredi matin et a raconté l’histoire « cataclysme » Les souffrances de sa famille. L’épilogue d’une semaine qui a déjà fait entrer le « procès du viol de Mazan » dans les annales judiciaires.

francetvinfo

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